Fermer la page
www.info-palestine.net
Territoires occupés : fouiller les ordures pour survivre
lundi 1er octobre 2007 - IRIN

Psagot, Cisjordanie (IRIN) - Pour certains habitants de Cisjordanie, les ordures sont devenues non seulement un moyen de subsistance mais également la seule méthode qu’ils connaissent pour survivre. Des douzaines de Palestiniens dans tout le territoire (y compris des enfants) travaillent dans des sites d’enfouissements en essayant de gagner une maigre subsistance.

JPEG - 31.6 ko
Des Palestiniens fouillent les tas d’ordures à la recherche de tout ce qui peut être récupéré et revendu... Photo : Shabtai Gold/IRIN

« C’est un travail très dur. Mes mains sont toutes coupées. Ca sent mauvais. Que puis-je faire ? Il n’y a pas de travail à Ramallah » dit Mohammad originaire d’Al-Bireh, une ville voisine.

Agé de 43 ans, il a travaillé ces 30dernières années (sauf lors d’une période en prison) dans le site d’enfouissement de Psagot, triant les ordures à la recherche de ferraille.

Mohammad comme une autre quarantaine de travailleurs (dont une vingtaine d’enfants) n’est pas officiellement employé par quelqu’un mais il vend ce qu’il peut à des marchands qu’il connaît.

Un autre homme, Akram, âgé de 32 ans, conduit le tracteur qui emmène la ferraille aux marchands. Lui, comme les autres, travaille sur le site de l’aube à la tombée de la nuit.

« J’étais auparavant une conducteur de tracteur régulier. Mais j’ai perdu mon boulot. Ceci est le seul travail que j’ai réussi à trouver, travailler avec les ordures » raconte-t-il à IRIN en mettant en marche son engin pour emporter un ventilateur industriel et les restes de poutres provenant d’un projet de construction.

Travail des enfants, et analphabétisme

Deux enfants, contents, avaient trouvé le ventilateur qui était juste arrivé dans un camion de décharge d’ordures et l’ont trainé jusqu’à Akram.

« Aucun des enfants ici ne sait écrire ni lire. Ils n’ont jamais été à l’école » dit Mohammad.

Shadi, qui a d’abord prétendu qu’il avait 16 ans puis qu’il n’avait que 12 ans, est devenu furieux en entendant Mohammad.

« Je peux écrire » cria-t-il, en commençant à esquisser son nom dans le sable en arabe. Mais il devient rapidement évident que c’était là le seul mot qu’il connaissait et dont il ne pouvait pas reconnaître chaque caractère séparément. Les autres enfants n’ont même pas essayé.

JPEG - 40.6 ko
Un enfant rassemble pièces de métal, restes en plastique, bois... Photo : Shabtai Gold/IRIN

A la question pourquoi il n’allait pas à l’école, Shadi a répondu : »Mon père est malade. J’ai une grande famille et quelqu’un doit les entretenir J’ai quitté l’école au bout d’un an pour travailler ici ».

Questions légales

Le site de Psagot dérive son nom de la colonie israélienne proche dans la périphérie de Ramallah. L’enfouissement est principalement utilisé par les camions israéliens qui apportent les déchets des colonies et des villes à l’intérieur d’Israël.

« Il y a beaucoup plus d’ordures en provenance d’Israël que de la Palestine. Beaucoup, beaucoup plus » dit Mohammad.

Menaces pour la santé

Les vautours volent dans le ciel, attendant de saisir tout ce que les travailleurs délaissent.

En été, la chaleur cuit les ordures, envoyant une odeur pestilentielle dans l’air, odeur qui colle aux travailleurs. Alors que certains ont une famille, d’autres se rendent compte que leur type de travail ne va pas aider dans leurs vies privées.

« Je ne pense pas que je me marierai » dit Ahmed (20 ans) Il dit que l’odeur ne s’efface jamais.

En hiver,, les hommes doivent combattre le froid, la pluie, le vent et le gel pour continuer à travailler. C’est particulièrement difficile étant donné que les métaux qu’ils ramassent deviennent très froids. Certains de ces hommes vivent dans des cabanes sur le site même étant donné qu’ils n’ont nul autre endroit où aller.

Mais en plus des éléments, les travailleurs doivent faire face à d’autres dangers.

« Les enfants souffrent énormément » dit Ahmed Qunnam, , expert en santé publique et médecin volontaire avec le Croissant Rouge. « Psychologiquement, ils n’ont aucun système social normal. De plus ils ne mangent pas correctement et ne se développent pas comme il faut. Ils travaillent toute la journée, abusant de leurs forces. De plus, les sites sont extrêmement insalubres ».

Sur le site de Psagot par exemple, les travailleurs ont trouvé une boite de conserve d’olives. Ils l’ont immédiatement ouvert et l’ont dévoré malgré le fait que la date d’expiration était depuis longtemps dépassée et que les mains utilisées pour manger étaient les mêmes que celles utilisées pour fouiller les ordures.

« Tout cela ruine leur futur dans la vie. Ils sont en train de perdre leur enfance » dit Qunnam. « Cela leur est facile de tomber dans la drogue ».

Les travailleurs font face aussi aux menaces venant de l’utilisation de drogues par d’autres personnes. En fouillant les ordures, on trouve parfois des seringues. « Ils risquent d’être infectés par le HIV ou l’hépatite » dit Qunnam.

Il estime que l’Autorité Palestinienne doit faire plus pour les enfants mais il dit que cela leur est difficile de contrôler la Zone A (où se trouvent les sites) qui reste sous le contrôle de sécurité d’Israël selon les accords d’Oslo.

Ibrahim Atieh du ministère de la santé palestinien, dit que le nombre d’enfants travaillant dans les sites d’enfouissement est proportionnellement moindre que dans les pays voisins. « Mais c’est une question difficile et douloureuse. Qui sait quelles maladies ils risquent d’attraper » dit-il à IRIN.

« L’Autorité Palestinienne n’a pas actuellement de programme pour mettre fin à ce phénomène, mais peut-être dans le futur ? » ajoute-t-il.

Sur le même thème :

- Palestine sous occupation : la faiblesse de l’économie a un impact humanitaire direct
- L’environnement sacrifié
- Terre Sainte ou enfer sur terre ? Ecocide en Palestine

30 septembre 2007 - IRIN - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.irinnews.org/Report.aspx...
Traduction : Ana Cléja