16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Israël est le poisson pilote du requin américain

mercredi 4 mars 2015 - 11h:00

Yvonne Ridley

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


Les prochaines heures devraient déterminer qui est vraiment en charge du projet sioniste - Israël ou son plus grand bienfaiteur, les États-Unis d’Amérique. C’est un débat qui a occupé beaucoup de monde, pour savoir où se situe vraiment le centre d’influence. Est-ce à Tel-Aviv ou est-ce à Washington ?

JPEG - 84.8 ko
Obama n’a guère d’autre choix que de supporter avec patience les vantardises de Netanyahu et de s’accommoder de son poids politique aux États-Unis

Voulant répondre à cette brûlante question, un de mes amis pro-Palestiniens a comparé Israël aux poissons pilotes, une créature carnivore qui traîne autour des requins, mangeant leurs parasites et leur nourriture en surplus. Le petit fouineur rayé donnait jadis aux marins l’impression qu’il guidait et pilotait le requin beaucoup plus grand, mais les aspects sont trompeurs. La réalité est que sans son hôte, le requin, nos petits poissons pilotes ne pourraient guère survivre.

Aujourd’hui, mardi, est un Jour J pour les relations spéciales entre l’Amérique et Israël, et la plupart des occupants de Capitol Hill spéculent sur les résultats de ce qui a été affiché comme le moment le plus explosif dans les relations déjà rugueuses entre Benjamin Netanyahu et Barak Obama. Les deux partagent une répugnance mutuelle depuis que le président des États-Unis a accédé à son poste, mais l’arrivée de Netanyahu à Washington lundi a tiré ces relations à un niveau encore plus bas.

L’objectif unique du chef israélien lors de cette visite, est d’inviter le Congrès des États-Unis à saboter un accord sur le nucléaire entre l’administration d’Obama et l’Iran. Craignant sa propre arrière-cour avant de voyager en jet aux États-Unis, il a dit aux journalistes : « Je me soucie profondément et sincèrement de la sécurité des citoyens d’Israël et du destin de l’État et de tous nos citoyens. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour assurer notre avenir. »

Des douzaines d’élus démocrate menacent de boycotter le discours de Netanyahu au Congrès aujourd’hui après que la Maison Blanche ait procédé à un tir de barrage ce lundi au rassemblement de l’AIPAC, le plus grand groupe de lobbyistes pro-Israël. Elle a invité Israël à accorder le bénéfice du doute aux entretiens internationaux, dont l’objectif est d’empêcher l’Iran de développer des armes nucléaires, plutôt que poursuivre ce que Susan Rice, conseiller de la sécurité nationale, a qualifié « d’intervention destructive ».

Faisant écho à ces sentiments depuis la Suisse, le Secrétaire d’Etat John Kerry, insiste sur le fait que la voie diplomatique adoptée par l’Administration avec l’Iran a droit « au bénéfice du doute » pendant que les négociateurs travaillent sur un accord nucléaire sur le long terme. Kerry, impliqué dans la négociation avec le ministre des affaires étrangères de l’Iran, a déjà averti que - alors que Netanyahu est le bienvenu pour s’exprimer aux États-Unis - la Maison Blanche ne veut pas que l’événement soit « transformé en un match de football politique ».

Il est également intéressant de noter que le camp d’Obama a indiqué qu’il n’enverrait aucun représentant au discours et que Netanyahu ne sera pas reçu à la Maison Blanche, ce qui est considéré comme une grande claque pour le chef israélien.

Clairement, il n’est pas le bienvenu pour plusieurs différentes raisons, mais peut-être la citation la plus colorée de tous les observateurs au cours des derniers jours est venue de Jamie Stern-Weiner.

Le co-fondateur du New Left Project a indiqué dans un article récent édité par Mondoweiss : « Le Premier ministre belliciste d’Israël est si désagréablement théâtral que même les alliés les plus loyaux d’Israël dans la communauté juive américaine l’invitent à changer de ton. Il est le genre de type qui non seulement se pointe chez vous sans y être invité, mais qui apporte ses vêtements sales, vide votre réfrigérateur, urine dans l’évier puis fulmine grossièrement pour se plaindre du mauvais service. »

Une autre observation, aussi acérée mais peut-être plus glaçante, est venue d’Alan Hart, le journaliste bien connu, auteur de Zionism : The Real Enemy of the Jews, qui estime que Netanyahu a des difficulté à dire la vérité. Pas parce qu’il est un menteur né, mais parce que s’il parlait sincèrement au sujet de ses intentions pour l’avenir de l’État sioniste, le soutien à Israël s’effondrerait.

Hart explique au sujet de Netanyahu que la vérité indiquerait qu’il « n’est en rien intéressé à la paix avec les Palestiniens, et que sa solution préférée est une purification ethnique finale de la Palestine, [ainsi] il doit proférer des mensonges. Mais pour conserver de la crédibilité face au viol par Israël du droit international et face à ses actions criminelles, ses mensonges doivent vraiment être énormes. Et comme Goebbels l’a conseillé, ils doivent être sans cesse répétés. »

Une conclusion évidente, poursuit Hart, « est que Netanyahu a toujours su que tout ce qu’il affirme au sujet d’Israël qui serait en danger d’annihilation et n’aurait pas de partenaire palestinien pour la paix, est absurde et pure propagande. »

Nous saurons dans les heures à venir si le discours de Netanyahu devant les deux Chambres du Congrès va changer les règles du jeu au Moyen-Orient. C’est dire combien les enjeux sont élevés. La plupart des électeurs israéliens observeront l’évènement en direct. Netanyahu dira au Congrès qu’il lutte pour l’existence même de l’État sioniste. En termes de propagande il jouera au politicien américain, sachant très bien que sa performance n’apportera rien en terme d’appui de la part des États-Unis, mais (et c’est le plus important) elle l’aidera pour les élections en Israël.

Sa présence même à Washington a été comparée à un crachat au visage d’Obama, mais ses défenseurs tourneront ceci en bataille entre David et Goliath devant les isoloirs.

C’est un fait que, en tant que chef d’Israël, Netanyahu dépend de l’Amérique pour l’existence de son État. Sans l’argent provenant des impôts des Américains, Israël n’aurait pas pu rester la quatrième armée au monde, ni conserver son arsenal nucléaire, entre autres avantages. Sans support politique et diplomatique de la Maison Blanche, Israël n’aurait pas pu continuer à persécuter les Palestiniens, à faire ses guerres à Gaza à intervalles réguliers et à continuer à implanter ses colonies juives tout en ignorant et violant les résolutions des Nations Unies et le droit international.

L’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) et d’autres lobbies juifs ont dépensé des millions de dollars au cours des années, achetant l’appui des deux principaux partis politiques aux États-Unis et transformant en suicide politique toute critique d’Israël. Le fait qu’environ trente élus démocrate aient fait savoir qu’ils boycotteraient le discours de Netanyahu, a produit une onde de choc dans les allées de Capitol Hill. Et Obama, qui veut que l’on se souvienne de lui comme de celui qui a conclu un accord avec l’Iran sous présidence qui sans cela restera plutôt terne, est très contrarié de voir Netanyahu s’introduire à Washington sans invitation dans le but de saboter son seul succès probable et notable en politique étrangère.

Ce jeu à quitte ou double avec le plus grand défenseur d’Israël pourrait coûter très cher à Netanyahu. Nous en verrons vite le résultat, et nous saurons qui est vraiment en charge du projet sioniste.

3 mars 2015 - Middle East Monitor - Vous pouvez consulter cet article à :
https://www.middleeastmonitor.com/a...
Traduction : Info-Palestine.eu


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.