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Qui sont les Palestiniens ?
mercredi 11 janvier 2012 - Hasan Afif El-Hasan - PC
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Janvier 2008 - Les Palestiniens de Gaza parviennent à briser temporairement le blocus israélien et se rendent en Egypte pendant plusieurs jours pour se procurer le maximum de produits de première nécessité

La guerre de 1948 qui a mené à la création de l’état d’Israël sur 78% du territoire palestinien a détruit la société palestinienne. Plus de 80% des Palestiniens qui vivaient dans des parties de Palestine où s’est établi Israël sont devenus des réfugiés, leur société s’est désintégrée et leur vie a été bouleversée tant sur le plan individuel que communautaire et national. Les Palestiniens de Cisjordanie et de Jérusalem Est se sont retrouvés sous le contrôle du régime Hachémite de Jordanie et ceux qui habitaient dans le bande de Gaza, sous le contrôle d’une administration égyptienne indifférente. Puis après la guerre de 1967, Israël a mis ces régions sous occupation militaire et les Palestiniens sont actuellement soit réfugiés soit sous occupation.

Qui sont les Palestiniens ?

Ce sont les descendants de tous les groupes qui ont vécu en Palestine depuis les anciens Cananéens et avant eux. La Palestine a été conquise successivement par les Cananéens, les Philistins, les anciens Hébreux, les anciens Egyptiens, les Perses, les grecs, les Romains, les Musulmans, les Croisés, les Ayobis (Salâh Ad-Dîn Al-Ayyûbî - Saladin, ndt) et les Turcs. Les communautés qui vivaient en Palestine se sont combattues, mariées entre elles et entraidées et aucune n’a été éliminée.

Il n’est pas possible de relater en détail l’histoire des Palestiniens qui s’étend sans interruption sur plusieurs millénaires en un article ni même en un livre, aussi je me propose de présenter ici seulement quelques découvertes archéologiques et des anciens textes en hiéroglyphes égyptiens sur les Cananéens, les premiers habitants de Palestine. Les anciens Egyptiens qui avaient des contacts personnels avec les Palestiniens grâce au commerce et aux campagnes militaires ont fourni des réponses partielles à la question de savoir qui étaient les premiers Palestiniens. Des archéologues modernes ont découvert, dans les annales inscrites sur des poteries et des ustensiles du début de l’âge de bronze, des preuves que l’Egypte avait des relations avec la Palestine et la Syrie pendant la première et la seconde dynastie égyptiennes de 3100 à 2686 avant J.C.

Les habitants de la Palestine sont sédentarisés depuis la période qu’on appelle ère pré-poterie entre 8000 et 5000 ans avant J.C ; ils ont développé l’élevage et la culture selon de nombreux historiens dont l’archéologue canadien Donald Redford. Mais la Palestine, en tant qu’entité géographique remonte à 3000 ans avant J.C. La Palestine a porté le nom de Pays des Cananéens jusqu’au 12ième siècle avant J.C.

La topographie de la Palestine, avec ses montagnes qui divisent le pays en hautes terres, vallées, steppe et côte, créait des barrières naturelles entre communautés et ne permettait pas de cultiver de grandes surfaces de terre d’un seul tenant. On ne pouvait pas établir de grandes cités ni d’état nation dans tout le territoire comme en Egypte ou en Mésopotamie (Irak) où les rivières navigables permettaient à un pouvoir central de contrôler les grands territoires qu’elles traversaient surtout après le développement de la culture de céréales et de l’élevage du bétail.

A la différence de leurs homologues égyptiens dont les villes étaient conçues principalement en fonction du culte des dieux, le principal souci des Palestiniens était de se protéger des envahisseurs et des animaux sauvages. Dans des écrits datant d’après 3000 ans avant J.C., les Egyptiens appellent les cités palestiniennes des "unwt" ce qui signifie "enclos fortifiés". Ainsi l’archéologue britannique, Kathleen Kenyon, a écrit dans son livre "Fouilles à Jéricho" que la communauté de 2000 personnes qui vivait à Jéricho avait entouré la ville d’un mur de pierre rehaussé de tours de 3 mètres de large et de 4 mètres de haut. Jéricho est une des principales villes palestiniennes qui a été mise à jour au 20ième siècle.

