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17 janvier 2009 : la famille Al Ashqar
jeudi 29 mars 2012 - PCHR Gaza
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Nujoud Al Ashqar avec son fils Sabri

Il était 5h30 par ce 17 janvier 2009, lorsque les forces israéliennes venaient d’attaquer tous les environs de l’école de l’UNRWA de Beit Lahiya. L’ensemble de la région a été bombardé par des charges hautement explosives et par des obus au phosphore.

Pour rappel, le phosphore blanc est un agent incendiaire qui s’enflamme au contact avec l’oxygène. Son utilisation contre des zones peuplées de civils transgresse les principes de distinction et l’interdiction des attaques sans discernement.

Ce jour là, au moment de l’offensive, Nujoud et quelque 1600 autres personnes s’étaient réfugiées dans l’école. Elle avait survécu avec plusieurs blessures graves au niveau de la tête ainsi que l’amputation de son bras droit. Et ses deux garçons Bilal (6 ans) et Mohamed (4 ans) y avaient trouvé la mort.

Le PCHR s’est rapproché de Nujoud pour évoquer le lendemain de l’attaque survenue il y a trois ans déjà, ainsi que les séquelles et conséquences vécues juste après. A ce titre, elle avoue que la vie était devenue extrêmement pénible, notamment sa relation avec son mari Mohamed. Elle explique : « Au début, mon mari me tenait pour responsable de la mort de nos enfants. Chaque jour, il me menaçait de se remarier. Mais je dois reconnaître que les choses se sont améliorées depuis la naissance de notre fille Haneen. Ils s’aiment beaucoup ».

En effet, la naissance de Haneen, âgée actuellement de 1 an, est à la fois une bénédiction et un véritable défi pour Nujoud. Une bénédiction, car Nujoud se réjouit de pouvoir enfanter de nouveau, surtout après la perte de Mohamed et Bilal. Et un défi parce qu’elle devait faire face aux difficultés quotidiennes, notamment son propre état de santé lié à l’amputation de son bras, sa famille et ses enfants. Elle raconte : « C’est au moment où je dois m’occuper de Haneen que je deviens particulièrement frustrée. C’est pourquoi je dois toujours demander l’aide de Madleen. Ceci n’est pas une solution parce que les services de Madleen sont au détriment de ses études. Ses sacrifices me chagrinent mais il n’y a pas moyen de faire autrement ».

La mère ne manque pas de déplorer le recul qu’a connu le niveau scolaire de sa fille. « Les choses s’empirent parce que je n’ai plus la patience d’avant l’attaque pour l’aider à faire ses devoirs. »

À l’instar de sa mère, Madleen était dans l’école de l’UNRWA au moment de l’attaque. Depuis, elle est condamnée à vivre avec les souvenirs de ce jour et la perte de Bilal et Mohamed. « Madleen refuse de dormir seule, elle ne dort que dans la chambre de ses parents » raconte Nujoud, qui ajoute : « Elle a très peur de rester toute seule. L’autre fois, lorsque nous étions dans le jardin, je lui ai demandé d’aller chercher quelque chose dans la chambre. Elle a refusé catégoriquement de se déplacer sans moi ».

De ce fait, la mère et sa fille partagent les mêmes angoisses du passé et appréhensions au sujet de l’avenir. Ainsi, Nujoud explique : « Des fois, lorsque circule la rumeur d’une nouvelle guerre ou incursion israélienne, Madleen commence à me poser des questions à ce sujet et évoque l’incident. Mais comme je ne suis pas capable de discuter de ce qui s’est passé, je lui dis juste de ne pas l’aborder ».

De plus, Nujoud fuit les questions des gens et visiteurs, curieux de savoir ce qui s’est passé cette nuit-là. Pour cela, elle dit refuser de parler du sujet parce que, explique-t-elle : « Si je reviens sur les détails de la catastrophe je passe toute ma journée et toute la nuit à rembobiner les évènements dans ma tête ».

L’attaque du 17 janvier 2009 a privé Nujoud de beaucoup de choses. Devenue manchote, elle a également perdu ses cheveux à cause de différentes brûlures dans la tête. Nujoud raconte au PCHR qu’elle souffre de sérieux maux de tête et qu’elle a dû, pendant toutes ces années, porter son foulard même à l’intérieur de la maison. Aujourd’hui, avoue-t-elle : « Mes cheveux ont repoussé sauf dans certains endroits de blessures. Mais je souffre quand Madleen essaie de me les coiffer ».

En dépit de toutes ces douleurs, la souffrance majeure de Nujoud s’appelle Bilal et Mohamed. Elle confie : « Comment pourrais-je oublier mes enfants ? Même si je vivrai 200 000 ans, je ne les oublierai jamais ». En effet, Bilal et Mohamed avaient été un soutien et un pilier de stabilité solide dans la vie de Nujoud. « Lorsque je me disputais avec mon mari et pensais à quitter la maison pour aller chez ma famille, c’est Bilal et Mohamed qui me raisonnaient et m’en dissuadaient. Aujourd’hui, quand nous nous disputons, je vais dans ma chambre et je pense à eux ».

Pour sa part, le mari de Nujoud souffre autant que son épouse. L’existence de Mohamed a été dévastée par la mort de ses enfants, notamment Bilal qui avait l’habitude d’aider son père à communiquer avec les autres puisqu’il est sourd et muet.

La famille Al Ashqar, malgré toutes les séquelles physiques et psychologiques garde espoir à travers l’heureux évènement qu’ils attendent. Enceinte, Nujoud se veut optimiste pour sa santé et pour celle de son futur bébé. La famille espère avoir un garçon pour lui donner le prénom de son frère Bilal. « Bilal avait une place assez particulière dans nos c ?urs, surtout que nous l’avions tant attendu. C’est pourquoi, je souhaite du fond du c ?ur avoir un garçon pour perpétuer le prénom de son frère. »

En date du 18 mai 2009, le PCHR a soumis une plainte pénale auprès des autorités israéliennes au nom de la famille Al Ashqar. A ce jour, seule une réponse interlocutoire attestant de la réception de la plainte a été reçue. Aucune autre réponse n’a été donnée en dépit des nombreuses requêtes et demandes formulées.

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Traduction : Info-Palestine.net - Niha