Furkan Dogan était un Américain, un jeune Américain de seulement 19 ans lorsque le 31 mai une grêle de balles israéliennes a mis fin à sa vie sur le bateau turc d’aide humanitaire, le Mavi Marmara. Furkan filmait l’assaut israélien quand un commando lui a froidement envoyé sa première salve, directement au visage. Quatre projectiles supplémentaires ont été tirés sur Furkan, le laissant mort et méconnaissable.
Le Mavi Marmara, le plus grand bateau d’une flottille internationale de six navires qui constituaient la Flottille de Liberté pour Gaza, transportait des stocks de nourriture, des médicaments et des fournitures scolaires destinés à la bande de Gaza assiégée par Israël. Les Israéliens imposent un blocus sur Gaza depuis que le gouvernement du Hamas a été démocratiquement élu en 2006.
Pendant plus de trois semaines, de décembre 2008 à janvier 2009, les Israéliens ont attaqué Gaza sans aucune retenue, détruisant les infrastructure de base et tuant plus de 1400 citoyens palestiniens, un grand pourcentage d’entre eux étant des femmes et des enfants.
Furkan, qui était né à Albany-Troy dans la région de New York, s’en était retourné vivre dans la ville natale de sa famille, Kayseri en Turquie.
Sa famille connaissait les noms des huit ressortissants turcs qui avaient été tués sur le Mavi Marmara, mais un autre tué n’avait pas été immédiatement identifié. Dans leur habitude de diffuser des mensonges et des fausses informations, les Israéliens n’avaient pas nommé Furkan parce qu’il était Américain. Ils ont attendu jusqu’à ce que l’impact initial de leur attaque meurtrière contre les humanitaires innocents et sans défense se soit un peu estompé avant de confirmer que la neuvième victime était Furkan.
Quand le père de Furkan est allé rencontrer les survivants et les blessés du Mavi Marmara il n’imaginait pas un instant que son fils avait été assassiné. Au lieu de se réjouir de retrouver son fils, il a été conduit à la morgue pour identifier sa dépouille. Un tel jour défie toute description.
Dans une réaction immédiate après le massacre du Mavi Marmara, Viva Palestina a annoncé son projet d’une autre mission d’aide humanitaire pour Gaza. Viva Palestina, une association d’aide dont le siège est en Grande-Bretagne et qui a été fondée par l’ancien membre du Parlement britannique George Galloway, a lancé son premier convoi d’assistance par voie terrestre en mars 2009, peu de temps après la fin de l’attaque israélienne. Le 18 septembre 2010, quatre missions plus tard, « Viva Palestina numéro 5 » a quitté le Royaume-Uni pour Gaza.
Le convoi de « Viva Palestina numéro 5 » est arrivé dans Kayseri tard le 29 septembre et a passé la nuit sur une montagne donnant sur la ville. Nous étions venus à Kaseyri dans l’unique but de visiter la tombe de Furkan et d’offrir nos condoléances à sa famille.
Le matin suivant, il nous a été dit que notre convoi passerait par le lycée où Furkan avait reçu son diplôme, et que les étudiants de l’école nous attendraient. Alors que nous commencions lentement notre voyage, descendant la route de montagne, le convoi a pris l’allure d’une procession funéraire. Soudain, ils étaient là. Les étudiants s’étaient regroupés des deux côtés de la route, se tenant là qui sait depuis combien de temps. Chacun d’entre eux, tristement, silencieusement, tenait avec fierté une photo de Furkan pendant que passait le convoi.
De belles et émouvantes paroles ont été prononcées sur la tombe, puis nous avons rencontré le famille de Furkan au centre social récemment construit et qui porte son nom. Le père et l’oncle cachaient leur peine peut-être avec l’acceptation de la mort qui vient avec l’âge. Mais la peine du frère plus âgé était très visible. Des lignes profondes et foncées ont été marquées à l’eau-forte sous ses yeux, et il a semblé isolé du monde autour de lui. Le désespoir si évident sur son visage est bien plus expressif que tous les mots possibles.
N’importe quel pays devrait être fier d’avoir dans ses rangs un jeune homme tel que Furkan. Intelligent et mûr au delà de son âge, Furkan avait déjà voué sa vie à la lutte pour la justice en Palestine. Un tel fait n’a aucune importance aux yeux du congrès des Etats-Unis, qui autorise le financement de l’occupation. Et le tueur israélien qui a abattu Furkan n’est pas plus responsable de l’assassinat que le propre pays de Furkan qui a payé les balles.
* Ralph G. Loeffler milite avec le Centre International d’Action [International Action Center] à New-York.
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Traduction de l’anglais : C. Zurbach