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jeudi 26 juillet 2012 - PCHR Gaza
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Mahmoud Sarsak chez lui à Rafah au moment de l’interview

L’arrestation de Mahmoud remonte au 22 juillet 2009, alors qu’il était en route pour prendre part à un match de football en Cisjordanie via le passage frontalier d’Erez. Il raconte : « J’avais mon autorisation de passage. Une fois arrivés au poste, les autres footballeurs et moi avions été interpellés pour un interrogatoire. Mes coéquipiers ont pu passer la frontière tandis que je suis resté, soumis à un questionnaire sans interruption de 10h jusqu’au lendemain, à 1h. Ensuite, une jeep militaire m’a conduit vers la prison d’Ashilon. Pendant tout le trajet qui a duré 45 minutes, les soldats n’avaient pas arrêté de me frapper à coups de crosse. Sur place, j’ai été questionné pendant 18 jours, sans arrêt, et les mains tout le temps menottées. Après, j’ai été transféré ailleurs pour une période de 6 jours. »

Le footballeur, qui avait 21 ans à l’époque de son arrestation, affirme avoir vécu une épreuve physique et psychologique particulièrement traumatisantes : « Je ne savais même pas pourquoi j’avais été détenu. Jour après jour, mon état psychologique se détériorait. Selon eux, je devais partir en Cisjordanie pour planifier des attentats contre Israël. J’ai rejeté cette accusation et je répétais à chaque fois que je n’étais qu’un joueur de football, et à chaque fois ils répondaient qu’ils savaient quel genre de football je joue. Au terme de l’interrogatoire, on m’a placé en isolement pendant 35 jours, suivis de 35 autres jours pour l’enquête, suite à quoi, j’ai été transféré à la prison de Néguev en Israël. »

En prison, Sarsak et d’autres prisonniers ont vécu les pires des cauchemars. Ils étaient soumis à des conditions et traitements inhumains et cruels : « En prison, nous n’avions aucun droit et manquions terriblement de soins médicaux et n’avions pas accès à l’éducation. Nous n’avions même pas le droit aux visites des proches et de la famille. Aussi, ils nous appelaient par des numéros et non pas par nos propres noms. Mon dernier numéro, je me souviens, était le 74. Il leur arrivait même de tirer sur les prisonniers et de les blesser. Ces actes inhumains ne parviennent pas seulement des geôliers, mais également des médecins, de l’administration et de quelques unités des forces de sécurité israéliennes. En ce qui me concerne, j’ai plusieurs fois été battu et avais été menacé d’isolement cellulaire si jamais j’osais déposer plainte. »

Entre-temps, Sarsak a été classifié combattant illégal. Toutefois, il n’y a eu aucun dossier judiciaire ni accusation portés contre lui. Ses audiences se tenaient tous les six mois à Jérusalem à l’effet d’examiner son statut de détention administrative : « Lors de l’une des audiences, les soldats m’avaient très bien traité, mais dès qu’ils ont appris que j’étais de Gaza, ils m’ont fait descendre dans une chambre sans caméras où j’ai été battu à coups de matraques et de crosses. Ma période de détention se poursuivait bien qu’il n’y ait eu aucun dossier judiciaire contre moi. A la dernière audience, le juge avait estimé injuste que je sois détenu sans motif valable et avait demandé aux forces de sécurité israéliennes d’assurer un suivi et de fournir des preuves à l’appui. Il avait par ailleurs indiqué que je pourrais bien être libéré. Mais lorsque j’ai vu que le temps passait et que la situation ne changeait pas, j’ai décidé après un mois de faire une grève de la faim. »

En effet, Sarsak a entamé sa grève de la faim le 15 mars 2012 : « Ils avaient, à trois différentes reprises, menti à mon médecin et à mon avocat en prétendant m’avoir transféré dans une autre prison et ce, pour m’empêcher de les voir. Le médecin de la prison qui est également enquêteur m’avait menti en m’annonçant que j’étais diabétique. A un moment donné, ils ont essayé de m’en dissuader en m’informant que mon père était mort et que ma mère agonisait à cause de ma grève de la faim. Qu’ils soient politiciens ou des dirigeants militaires, les Israéliens avaient tous tenté de me convaincre de mettre un terme à ma grève, mais je suis resté sur mes positions. Après 40 jours, une commission judiciaire m’a promis de me laisser retourner à Gaza, néanmoins, j’ai poursuivi ma grève de la faim jusqu’à l’obtention d’un accord officiel. »

Et justement, la décision de Sarsak de continuer sur son chemin tracé a été encouragée et consolidée par le soutien fort de sa famille et de la communauté internationale : « je recevais des lettre de mon frère par le biais de la Croix Rouge. Il m’informait que le monde entier commençait à entendre parler de mon cas et de mon histoire. Savoir que les gens avaient une part d’humanité et de gentillesse et solidarité à mon égard m’a encore donné du courage. Et j’ai senti que le sport ne tient compte ni de la religion ni de la race : il a réussi à unir des gens qui ont véhiculé un merveilleux message d’humanisme. »

Trois années d’humiliation et de souffrances qui n’ont pas eu raison de Sarsak. Malgré cette fâcheuse expérience, le jeune footballeur, armé de ferveur et de sang nouveau, se sent en mesure d’affronter la vie : « J’ai perdu 3 ans de ma jeunesse, une période qui aurait bien pu voir mes ambitions se réaliser. Pendant ma détention, je n’avais goût pour rien et je vivais dans l’angoisse et dans la tristesse. Mais pour ce qu’elle vaut, mon expérience m’a rendu plus mûr. J’ai vraiment senti la souffrance des autres et celle des prisonniers Palestiniens. J’ai l’intention de les soutenir jusqu’à la fin. Actuellement, il y a trois autres grévistes de la faim et j’espère qu’ils auront la chance de se retrouver parmi leurs familles. Pour le moment, j’ai besoin de me reposer et de récupérer avant de décider de mes projets futurs. »

Pour rappel, Mahmoud Sarsak a été libéré le 10 juillet 2012.

Mahmoud Sarsak est le dernier détenu administratif conformément à la Loi sur l’Incarcération des Combattant Illégaux de 2002. il s’agit d’une mesure législative dont Israël se sert pour détenir les Gazaouis sans chef d’inculpation. Israël faisait, et fait toujours appel à la détention administrative comme alternative à la procédure pénale. Il en résulte, de ce fait, une détention indéterminée des Palestiniens qui sont incapables de répondre à toutes les accusations qui leur sont faites. Ce régime est, bien évidemment, associé à de nombreuses violations des droits de l’homme résultant d’un traitement cruel, inhumain et dégradant que l’Article 3 des Conventions de Genève de 1949 interdit, ainsi que l’Article 7 de la Convention Internationale sur les Droits Civils et Politiques.

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Traduction : Info-Palestine.net - Niha