À environ 3h du matin mardi matin, les soldats israéliens ont envahi le camp de réfugiés de Dheisheh, au sud de Bethléem en Cisjordanie occupée.
Comme les soldats essayaient de kidnapper un Palestinien et de l’emmener en dehors du camp, les jeunes ont voulu les en empêcher en leur jetant des pierres et des cocktails Molotov. Les soldats ont tiré des grenades de gaz lacrymogène et tiré aussi à balles réelles.
Al-Jafari était sur le toit de sa maison au moment des tirs. Il avait fêté son vingtième anniversaire plus tôt ce mois-ci.
« Semblable à une exécution »
« Il était toujours parmi les premiers à sortir et à faire face aux soldats toutes les fois qu’ils envahissent le camp, » m’a dit Omaima Abu Aisheh, un ami et voisin d’Al-Jafari. « Il jetait des pierres au moment où un tireur isolé israélien lui a tiré une balle dans la poitrine. Il est mort sur place. Nous n’avons même pas trouvé une goutte de sang sur le toit. »
L’Agence de presse Ma’an a cité l’expert médico-légal Sabri al-Aloul qui a indiqué que l’autopsie d’Al-Jafari montrait que le jeune homme avait eu une grave hémorragie interne après qu’une balle ait pénétré son épaule gauche et traversé ses poumons avant de sortir, causant le grave saignement autour de la colonne vertébrale.
Le meurtre était « semblable à une exécution » parce que le jeune homme a été abattu à très courte distance a dit Al-Aloul a dit Ma’an.
Al-Jafari avait étudié la gestion d’hôtel à l’Institut de Formation Supérieure de Talitha Kumi dans Beit Jala, un autre village de la Cisjordanie. Il espérait devenir un chef.
Al-Jafari avait été actif dans les Brigades d’Al-Aqsa, une milice liée au Fatah qui a été démobilisée dans le cadre d’un accord avec Israël. Mais les témoins oculaires sont clairs qu’Al-Jafari n’avait pas d’arme et lançait des pierres quand il a été tué à bout portant.
« Je lui ai toujours dit que de se concentrer sur ses études au lieu de mettre sa vie en danger, mais il aimait trop la Palestine, » m’a dit sa mère Hanan. « Il a toujours rêvé de voir la Palestine libre et de nous voir retourner à Deir Rafat, notre village d’origine [situé à l’ouest de Jérusalem] avant le Nakba. »
La Nakba en arabe : la catastrophe) est le nom que les Palestiniens donnent à la purification ethnique de la Palestine par les forces sionistes pendant les années 1940. Le camp de Dheisheh avait été installé pour fournir un abri provisoire à 3400 réfugiés déplacés de 45 villages dans la région de Jérusalem. Aujourd’hui, il a une population de près de 20 000 personnes.
Les Palestiniens vivant dans ce secteur sont accoutumés aux incursions par les forces israéliennes. Un jour plus tôt, le camp de réfugiés d’Aida - aussi dans la région de Bethléem - a été attaqué par Israël. Plusieurs Palestiniens ont été blessés.
Le camp de Dheisheh lui-même tend à être envahi sur une base hebdomadaire - habituellement au cours de la nuit ou juste avant aube. C’est seulement quand quelqu’un est tué que ces incursions suscitent l’attention.
L’AP ne nous représente pas »
Al-Jafari était un partisan du Fatah, la faction politique dirigée par Mahmoud Abbas, le chef de l’Autorité Palestinienne (AP). Pourtant les représentants de tous les principaux partis politiques palestiniens ont assisté à son enterrement qui a eu lieu plus tard le mardi.
Un jour du deuil a été déclaré dans tout le camp, avec tous les magasins et écoles fermant leurs portes. Ils ont été des centaines à suivre le cortège funèbre après les prières de midi.
Il y avait une certaine tension au début de la procession funéraire, quand les jeunes du camp ont refusé de permettre qu’une voiture fournie par les forces de sécurité de l’AP portent le corps d’Al-Jafari. Ses amis ont insisté pour le porter au cimetière sur leurs épaules.
L’AP a été fortement critiquée par des Palestiniens pour sa collaboration répressive avec Israël. Abbas avait qualifié la collaboration avec l’occupation israélienne de « sacrée. »
Hammam Sbeih, un adolescent du village voisin d’Al-Khader, a expliqué : « Même les jeunes dans le camp qui sont affiliés avec Fatah sont fâchés contre l’AP et pensent qu’elle ne nous représente pas. Ainsi ils n’ont pas jugé juste qu’une voiture des services de sécurité porte le corps de Jihad. »
La courte vie de Jihad Al-Jafari était tristement semblable à celle de Mohammad Al-Araj de Mohammad, un élève de lycée âgé de 17 ans et assassiné par les forces israéliennes en juillet dernier. Il participait à une protestation au point de contrôle de Qalandiya entre Jérusalem et Ramallah.
Chacun des deux jeunes hommes étaient des aspirants chefs dans l’hôtellerie. Chacun des deux avaient vécu dans des camps de réfugiés. Chacun des deux sont morts pendant qu’ils affrontaient, avec rien d’autre que des pierres, les soldats Israéliens lourdement armés.
Il n’y a rien d’étonnant que tant de personnes aient manifesté leur respect à Jihad Al-Jafari et à sa famille. Les Palestiniens se rendent intensément compte de la façon dont Israël contrecarre les ambitions des jeunes Palestiniens, leur interdisant de mener toute vie normale.
* Budour Youssef Hassan (@Budour48) est une Palestinienne anarchiste et diplômée en droit. Elle vit à Jérusalem sous occupation.
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25 février 2015 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduction : Info-Palestine.eu