Selon l’historien Donald Redford, des archéologues anglais, étasuniens et australiens contemporains estiment que, au début de l’ère de bronze, la Palestine avait une population de 150 000 habitants répartie en une vingtaine de larges regroupements qui avaient toutes les caractéristiques d’une ville et une infinité de petites communautés qui étaient à une distance d’une journée de marche du centre urbain le plus proche. Les villes se sont formées progressivement au cours des années à partir de communautés plus petites. Les villes palestiniennes étaient entourées de murs de briques et de pierres très épais percés de portes et de grilles. Les habitants des villes avaient des relations commerciales et agricoles entre eux et avec leurs voisins d’Egypte au sud et de Byblos en Syrie au nord. Les courriers internationaux écrits en akkadien sémitique sur des tablettes d’argile envoyés par des officiels cananéens à des officiels du gouvernement égyptien dans la ville d’Armarna pendant la 18ième dynastie témoigne des relations entre les Cananéens et les Egyptiens.

La plupart des localités se trouvaient dans trois lieux géographiques bénéficiant de réserves d’eau et de sols fertiles, la plaine côtière au nord, la haute vallée du Jourdain et la vallée de Megiddo (Marj Ibn Aamer). Des archéologues ont découvert des localités dans le désert palestinien du Néguev et il y avait des routes qui allaient du nord de l’Egypte au sud de la Palestine. Divers artefacts ont été trouvés dans le ruines de la ville de Arad située au nord-est de Beer Sheva dans le désert du Néguev et le fait qu’elle était entourée de deux douzaines de villages satellites montre qu’il s’agissait d’un centre commercial. Arad était une ville cananéenne prospère au 3ième millénaire avant J.C. ; elle était fortifiée et entourée d’un mur d’enceinte en pierre rehaussé de tours. Et comme il n’y avait pas de sources dans le sous-sol aux alentours de la ville, ses fondateurs avaient construit des réservoirs d’eau pour recueillir l’eau de pluie.

Ces anciennes tribus cananéennes, les plus lointains ancêtres connus des Palestiniens, ont régné sur la Palestine et le Jourdain jusqu’à 1150 avant J.C., époque à laquelle les Philistins se sont installés le long de la côte. Selon d’anciens textes égyptiens, le pays de Canaan recouvrait la côté est de la Méditerranée où se trouve la Palestine moderne, des territoires à l’ouest du Jourdain, des territoires du sud du Liban et des territoires du sud-ouest de la Syrie. Parfois la ville cananéenne de Gaza était appelée Canaan par les anciens Egyptiens en raison de sa grande proximité et de ses liens commerciaux avec l’Egypte.

Pour certains historiens, la dynastie égyptienne connue sous le nom de "Hyksos" qui a régné de 1650 à1550 avant J.C., était cananéenne. Quand le gouvernement central de l’Egypte sous les 13ième et 14ième dynasties s’est révélé trop faible pour défendre le pays, les envahisseurs cananéens qui venaient du nord (de Palestine) ont conquis plusieurs petits royaumes dans le delta égyptien et ont établi le règne des "Hyksos" sur le nord de l’Egypte. Leur capitale, Avaris, était située dans la partie orientale du delta, à Tell ed-Dab sur la branche Pélusiaque du Nil. Sous les "Hyksos" le commerce égyptien atteignait l’Euphrate au nord. Ce sont les "Hyksos" qui ont introduire les chevaux et les chariots dans l’Egypte ancienne et avec le temps leurs rois se sont de plus en plus égyptianisés. Ils ont construit des temples et des cimetières comme ceux des pharaons égyptiens mais la conception architecturale était de style cananéen. Les temples "Hyksos", les coutumes funéraires, la poterie et les armes égyptiennes étaient semblables à ce qu’on a trouvé en Palestine datant de la même période, l’époque II de l’âge de bronze moyen. Cela confirme la thèse selon laquelle les "Hyksos" étaient d’origine cananéenne comme l’affirme l’égyptologue William Gillan Waddell.

