Les chefs d’Etat et de gouvernement qui ont assisté à Paris au lancement de l’Union pour la Méditerranée ont soigneusement évité d’aborder les sujets qui fâchent pour ne pas gâcher la jubilation de leur hôte français, plein de l’illusion d’être le maître d’oeuvre d’un évènement historique marquant avec la réunion de leur sommet. Ils ont sagement renvoyé l’ouverture de ces dossiers à plus tard et à des espaces de négociation moins exposés que leur sommet à l’empressement des médias.
L’apparente sérénité, qui de ce fait a prévalu dans cette rencontre, a permis au Président français de prononcer un discours inaugural sous la forme de profession de foi dans le projet d’Union pour la Méditerranée. Exercice réitéré à l’identique par tous les participants qui ont pris la parole en la circonstance.
Cela étant, les flonflons et les lampions de la « grande fête » inaugurale de l’UPM éteints, d’âpres et délicates tractations vont s’enclencher entre les partenaires de cette Union. Et d’abord celles qui devront trancher sur le choix du lieu où sera domicilié le siège du secrétariat général de l’Union et sur les détails de son fonctionnement. Cette question qui peut paraître anodine, comparée à la gravité et à la complexité des problèmes d’ordre politique, financier et autres auxquels l’UPM va devoir se confronter, est pourtant celle qui a failli faire avorter le grand « show » diplomatico-médiatique dont la capitale française a été la scène ce 13 juillet.
Le comble est, on ne sait dans quel but inavoué, que ce sont les Français eux-mêmes qui ont créé le climat qui pouvait gâcher l’évènement pour lequel leur président Nicolas Sarkozy a investi des trésors de diplomatie et de séduction. Cela en donnant à croire aux médias que cet aspect de la concrétisation du projet de l’Union de la Méditerranée a été « réglé » avant la tenue du sommet. Fausse vraie information qui fut pour une bonne part à l’origine de l’attitude longtemps équivoque de l’Algérie sur le projet UPM et de sa demande de « clarification », mais aussi à l’origine de l’absence du roi du Maroc au sommet, qui, après avoir pris pour argent comptant la « désignation d’office » de son pays en tant que siège du secrétariat général de l’Union, a déchanté en comprenant qu’on lui a fait prendre des vessies pour des lanternes.
Il est échu à Sarkozy pour l’Union européenne et à l’Egyptien Hosni Moubarak pour les pays de la rive sud, de présider aux premiers pas de l’Union fondée ce 13 juillet. Les deux hommes sont connus pour avoir une excessive confiance dans leur habileté diplomatique et l’influence dont leurs pays respectifs jouiraient sur la scène internationale. Ce qui pourrait les conduire à vouloir pratiquer des exercices du type personnel dans la mise en place des mécanismes du fonctionnement de cette Union et la priorisation des problèmes auxquels elle devra s’atteler.
Les « escarmouches » qui ont ponctué la préparation du sommet ont montré que c’est là une démarche contre laquelle se sont prononcés nombre de pays participants aussi bien européens que riverains du sud de la Méditerranée.
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15 juillet 2008 - Le Quotidien d’Oran - Analyse