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Israël restreint les permis de travail pour les personnels des ONG
vendredi 22 janvier 2010 - Amira Hass
Ha’aretz
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Des gens attendent pour passer la "frontière" entre la Cisjordanie et Jérusalem-Est.
(Nir Kafri - Haaretz.com)

Le ministère de l’Intérieur a cessé d’accorder des permis de travail aux ressortissants étrangers qui travaillent dans la plupart des organisations non gouvernementales internationales sur les Territoires palestiniens, y compris à Jéusalem-Est, a appris Ha’aretz.

Révisant apparemment les règles en vigueur depuis 1967, le ministère n’accorde maintenant aux personnels des ONG que des visas touristiques, ce qui leur interdit de pouvoir y travailler.

Entre autres organisations touchées par ce qui semble être un changement de politique, on trouve Oxfam, Save the Children, Médecins sans frontières, Terre des Hommes, Handicap International et Religious Society of Friends (une organisation quaker).

Jusqu’à récemment, les salariés devaient s’inscrire au Département des relations internationales du ministère des Affaires sociales, lequel recommandait alors au ministère de l’Intérieur de leur remettre les permis de travail B1. Même si les ressortissants étrangers sont toujours tenus de faire la démarche auprès du ministère des Affaires sociales pour obtenir cette recommandation et avoir le visa touriste, le ministère de l’Intérieur cherche à mettre ces ONG internationales sous la responsabilité du ministère de la Défense et à les obliger aussi à se faire enregistrer auprès du coordinateur des activités du gouvernement dans les Territoires (COGAT) qui dépend du ministère de la Défense.

Les salariés étrangers des ONG ont cru qu’ils auraient un tampon ou une note manuscrite avec leur visa de touriste, et qu’ils pourraient donc travailler « dans l’Autorité palestinienne ». Israël refuse actuellement les visas de travail à la plupart des ressortissants étrangers qui manifestent leur volonté de travailler dans les Territoires palestiniens, tels les enseignants étrangers dans les universités palestiniennes et les hommes d’affaires.

Israël ne reconnaît pas le pouvoir de l’Autorité palestinienne sur Jérusalem-Est ni sur les zones C, ce qui représente 60% de la Cisjordanie. Les personnels des ONG en arrivent à penser que la nouvelle politique vise à les obliger à fermer leurs bureaux de Jérusalem et à se délocaliser dans les villes de Cisjordanie. Cette décision les empêcherait de travailler avec la population palestinienne de Jérusalem-Est , pourtant définie par la communauté internationale comme territoire occupé.

Les organisations craignent que la nouvelle politique n’entrave à l’avenir leur capacité à travailler dans les zones C, que ce soit parce qu’Israël ne les considère pas comme relevant de l’Autorité palestinienne, ou parce qu’elles feront l’objet par la suite des restrictions de circulation imposées aux Palestiniens. Parmi ces restrictions, il y a l’interdiction d’entrer à Jérusalem-Est et dans la bande de Gaza via Israël, sauf autorisations spécifiques et rarement obtenues ; et aussi l’interdiction de pénétrer dans les zones à l’ouest de la barrière de séparation, sauf pour les habitants des villages qui ont des permis de séjour spéciaux et pour les citoyens israéliens.

Un employé d’une ONG a indiqué à Ha’aretz que cette politique n’était pas sans rappeler les contraintes sur les voyages que les autorités birmanes avaient imposées aux organisations humanitaires, quoique présentées d’une manière plus subtile.

Des agents d’ONG ont également dit à Ha’aretz avoir été informés dès juillet 2009 par un responsable du COGAT qu’un changement de politique s’annonçait. Quand un certain nombre d’entre eux ont fait leur demande auprès du ministère de l’Intérieur en août, pour le renouvellement de leurs visas, ils ont constaté qu’elles avaient été soumises à une « commission spéciale ». On ne leur a pas dit qui constituait cette commission, et ils avaient dû se contenter d’un « récépissé » confirmant qu’ils avaient bien déposé leur demande. D’après les agents des ONG, le visa touristique qu’ils ont reçu différait du précédent quant à la durée et aux limitations au voyage, et ils en ont conclu que la politique n’était pas tout à fait étayée.

La dernière d’une série de mesures

Un certain nombre d’agents d’ONG qui se sont entretenus avec Ha’aretz ont exprimé de profondes inquiétudes devant le fait de dépendre de l’autorité du ministère de la Défense. Ces organisations relèvent du code moral de la Croix-Rouge et, par conséquent, ils considèrent leur dépendance directe du ministère en charge de l’occupation comme problématique et contradictoire avec l’essence même de leur tâche.

Entre 140 et 150 ONG opèrent parmi la population palestinienne. Ha’aretz n’a pu obtenir le nombre exact des ressortissants étrangers qu’elles emploient.

Les nouvelles limitations ne s’appliquent pas aux douze organisations déjà en activité en Cisjordanie avant 1967. Ces groupes, dans lesquels on trouve la Croix-Rouge et plusieurs organisations chrétiennes, ont été enregistrés par les autorités jordaniennes.

La nouvelle décision du ministère de l’Intérieur est la plus récente de toute une série de mesures prises au cours de ces dernières années visant à limiter les déplacements des étrangers en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, y compris des Palestiniens qui ont de la famille et des biens dans les territoires occupés. La plupart de ceux qui ont été touchés sont des nationaux de pays avec lesquels Israël entretient des relations diplomatiques, particulièrement des Etats occidentaux. Israël n’impose aucune de ces contraintes aux citoyens de ces mêmes pays qui voyagent à l’intérieur d’Israël et dans les colonies de Cisjordanie.

Le ministère de l’Intérieur indique dans un communiqué que la seule autorité compétente pour donner un accord au séjour de citoyens étrangers dans l’Autorité palestinienne est le coordinateur des activités du gouvernement dans les territoires. « Le ministère de l’Intérieur a en charge l’octroi des visas et des permis de travail au sein de l’Etat d’Israël. Les séjours qui touchent à la fois aux frontières d’Israël et à l’Autorité palestinienne doivent obtenir des permis en conséquence, » indique le ministère.

« Récemment, une question s’est posée sur la question des visas délivrés à ceux qui séjournaient dans l’Autorité palestinienne et en Israël, quand il est apparu qu’ils passaient le plus clair de leur temps dans l’Autorité palestinienne alors qu’ils possédaient un permis de travail israélien, » poursuit le communiqué. «  La question est soumise actuellement à une discussion serrée, avec la participation active des autorités militaires compétentes, afin de trouver la solution juste et appropriée dès que possible ».


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20 janvier 2010 - Ha’aretz - traduction : JPP