Le Pays de Canaan est tombé sous le joug des anciens Egyptiens vers 1480 avant J.C., et ça n’a pas été la dernière fois dans l’histoire. Sous le pharaon Thoutmosis II de la 18ième dynastie, les Egyptiens ont conquis la Terre de Canaan jusqu’aux rives de l’Euphrate. L’invasion des "Hyksos" a fait prendre conscience aux Egyptiens de la valeur stratégique du Pays de Canaan qui les séparait des puissances étrangères du nord susceptibles de défier à nouveau l’Egypte. Après avoir chassé l’élite Hyksos, les Egyptiens, pour se venger, ont détruit les monuments érigés par les "Hyksos" et Thoutmosis a étendu les frontières de l’Egypte et transformé la Terre de Canaan en une zone tampon.

Canaan a une valeur stratégique inaltérable à cause de ses ressources et des deux routes commerciales qui traversent le pays, la première le long de la côte, et l’autre dans la vallée du Jourdain. Les Egyptiens ont transformés les princes locaux en vassaux à leur service. L’Egypte a pris des mesures draconiennes pour maintenir son pouvoir sur la Palestine à cause de sa proximité et de ses ressources en cuivre, huile d’olive, vin, raisins et figues. Le commerce était florissant de Gaza, sur la côte de Palestine, jusqu’à Ugarit (Aujourd’hui Latakia) au nord de la Syrie et les échanges commerciaux, culturels et de main d’oeuvre étaient nombreux.

Les Philistins, des tribus indo-européennes qu’on appelait "les peuples de la mer" se sont installés sur la côte cananéenne verts 1150 avant J.C. Des vagues successives de Philistins se sont établies en Palestine au début du règne de la 20ième dynastie égyptienne. Les fouilles ont mis à jour des objets de la vie quotidienne d’origine chypriote mycénienne en plus d’objets cananéens et égyptiens.

Moins d’une siècle après leur arrivée, les Philistins ont réussi à se libérer du joug de l’Egypte. Selon l’archéologue R. H. Dornemann, de l’université de Chicago, les Philistins ont élargi leur sphère d’influence au delà de leurs forteresses en prenant le contrôle de villes du sud qui appartenaient auparavant à l’administration égyptienne. Et au nord, ils ont commencé à s’installer dans la vallée de Megiddo et dans la vallée du Jourdain.

De vieilles familles palestiniennes se considèrent comme les descendants de tel ou tel groupe d’anciens Palestiniens. Quand Israël a occupé la Cisjordanie en 1967, Hamdi Canaan, qui assure descendre des anciens Cananéens, était le maire palestinien de Naplouse, une des anciennes cités de Palestine. Sa famille travaille dans la fabrication de savons à base d’huile d’olive depuis des centaines d’années.

Les Palestiniens d’aujourd’hui endurent beaucoup de souffrances soit sous l’occupation militaire israélienne soit en tant que réfugié et comme si cela ne suffisait pas, ajoutant l’outrage à l’infamie, un politicien américain, Newt Gingrich, qui ferait n’importe quoi, y compris vendre son âme pour obtenir un vote supplémentaire, a déclaré que "le peuple palestinien était un peuple inventé". Les découvertes archéologiques et les anciens textes d’hiéroglyphes égyptiens montrent que le peuple palestinien existait déjà à l’époque où les ancêtres européens de Newt Gingrich vivaient dans des grottes, très longtemps avant la découverte de l’Amérique.

* Hasan Afif El-Hasan est un analyste politique. Son dernier livre : Is The Two-State Solution Already Dead ? (Algora Publishing, New York), est disponible sur Amazon.com et Barnes & Noble.

5 janvier 2012 - The Palestine Chronicle - Pour consulter l’original :
http://palestinechronicle.com/view_...
Traduction : Info-Palestine.net - Dominique Muselet