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La Palestine verra-t-elle une réelle solidarité en 2014 ?
dimanche 29 décembre 2013 - Rami Almeghari
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Des Palestiniens brandissent leur drapeau pendant une manifestation contre le blocus de Gaza, près du camp de réfugiés de Maghazi le 26 septembre 2010 (Photo Ashraf Amra)

L’an dernier j’ai participé à une émission télévisée de Russia Today (RT) sur la demande de statut d’état de l’Autorité Palestinienne aux Nations Unies.

Au cours de ce programme, Raanan Gissin – conseiller d’Ariel Sharon quand il était Premier Ministre – recommanda que les Palestiniens construisent leur propre nation plutôt que de se tourner vers d’autres pays "comme l’Iran" pour être aidés.

Je me suis rappelé ce débat quand j’ai appris que 2014 a été baptisée par l’ONU « Année Internationale de Solidarité avec le Peuple Palestinien ».

Vivant à Gaza, je ne suis pas censé connaître tout ce qui se passe à Jérusalem-Est ni en Cisjordanie sous occupation. Je ne puis donc pas évaluer quel progrès y a été fait pour la construction d’un état palestinien. Mais j’ai entendu qu’Israël continue de voler des terres palestiniennes en étendant ses colonies.

Je suis né et j’ai grandi dans le camp de réfugiés de Maghazi ici à Gaza. Dans mon enfance, les maisons des camps de réfugiés étaient très modestes, la plupart avaient des toits en panneaux d’amiante. Les routes étaient étroites et généralement non pavées.

Ma propre maison, située au centre du camp, est restée inchangée jusqu’en 1991, quand une partie de la maison a été rebâtie avec du ciment et de l’acier. Ce fut un moment heureux pour moi et ma famille.

La population de Maghazi avait crû régulièrement au fil des ans et elle est maintenant de 35.000 habitants, avec les réfugiés et les autres habitants de l’endroit. Et pourtant la fourniture d’électricité du camp est toujours identique depuis trois décennies. Il en va de même de bien d’autres endroits à Gaza.

C’est seulement récemment que la rue d’accès principale au camp a été refaite et a bénéficié d’un éclairage public. Et cela grâce à un don du Qatar, qui voulait « se faire remarquer ».

J’avais 13 ans quand la première intifada a éclaté en 1987. Malgré les troubles, j’étais déterminé à ce que notre maison reste présentable. Un jour que je nettoyais la porte d’entrée, Ibrahim, un voisin âgé de 20 ans, s’approcha de moi.

"Le monde doit savoir que nous sommes une nation »

Il dit que je voulais sans doute « me faire remarquer » d’un représentant du secrétaire général de l’ONU, dont la visite était annoncée. J’ai répondu : « Oui. Pourquoi pas ? Le monde doit savoir que nous sommes une nation ».

J’y crois toujours aujourd’hui. Aussi, en repensant aux paroles de Raanan Gissin, je me dis que nous, Palestiniens, nous avons des racines historiques profondes. Nous sommes déterminés à construire notre nation. Fichez-nous la paix.

Le meilleur conseil que pourrait donner Gissin c’est qu’Israël nous fiche la paix, qu’il lève le blocus qu’il a imposé à Gaza et cesse de construire des colonies en Cisjordanie.

La vérité, c’est qu’on nous a empêchés de construire une nation. En 1993, à Gaza et en Cisjordanie, les Palestiniens ont repris le contrôle de leurs propres affaires municipales, pour la première fois depuis 1948, grâce à un accord entre Israël et l’OLP. Ce fut considéré comme une réussite remarquable pour les Palestiniens.

A Gaza, l’Autorité Palestinienne a établi un aéroport international et lancé les travaux d’aménagement d’un port de mer. Israël s’est mis à détruire nos infrastructures après la deuxième intifada de 2000. Il y a douze ans, l’aéroport a été réduit en ruines par les blindés et les bulldozers israéliens.

En 2004, une centrale électrique fut inaugurée à Gaza. Mais en 2006 elle a été bombardée par les avions de guerre israéliens. Les dégâts ont perduré. La crise de l’énergie que nous subissons aujourd’hui signifie que j’écris cet article grâce à l’électricité stockée dans une batterie.

L’ONU ne nous a fourni qu’une aide limitée pour construire notre nation. Sa principale activité ici consiste à distribuer l’aide alimentaire, à construire et à réparer des écoles et des cliniques, ainsi que les maisons de réfugiés paupérisés.

Ce n’est que récemment que l’Agence onusienne pour les réfugiés palestiniens a annoncé qu’elle allait développer une petite clinique pour Maghazi. Cette extension se fait attendre depuis longtemps.

Chaque année depuis 1948, l’ONU a marqué le 29 novembre comme la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien. A présent, nous allons avoir toute une année de solidarité.

La solidarité sera-t-elle réelle ? Ou aurons-nous encore des paroles et pas d’actions réelles ?

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* Rami Almeghari est journaliste de la presse (écrite, en ligne et radio) et conférencier universitaire dans la bande de Gaza. C’est aussi un ancien traducteur d’anglais et rédacteur en chef du Centre de Presse Internationale du Service d’Information Palestinien basé à Gaza. Son courriel : rami_almeghari@hotmail.com.

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23 décembre 2013 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à
http://electronicintifada.net/conte...
Traduction : Info-Palestine.eu - Marie Meert