Le voyage du président américain à partir d’aujourd’hui pourrait être historique - c’est le premier de sa présidence en Israël et dans les territoires palestiniens - mais il a été fait tout son possible pour qu’on en attende pas grand-chose.
Le week-end, les dirigeants arabo-américains ont révélé que M. Obama avait clairement fait savoir qu’il ne présenterait pas de plan de paix, car Israël avat fait savoir qu’il n’était en rien intéressé par un accord avec les Palestiniens.
Les derniers doutes sur les intentions d’Israël ont été levés par l’annonce du nouveau cabinet, qui à la hâte a prêté serment avant la visite du président. Ce gouvernement ferait presque passer pour modéré le dernier conduit par Benjamin Netanyahu, alors qu’il était déjà considéré comme le cabinet le plus extrémiste de l’histoire d’Israël.
Ynet, le site Web d’Israël d’informations, a indiqué que les dirigeants des colons ont salué ce cabinet dont « ils n’osaient pas rêver ».
Zahava Gal-On, chef du parti d’opposition du Meretz, a abondé dans le même sens, en observant qu’il « ferait beaucoup pour les colons et très peu pour le reste de la société israélienne ».
Le parti dévoué aux colons, Le foyer juif, a reçu trois ministères clés - le commerce et l’industrie, Jérusalem, et le logement - ainsi que le contrôle de la commission parlementaire des finances, qui fera en sorte que les colonies se développent au cours du mandat de ce gouvernement.
Il n’y a aucune chanceq que Le foyer juif soit d’accord pour un gel de la colonisation semblable à celui qu’Obama avait voulu lors de son premier mandat. Au contraire, ce parti va accélérer à la fois la construction de logements et le développement industriel au-delà de la Ligne verte, pour rendre les colonies encore plus attirantes pour s’y installer.
Uzi Landau, du parti d’extrême droite d’Avigdor Lieberman, Yisraeli Beiteinu, a le portefeuille du tourisme et sera bien placé pour diriger des fonds vers la Cisjordanie et de nombreux sites bibliques, afin d’encourager les Israéliens et les touristes à s’y rendre.
Le nouveau ministre de la Défense, qui supervise l’occupation et serait le seul officiel en poste à pouvoir entraver de déferlement colonial, est Moshé Yaalon du Likoud, ancien chef d’état-major et connu pour son soutien fanatique aux colons.
Certes, Yair Lapid du grande parti « centriste » Yesh Atid est représenté aussi. Mais son influence sur la diplomatie sera mise en sourdine, parce que ses ministres se chargeront de cinq domaines essentiellement domestiques, tels que la santé et la science.
Une nouveauté, c’est Shai Piron, le ministre de l’éducation nouvelle, qui est un colon et un rabbin, et dont peut attendre qu’il généralise les voyages scolaires dans les colonies, poursuivant les efforts fructueux des colons pour s’intégrer dans le courant dominant.
Loin de se préparer à faire des concessions à l’occasion de la visite du président américain, Netanyahu a déclaré son soutien au plan du Foyer juif pour annexer des parties importantes de la Cisjordanie.
Le seul ministre qui affiche quelque intérêts pour des négociations, et qui est principalement motivée par le souhait de rester en bons termes avec la Maison Blanche, est Tzipi Livni. Elle est bien consciente que les possibilités de négociations sont extrêmement limitées : le processus de paix a été mentionné une seule fois, et de façon tout à fait secondaire, dans l’accord de coalition.
Obama, apparemment tout à fait conscient qu’il est confronté à un gouvernement israélien encore plus intransigeant que le dernier, a choisi de ne pas s’adresser à la Knesset. Au lieu de cela, il fera son discours à un auditoire plus réceptif d’étudiants israéliens, dans ce que les responsables américains ont appelé une « offensive de charme ».
On peut s’attendre à de grands mots, à de vagues promesses et à une inaction face à l’occupation.
