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Appels « bidon » pour mettre fin au siège de Gaza

jeudi 1er juillet 2010 - 08h:05

Hasan Abu Nimah

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Depuis l’attaque meurtrière d’Israël contre la flottille de la liberté le 31 mai, il y a eu des appels de toutes parts pour qu’Israël mette fin à son siège de Gaza. C’est aussi étrange que trompeur, Israël n’étant pas le seul responsable du blocus, écrit Hasan Abu Nimah.

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Les deux "loosers" Abbas [à g.] et Zébulon 1° - L’objectif des puissances occidentales est d’imposer grâce au blocus, la remise en selle de leur pantin Abbas dans la bande de Gaza, pour le plus grand profit des forces israéliennes d’occupation.

Beaucoup de ceux qui parlent maintenant de lever le blocus l’ont toujours fortement soutenu et continuent à le soutenir. Leurs appels vides sont principalement destinés à se décharger de toute responsabilité pour les traitements infligés par le siège cruel, illégal et injustifiable, à la population palestinienne dans la bande de Gaza.

Il est maintenant clair que le blocus a échoué, d’abord et avant tout parce que le brave peuple de Gaza a décidé de s’adapter à ses conséquences les plus dures, et de supporter avec dignité et courage la punition collective qui vise à les étrangler en leur imposant soumission et désespoir. Ils n’ont jamais accepté de marchander leur dignité nationale et leurs droits en échange de quelques produits en plus - même ceux dont ils ont le plus désespérément besoin.

Le siège a également échoué en raison de la pression montante venant de la société civile et orchestrée par des centaines d’organisations impliquées et des militants qui tiennent à rappeler au monde civilisé l’illégalité du siège de Gaza, la complicité des Nations Unies à travers ses bizarres membres du Quartet autoproclamé (États-Unis, Union Européenne, Russie et Nations Unies), ainsi que la cruauté et les doubles standards appliqués par les Européens, les Américains et beaucoup d’autres qui se sont rangés derrière la décision d’Israël de terroriser toute la population de Gaza à des fins politiques.

La dernière initiative en date, mais certainement pas l’ultime, a été la « flottille de la liberté pour Gaza » qui a été victime de la sanglante attaque israélienne par air et par mer, suivie du détournement de tous les navires et du kidnapping de tous les passagers à bord.

Israël est devenu de plus en plus préoccupé des réactions internationales, souvent positives, à l’égard des tentatives des militants pour briser le siège. Face au dilemme : soit laisser la « Flottille de la Liberté » arriver à Gaza et marquer ainsi la fin du siège, soit la bloquer et faire face à une condamnation internationale, Israël a choisi la deuxième option. Mais son utilisation de la violence terroriste sur un convoi pacifique contre des civils désarmés a provoqué une révulsion bien plus grave que ce qu’escomptait Israël.

La sauvagerie israélienne préméditée était apparemment destinée à décourager d’autres initiatives similaires. Si tel était le but, il a échoué, car les nouvelles font part de l’organisation de nouvelles flottilles dans plusieurs pays. Ainsi, Israël devra encore et encore faire face au même dilemme.

La Flottille de la Liberté n’est pas un incident historique qui aurait ouvert les yeux à un monde inconscient du fait que Gaza est assiégée. Ceci était parfaitement connu. Ce qu’a fait la Flottille, c’est placer dans un embarras énorme tous ceux qui avaient dès le début, approuvé et soutenu le blocus.

Par son attaque barbare contre la flottille, Israël a même dépassé ses habituels mépris général et indépassable du droit international, de toute décence et respect de la vie humaine. Ses actions ont mis au grand jour la complicité des puissances régionales et internationales, les forçant à réagir ou à prendre le risque d’être considérées comme les partenaires silencieux du crime israélien.

