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Tir groupé contre les bombes à sous-munitions
mercredi 28 février 2007 - Paul Vermeulen

Une conférence sur les armes à sous-munitions se tient jeudi 22 et vendredi 23 février à Oslo. Que vise-t-elle ?

La conférence d’Oslo, organisée à l’initiative de la Norvège, est la première réunion jamais consacrée spécifiquement à la question des sous-munitions. En soi, c’est positif. Mais il ne faut pas oublier que le problème des armes à sous-munitions a déjà été identifié en 1976. Une douzaine d’Etats s’étaient déjà prononcés sur les effets dévastateurs de ces armes en Asie du Sud-Est. C’est dans cette dynamique qu’a vu le jour la Convention de 1980 sur certaines armes classiques (CCW). Malheureusement, depuis 1976, les bombes à sous-munitions n’ont jamais été à l’ordre du jour de la CCW.

Qu’est-ce qui a poussé la Norvège à organiser un tel événement ?

Depuis 2001, la Norvège a lancé un processus parlementaire national consacré aux armes à sous-munitions. Conséquence : lors de la Conférence de la CCW, en novembre dernier à Genève, le gouvernement norvégien a annoncé qu’il voulait lancer un processus censé aboutir à une réglementation contraignante sur les armes à sous-munitions.

Quel est l’objectif minimal ?

Les initiateurs de cette conférence, à laquelle participent environ 40 Etats, aspirent à lancer un processus qui aboutisse un jour à des négociations pour réglementer plus sévèrement l’utilisation des bombes à sous-munitions. Ce n’est toutefois pas à Oslo que les participants vont exiger un traité. L’idée est vraiment de tenter de mettre en marche le même type de processus que celui qui a mené à l’adoption de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel.

La simple tenue de cette conférence indique-t-elle une nouvelle prise de conscience ?

La tenue de cette réunion est en soi un succès. Mais il ne faut pas trop s’emballer non plus. A Oslo, plusieurs pays, dont la France, la Grande-Bretagne, l’Italie et la Suisse sont intervenus pour ramener la question des armes à sous-munitions dans le cadre de la Conférence sur les armes classiques. Pourtant, cette CCW n’a jamais inscrit la thématique à l’ordre du jour et avec des pays producteurs de sous-munitions comme le Pakistan, la Chine ou la Russie, le consensus (ndlr : la règle au sein de la CCW) est impossible. Cette tentative risque au mieux de ralentir l’adoption d’une réglementation contraignante, au pire de tuer le processus d’Oslo. Ce n’est donc pas une démarche convaincante. Car malgré les évidences apportées par la société civile sur le caractère néfaste de ces armes, certains Etats continuent de ne penser qu’en termes d’intérêts militaires nationaux.

Pourquoi les bombes à sous-munitions sont-elles à bannir ?

Il suffit de voir ce qui s’est passé au Liban en été 2006. Les solutions techniques prônées par les Etats producteurs de sous-munitions n’ont donné aucun résultat. Il y a eu 40% de ratés. Le grand problème avec les armes à sous-munitions, c’est qu’elles sont dispersées sur de grandes surfaces sans viser individuellement des cibles militaires. Leur usage est indiscriminé.

Qui sont les principales victimes de ces armes ?

Les chiffres sont éloquents : 98% des victimes sont des civils. Même s’il y a beaucoup de ratés, les bombes à sous-munitions ne ratent jamais les civils.

Quel sera le suivi d’Oslo ?

Certains pays montrent clairement leur volonté de s’orienter vers une réglementation plus sévère. L’Autriche par exemple a annoncé un moratoire et propose d’organiser une conférence à Vienne cette année encore. Le Mexique et l’Irlande se sont également fortement engagés. En avril, le Comité international de la Croix-Rouge invitera à Genève des experts pour débattre du problème.

Et en Suisse, où en est-on ?