Pour prouver à quel point la Maison Blanche est réticente à l’idée de s’attaquer à la question des colonies, ses représentants aux Nations Unies ont refusé lundi de prendre part à un débat au Conseil des droits de l’homme, qui qualifie les colonies comme une forme d« d’annexion rampante » de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est.
Obama se veut non interventionniste pour des raisons purement internes. Un sondage d’ABC-TV a montré cette semaine que la plupart des Américains soutiennent Israël contre les Palestiniens - 55% contre 9%. Une majorité encore plus grande, de 70%t, estime que les États-Unis devrait laisser les deux parties régler leurs litiges eux-mêmes.
Les Israéliens ordinaires, le public ciblé par le président américain, a une opinion qui ne vaut guère mieux. Selon une récente enquête, 53% pensent qu’Obama ne protège pas les intérêts d’Israël, et 80% croient qu’il n’apportera pas de progrès avec les Palestiniens au cours des quatre prochaines années. L’ambiance est plus à l’indifférence qu’à l’attente.
Toutes ces raisons font que ni Obama ni Netanyahu ne parleront trop de la question palestinienne au cours de la visite de trois jours. Comme l’analyste Daniel Levy l’a observé : « Obama vient d’abord faire des déclarations sur les liens américano-israéliens, et non sur l’occupation ».
C’est aussi à quoi s’apparente l’opinion des Palestiniens, qui sont de plus en plus exaspérés par l’obstruction américaine. Les responsables américains qui se sont rendus à Bethléem pour préparer la visite d’Obama vendredi se sont retrouvés pris dans des manifestations anti-Obama. On s’attend à d’autres manifestations aujourd’hui à Ramallah.
D’autres Palestiniens ont protesté contre sa visite en établissant aujourd’hui une nouvelle communauté de tentes près de Jérusalem, sur des terres palestiniennes occupées . Plusieurs campements précédents ont déjà été démolis à la hâte par les soldats israéliens.
Les organisateurs espèrent mettre en évidence l’hypocrisie américaine qui revient à soutenir l’occupation par Israël : les colons juifs sont autorisés à construire avec le soutien officiel de l’État sur les territoires palestiniens, en complète violation du droit international, alors que les Palestiniens se voient empêchés de développer leurs propres terres dans ce qui est maintenant considéré par la plupart des pays comme l’État palestinien
.
Le message implicite de la visite d’Obama, c’est que le gouvernement Netanyahu est libre de faire ce qu’il veut, avec peu de danger de rien de plus qu’une protestation symbolique de Washington.
Le nouveau cabinet israélien n’a pas perdu pas de temps pour dévoiler ses priorités législatives. Le premier projet de loi annoncé est une « loi fondamentale » pour changer la définition officielle de l’État, de sorte que ses aspects « juifs » éclipsent les aspects « démocratiques », une initiative que le journal Haaretz a qualifié de « folle ».
Parmi les principales dispositions se trouve la volonté limiter les financement public aux nouvelles communautés exclusivement juives. Cela met en évidence une solution cynique de Netanyahu pour apaiser le mouvement de protestation sociale qui mijote à Tel-Aviv, et dont une des exigences est avant tout davantage de logements à des prix abordables.
En mettant à disposition encore plus de terrains à bas prix [volés aux Palestiniens] en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, il peut agrandir les colonies, ronger encore plus le territoire palestinien, faire taire les protestations et prendre à contre-pied l’opposition. Tout ce qui lui manquait, c’était la bénédiction de Barack Obama.
* Jonathan Cook a remporté le Prix Spécial de journalisme Martha Gellhorn. Ses derniers livres sont “Israel and the Clash of Civilisations : Iraq, Iran and the to Remake the Middle East” (Pluto Press) et “Disappearing Palestine : Israel’s Experiments in Human Despair” (Zed Books). Voici l’adresse de son site : http://www.jkcook.net.
Du même auteur :
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25 février 2013 - Palestine Chronicle - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.jonathan-cook.net/2013-0...
Traduction : Info-Palestine.eu - Claude Zurbach