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Pourquoi le dictateur égyptien hait les Palestiniens
mercredi 27 mai 2015 - Saleh al-Naami
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Le bilan d’al-Sisi (à d.), c’est la corruption érigée en système, plus de 40 000 prisonniers politiques, des centaines de condamnations à mort et la torture généralisée. De quoi impressionner notre petit fantoche national ... Photo : AFP

Il est aussi conscient que sa décision de l’impliquer dans l’affaire de l’assaut contre les prisons égyptiennes et la sentence de mort émise contre lui sont une farce, mais encore l’occasion de renouveler la désolation et la tristesse qui ont envahi « Oum al-Dunya » [ou « Mère du Monde », surnom donné à l’Égypte, NDT] depuis qu’il a usurpé le pouvoir.

Al-Sissi a décidé, et ce depuis longtemps, de ne pas tenir compte de la prise de conscience de ses concitoyens et d’ignorer l’opinion publique aussi bien en Égypte que dans le monde arabe ; dans le but de satisfaire ceux qui pourraient l’aider à consolider les bases de son régime. La sentence de mort contre Hassan Salameh est ainsi un message aux dirigeants de Tel-Aviv affirmant que leur appui à son égard n’est pas vain et qu’il continue à pourvoir à leurs demandes.

Hassan Salameh est devenu une légende vivante après avoir, dans les années 90 alors qu’il avait la vingtaine, réussi à faire éclater le système de sécurité israélien, après s’être introduit en Cisjordanie depuis Gaza ; il y a établi des unités militaires qui ont transformé la vie des colons de la région en un enfer. C’est encore lui qui a planifié et supervisé les opérations de représailles suite à l’assassinat du dirigent Yahya Ayyash début 1996, tuant des dizaines de soldats et de colons israéliens et en blessant des centaines.

Sans précédent, les opérations qu’il a menées ont porté atteinte au sentiment de sécurité personnelle chez les sionistes et a exacerbé la crise de confiance entre le gouvernement de Tel-Aviv et l’opinion publique sioniste ; allant jusqu’à causer la chute du gouvernement Shimon Peres lors des élections ayant eu lieu durant cette année.

Dan Gillerman, ancien patron de l’Union des Travailleurs Israéliens [Histadrout, NDT] a déclaré qu’Hassan Salameh avait empêché plus que tout autre l’arrivée des investisseurs étrangers. Les statistiques de l’époque ont également indiqué que ses opérations avaient causé un flux migratoire inverse.

Lors de ses 48 condamnations à perpétuité, le juge militaire sioniste a déclaré que l’hostilité contenue dans le cœur d’Hassan Salameh envers le projet sioniste, qui l’a conduit à s’y attaquer, était inimaginable.

Al-Sisi et sa grotesque sentence contre Hassan Salameh, les autres responsables des Brigades al-Quassam mais aussi contre la plupart des victimes de la prise d’assaut des prisons égyptiennes, ont pour but de rassurer Tel-Aviv sur son bon investissement concernant son appui au président égyptien. C’est ainsi que de nombreux milieux israéliens expliquent l’hostilité d’Al-Sisi envers le Hamas.

Selon l’orientaliste sioniste Reuven Berko, Al-Sisi montre son hostilité envers le Hamas afin d’affirmer à Israël et aux occidentaux qu’ils peuvent compter sur lui pour faire face au « terrorisme islamique » (Israel HaYom, le 27 Juin 2014). Cependant, même les commentateurs sionistes les plus enthousiastes vis a vis le gouvernement Al-Sissi affirment que ses accusations portées contre le Hamas ne reflètent pas la réalité.

Al-Sisi a choisi cette position contre Hassan Salameh et les autres car il sait qu’ils représentent sa négation. Il n’a pas besoin d’une telle farce pour convaincre les dirigeants sionistes et les dirigeants de Tel-Aviv des bénéfices qu’ils tirent en misant sur lui.

A-t-on besoin de rappeler le message de la diplomate sioniste Ruth Landau à Al-Sisi, publié par le Yedioth Ahranoth, le 13 Octobre 2013 sous le titre « Marche Al-Sisi et le peuple israélien marchera derrière toi » ?

Landau y exprimait son émerveillement devant « le pas pris par Al-Sisi pour le service du peuple israélien » et souligne que les plus importantes contributions d’Al-Sisi pour le soutien de la sécurité nationale israélienne reste son rôle qu’il joue en assiégeant la résistance palestinienne.

Tout observateur du conflit interne israélien peut discerner que la droite sioniste la plus raciste soutient avec le plus grand enthousiasme le régime Al-Sisi. Il existe une très longue liste de ces soutiens enthousiastes dont la délirante ministre de la culture (Likud) Miri Regev qui mène ses campagnes pour la profanation de la mosquée Al-Aqsa.

Ce qui renforce le sentiment sioniste quant aux réalisations obtenues suite au coup d’État en Égypte est qu’Al-Sisi, à l’inverse de Hosni Moubarak, n’hésite pas à reconnaître que sa politique sécuritaire a pour but de servir Israël, également.

Al-Sisi a assuré, plus d’une fois, que le déploiement des forces égyptiennes dans le Sinaï a aussi pour but d’améliorer la situation sécuritaire israélienne. Ce qui a conduit le commentateur sioniste Amir Tefon, qui a mené une série d’enquêtes portant sur les relations israélo-égyptiennes, à conclure que l’ère Al-Sisi représente l’âge d’or de ces relations.

Il est à noter que l’attention sioniste officielle pour Al-Sisi a atteint une telle ardeur que les élites dirigeantes de Tel-Aviv évitent de reconnaître toute proche relation entre lui et Netanyahu, de peur de gêner le régime du Caire. Lorsque le président égyptien a finalement reconnu, lors de l’interview donnée au Washington Post, qu’il discutait « beaucoup » avec Netanyahu, le bureau de ce dernier a refusé tout commentaire.

Et lorsque Ayelet Shahar, la correspondante politique pour la radio de l’armée israélienne, a cité des sources du bureau de Netanyahu confirmant qu’Al-Sisi lui avait offert d’établir un État palestinien au nord du Sinaï et qu’il n’avait pas besoin de vider les colonies juives de Cisjordanie, le bureau a vite fait de nier cette histoire confirmée pourtant par le ministre Naftali Bennett, membre du cabinet chargé de la sécurité.

Cependant, quelques israéliens, pas très nombreux, mettent en garde contre les dangers de l’enthousiasme d’Al-Sisi pour les aider dans leur guerre contre la résistance palestinienne. Ils considèrent que le comportement d’Al-Sisi mène vers des résultats contre-productifs. A titre d’exemple, le commentateur militaire Amir Aron juge que la position d’Al-Sisi, durant l’agression israélienne l’été dernier contre la Bande de Gaza, leur a été néfaste.

La raison est que la haine du président égyptien pour le mouvement Hamas l’a poussé à retarder la fin de la guerre, ce qui a conduit à sa prolongation portant ainsi atteinte aux israéliens (Haaretz, 3 Février 2015).

Pour résumer, Al-Sisi prend position contre Hassan Salameh et les autres car il sait qu’ils représentent tout le contraire de lui-même.

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* Saleh al-Naami est un réfugié palestinien qui vit dans le camp d’al-Maghazi dans le centre de la Cisjordanie. Il est titulaire d’une maîtrise en études politiques à l’Université de Jérusalem, et il prépare actuellement un doctorat. Son site : http://www.naamy.net/

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mai 2015 - Al-Araby al-Jadeed - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.alaraby.co.uk/opinion/20...
Traduction de l’arabe : Info-Palestine.eu - Lalla Fadhma N’Soumer