Il y a l’initiative parlementaire du Genevois John Dupraz qui sera débattue au Conseil national le 6 mars prochain. Celle-ci demande un débat sur la question et propose l’interdiction des sous-munitions. Mais une motion vient d’être déposée qui vient torpiller l’initiative de John Dupraz en prônant une solution « plus mesurée ».

23 février 07 -Tribune des droits humains - Genève - Propos recueillis par Stéphane Bussard.


Nouveau pas vers l’interdiction des bombes à sous-munitions

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Les bombes à sous-munitions sont un grand danger, principalement pour les enfants (Reuters)


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* Handicap International dénonce les bombes à sous-munitions

L’utilisation des bombes à sous-munitions doit être limitée. Tel est l’appel lancé vendredi par 46 pays, dont la Suisse, à l’issue d’une conférence de deux jours à Oslo.

La cheffe de la délégation helvétique considère comme un succès la reconnaissance de l’urgence et de la nécessité d’un traité international juridiquement contraignant en la matière.

Sur les 49 pays présents dans la capitale norvégienne, la Pologne, la Roumanie et le Japon n’ont pas approuvé la déclaration finale et non contraignante qui a mis un terme à la conférence.

Le texte prévoit « l’interdiction d’ici à 2008 d’utiliser, de produire, de transférer et de stocker les bombes à sous-munitions qui causent des dommages inacceptables aux civils ».

« La Suisse salue la déclaration finale qui est un pas dans la bonne direction puisqu’elle reconnaît la nécessité d’un un instrument légal international contraignant », a dit la cheffe de la délégation suisse à Oslo Christine Schraner Burgener.

Pour la vice-directrice de la division du droit international au Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), il est notamment positif que des Etats puissants dans ce domaine soutiennent le texte, à l’image de la Grande-Bretagne et du Canada.

Les discussions se sont cependant déroulées en l’absence des Etats-Unis, de la Russie et de la Chine, trois pays qui produisent ou utilisent ces munitions.

L’Australie, Israël, l’Inde et le Pakistan n’étaient pas non plus présents car ils estiment que ces débats doivent se tenir dans le cadre de la Convention de l’ONU sur les armes classiques.

Les bombes à sous-munitions

Les engins visés par la déclaration finale d’Oslo sont, par exemple, ceux qui contiennent trop de bombes non explosées, a expliqué Christine Schraner Burgener.

Lors des futures réunions, il restera encore à définir quelles sont les conséquences considérées comme inacceptables pour les civils. Les 49 Etats qui ont participé à la conférence d’Oslo entendent à nouveau se réunir en mai à Lima, en novembre à Vienne et début 2008 à Dublin.

Les bombes à sous-munitions explosent sous forme de plusieurs (jusqu’à 650) petites bombes qui provoquent de graves blessures.

En tant que bombes non explosées, celles-ci continuent de menacer la population bien après un conflit armé, à l’instar des mines. Ces armes ont été utilisées par Israël dans la récente guerre du Liban.

La Suisse dispose de près de 200’000 armes à sous-munitions. Elle est en faveur d’une réglementation internationale qui en interdise l’emploi dans des zones fortement habitées.

Berne veut en outre interdire complètement les sous-munitions peu fiables. La position suisse correspond à celle adoptée par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

La position helvétique critiquée

Pour Handicap international, cette attitude n’est pas assez ferme. La Suisse doit se joindre aux pays qui plaident un renoncement total aux bombes à sous-munitions, estime l’organisation. Il ne suffit pas d’éviter les sous-munitions « peu fiables » .

Pour les défenseurs des droits de l’homme et certains politiciens suisses, la position du pays est scandaleuse en particulier en regard de la tradition humanitaire helvétique.

« Les déclarations suisses sonnent vide au moment ou la Norvège et l’Autriche réclament un moratoire immédiat » affirme ainsi le député radical genevois John Dupraz, auteur d’une initiative parlementaire demandant l’interdiction de ce type d’armes.

Selon lui, « le problème principal en Suisse est que les militaires seraient frustrés d’être privés d’une telle arme ».

swissinfo et les agences