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N’allez pas à la Cour suprême

jeudi 26 juillet 2007 - 06h:22

Gal Lévy - Haokets

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Le Parlement israélien a approuvé cette semaine en lecture préliminaire la proposition de loi autorisant le Fonds National Juif (KKL) à ne pas vendre de terres à des non-juifs. Le pouvoir législatif, à une majorité de 64 voix contre 14, a décidé de se vautrer dans la boue du racisme et d’ancrer dans la Loi un mécanisme discriminatoire dans l’allocation de terres.

Le Fonds National Juif, rappelons-le, ?uvre par le pouvoir d’une convention signée avec l’Etat d’Israël, après la proclamation de sa souveraineté, et qui retirait à ses citoyens le contrôle souverain sur les terres de l’Etat. Cette confiscation a été très concrète pour les citoyens arabes, tout en ayant une dimension symbolique pour les autres citoyens de l’Etat qui étaient censés jouir, dès la déclaration de souveraineté, des terres de l’Etat.

Mais l’Etat s’est caché derrière l’écran du « peuple juif » et a, en son nom, utilisé la convention comme dispositif pour « contourner la démocratie ». Ce dispositif a permis d’instaurer une politique inégalitaire fondée sur une discrimination nationale entre citoyens qui n’étaient souverains qu’en apparence, et de justifier une politique qui sapait les principes de la citoyenneté. La requête d’Adel Kaadan auprès de la Cour suprême a mis à nu cette vérité-là, tout en demandant qu’on renverse la situation.

Comme il a été dit, de diligents députés ont demandé, cette semaine, à rétablir le sionisme dans son ancienne splendeur et d’ancrer, sans la moindre fioriture, cette loi discriminatoire dans notre législation. Le Parlement (celui-là même qui a approuvé, il n’y a pas longtemps, l’amendement à la loi de citoyenneté) demande par là à pouvoir continuer à éroder la citoyenneté israélienne et à la plier au nationalisme sioniste. La liste de ceux qui ont soutenu cette loi est impressionnante, en particulier parce qu’elle rappelle et confirme que le principe démocratique a quasiment valeur de fiction au Parlement israélien, dans tout l’espace de l’échiquier politique.

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Vue de la cour suprême israélienne

Ce fait rappelle aussi ce que beaucoup sont enclins à oublier (voir par exemple l’éditorial de Haaretz : "A racist jewish state"), à savoir que la Cour suprême, avec tout le respect qui lui est dû, n’est pas précisément à la pointe de la révolution sociale démocratique. C’est pourquoi, même s’il y a une certaine probabilité que la loi ne dépasse pas le stade de la lecture préliminaire (mais nous ne serons pas réellement surpris si elle le dépasse), l’expérience nous enseigne que sous peu, la question parviendra à la Cour suprême. Mais peut-être cette fois pourrait-on demander qu’on se retienne. Autrement dit, ne pas se taire, mais ne pas se précipiter à la Cour suprême.


Ne courez pas à la Cour suprême :

— parce que la Cour suprême collabore à l’établissement des limitations de l’Etat juif, en conférant une légitimité démocratique à ces limitations.

— parce que les solutions ponctuelles que la Cour suprême recommande ne font pas progresser le débat de fond sur les limitations de la démocratie mais le restreignent.

— parce qu’au moins une fois, il vaut peut-être la peine de ne pas se sentir bons et justes par la grâce d’une Cour suprême qui nous aura sauvé de la honte.

— parce qu’au moins une fois, il vaut peut-être la peine de laisser le Parlement continuer à se vautrer dans sa propre boue raciste, sans donner à la Cour suprême l’occasion de le dégager de sa bêtise.

— parce qu’au moins une fois, il vaut peut-être la peine de laisser la réalité raciste nous frapper au visage et de ne pas nous abandonner à l’illusion que nous sommes purs et innocents. Vois, ô monde, quelle merveilleuse Cour suprême nous avons.

— parce que simplement, il est détestable que chaque question politique soit encore une affaire juridique qu’il faut clarifier, enfermer entre les murs d’un tribunal.

— parce qu’un combat politique au Parlement et en dehors du Parlement révélera la personnalité des tenants et des opposants, nous permettant de réexaminer les lignes de partage de la politique israélienne.

— parce que le moment est venu de l’action politique, le temps des actes et non des belles paroles juridiques et expertes, belles seulement sur le papier ou dans la boîte de courrier électronique de tel ou tel juge.


Sur le même sujet :

- Nouvelle loi discriminatoire approuvée par le parlement israélien
- Lettre ouverte aux députés israéliens
- Adel Kaadan à propos de la loi KKL : « C’est une décision retorse »

Gal Lévy - Haokets, le 21 juillet 2007
Traduit de l’hébreu par Michel Ghys


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