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Je ne jurerai pas fidélité à Israël

mercredi 21 juillet 2010 - 06h:22

Akiva Eldar - Ha’aretz

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Le temps est venu pour nous tous, que nous soyons juifs, musulmans, ultraorthodoxes ou laïques, de promettre loyauté au seul état juif démocratique du monde. A une condition : il faut que la cérémonie de promesse ait lieu dans la cour du Tombeau des Patriarches après une visite du centre d’Hébron.

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Cortège de colons escorté par l’armée à Hébron, Cisjordanie occupée.




Pourquoi le gouvernement demande-t-il que seules les personnes sollicitant la nationalité israélienne déclarent leur loyauté à l’Etat juif et démocratique ? Je veux le faire aussi !

Le temps est venu pour nous tous, que nous soyons juifs, musulmans, ultraorthodoxes ou laïques, de promettre loyauté au seul Etat juif démocratique du monde. A une condition : il faut que la cérémonie de promesse ait lieu dans la cour du Tombeau des Patriarches après une visite du centre d’Hébron.

Chaque citoyen saura alors ce que le pays fait en son nom dans la cité des Patriarches. Chaque mère juive saura "où la seule démocratie du Moyen-Orient" envoie ses enfants. Ceux qui aiment ce qu’ils verront signeront la déclaration. Ceux qui ne trouveront pas à Hébron les preuves que les valeurs et les principes de la démocratie sont respectés, refuseront.

Avant de commencer la visite guidée du centre de Hébron, il faut se rafraîchir la mémoire : l’accord de Hébron qui a été signé en 1997 entre le gouvernement de Netanyahu et l’Autorité palestinienne divise Hébron en deux. D’un côté un espace arabe contrôlé par l’Autorité palestinienne (H1) et de l’autre un espace juif contrôlé par l’armée israélienne (H2). Dans la partie arabe vivent 120 000 Palestiniens et dans la partie juive, qui comprend la vieille ville et le centre commercial de la ville, il y a 500 Juifs et 30 000 Arabes. Afin de prévenir les conflits, Israël a imposé des règles draconiennes de séparation physique entre les deux populations et a réduit drastiquement la liberté de mouvement des Palestiniens dans la plus grande partie du territoire H2.

Un couple de chiens haletants nous accueillent à l’entrée de la rue Shuhada qui traverse le vieux quartier de Hébron qui mène à la Tombe des Patriarches. Les portes des magasins sont fermées et le marché est vide.

Quelqu’un a recouvert les graffitis racistes de visages souriants sur fond rose.

Une étude de la zone autour de la colonie juive menée par B’Tselem et l’Association pour les Droits civils en Israël à la fin de 2006, a révélé que 1 829 magasins palestiniens (plus de 75% de tout le commerce de la zone étudiée) ont été fermés ces dernières années et plus de 1 000 maisons (42%) ont été abandonnées.

Yéhuda Shaul, fondateur de "Briser les silence" dit que plus de 40% des résidents Palestiniens ont quitté la zone.

Des soldats désoeuvrés jettent un coup d’oeil nonchalant aux visiteurs et voyant qu’il s’agit "des leurs" ils s’éloignent (peut-être pour aller au cours de danse). L’IDF (l’armée israélienne - NdT) a assuré à la Haute Cour de Justice il y a deux ans, qu’il n’y avait plus de restrictions aux mouvements des Palestiniens, mais les Palestiniens n’osent pas s’approcher de cette zone.

Ils savent qu’à chaque coin de rue on leur demandera leurs papiers et qu’on les fouillera. Eran Efarti qui a servi au poste militaire de Abu Snuneh en 2007 dit que, entre autres instructions, ils recevaient l’ordre de faire en sorte que les habitants "se sentent persécutés".

Dans les données répertoriées par "Briser le silence" il y a des témoignages de soldats qui décrivent les moyens imaginés pour provoquer un tel sentiment. Par exemple faire un recensement de la population en plein milieu de la nuit (l’IDF appelle cela "cartographier") ou taper sur des marmites.

Un jeune homme maigre galope dans un champ sur un cheval blanc, les franges (du sous-vêtement religieux que portent les juifs NdT)) dépassant de sa chemise. Au pied de Beit Hadassah, Shaul met sa kippa noire (la kippa est obligatoire pour entrer dans un lieu de culte juif - NdT) et nous indique l’école de filles palestinienne.

Il dit qu’il a une vidéo dans son bureau qui montre comment les enfants juifs du quartier ont l’habitude de tuer l’ennui le Shabbat en jetant des pierres aux gamines de l’école.

Dans une allée qui mène au marché et qui a été fermée suite au massacre qui a eu lieu à la Tombe des Patriarches au début de 1994 (*) un groupe de jeunes juifs poussent une charrette chargée de matériel de construction. Derrière les portes barricadées des échoppes, sous le nez des soldats, ils construisent une nouvelle petite colonie.

A l’entré de la Tombe des Patriarches nous avons été arrêtés par six policiers des Frontières. Leur commandant, qui nous a été rapidement dépêché, nous a expliqué que nous n’avions pas pu entrer sur le site avec Yehuda Shaul parce que ce dernier appartient à un groupe "à caractère politique". L’officier nous a confirmé que deux ou trois jours plus tôt, Noam Arnon, le porte-parole de la communauté juive de Hébron qui représentait pour l’occasion le ministre des Affaires étrangères avait accompagné un groupe de visiteurs au Tombeau des Patriarches. Les colons de Hébron, comme chacun le sait, forment un groupe qui n’a aucun "caractère politique".

Les actions de l’Etat dans la cité où les Patriarches de la nation furent enterrés, à Shekh Jarrah, dans la vallée du Jourdain (où Israël expulse des Palestiniens - NdT) et dans la bande de Gaza, n’ont rien à voir avec le judaïsme ou la démocratie. Aussi longtemps que l’Etat juif démocratique montrera ce visage, je refuserai de m’engager à être loyal envers lui.


* Baruch Godstein a tué plusieurs dizaines de Palestiniens pendant une prière du Ramadan.


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Hébron, le 19 juillet 2010 - Pour consulter l’original : Ha’aretz - traduction : Dominique Muselet


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