Donc ils ont commencé, les uns après les autre, à lancer des appels pour que soit mis fin au siège. Les pays européens, ceux-là même qui avaient déjà engagé leurs forces navales pour aider Israël à appliquer ce que le Comité international de la Croix-Rouge a qualifié de blocus illégal, ont fait quelque bruit contre le siège. Mais tout ce qu’ils ont fait, c’était des propositions visant à ce que le blocus soit réaménagé, les Européens jouant le rôle de mandataires, poursuivant pour le compte d’Israël les navires en route pour Gaza.

Cela illustre la complicité des Européens qui s’étaient portés volontaires pour l’application d’un accord négocié sous les auspices des Etats-Unis en 2005, concernant les passages de Gaza, dans lequel les Européens remplaçaient les forces israéliennes d’occupation en entravant la libre circulation des Palestiniens. La frontière de Rafah entre Gaza et l’Egypte restait en réalité sous contrôle israélien, lequel conservait un total droit de veto. Ce qui revienait à institutionnaliser le siège plutôt que d’exiger sa suppression...

Mahmoud Abbas, dirigeant du Fatah et chef de l’Autorité palestinienne basée à Ramallah - qui est dit avoir plaidé auprès du président américain Barack Obama de ne pas laisser Israël mettre fin au siège et donc donner au Hamas une victoire facile - appelle maintenant lui aussi à la levée du blocus. Mais lorsqu’il est interrogé, Abbas est toujours attentif à conditionner sa demande à la « réconciliation » entre le Hamas - qui a survécu à de nombreuses tentatives de coup de force concoctées par Abbas depuis la victoire aux élections de 2006 - et son organisation du Fatah, laquelle, avec le soutien international, a usurpé le contrôle de l’appareil de l’Autorité palestinienne après avoir perdu les élections.

La « réconciliation » que veut M. Abbas, c’est revenir au statu quo avant que le Hamas n’ait déjoué la tentative de coup d’Etat en juin 2007. En d’autres termes, Abbas veut pour lui une victoire facile - qui ramènerait ses forces à Gaza, avec le contrôle de ses frontières - qu’il ne peut pas atteindre par des conspirations et des aventures guerrières.

Même le gouvernement israélien a commencé à parler de la nécessité de « soulager » le siège. Il a annoncé que tout serait autorisé à entrer dans la bande de Gaza, à l’exception des articles pouvant être à « double usage » et pouvant être utilisés pour fabriquer des armes.

Les communiqués de presse ont indiqué que la liste des produits interdits incluait pratiquement tous les matériaux de construction, les tuyaux de plomberie, les appareils électriques, les fournitures de nettoyage, d’engrais et de nombreux autres éléments dont l’absence paralyse l’économie de Gaza. Avec un assentiment international, Israël a réussi à redéfinir les matériaux de construction comme des armes dangereuses, ne pouvant être admis que sous les auspices des Nations Unies.

Il reste à voir si Israël respectera ses promesses, même minimes, mais si on se base sur l’expérience passée, il y a tout lieu de s’attendre à ce que ces changements soient cosmétiques, destinés non pas à diminuer le blocus, mais plutôt à soulager la pression internationale.

Le sentiment de déception a été accentué quand le cabinet Netanyahu a publié une déclaration en anglais, parlant d’une décision du gouvernement d’alléger le blocus, tandis que la version hébraïque de la même déclaration ne comprenait rien de la sorte.

Même avec ces mesures, la bande de Gaza demeure effectivement une prison pour tous ceux qui y vivent. C’est comme si leur donner assez de nourriture était tout ce qui comptait. Leurs droits humains fondamentaux, le droit d’entrer et de sortir, d’étudier, de se déplacer et de voyager, ne sont dans les objectifs de personne.

En ce qui concerne les États-Unis, lorsque la secrétaire d’État Hillary Clinton a fait savoir la semaine dernière que la situation dans Gaza n’était pas « tenable », elle ne voulait pas dire qu’elle mettrait fin à un siège qui viole les droits fondamentaux. Tout ce qu’elle voulait dire, c’est que le siège n’était pas tenable politiquement, et donc qu’il devait être reformulé pour le rendre plus présentable.

Un véritable appel à lever le siège de Gaza signifierait la levée de toutes les restrictions, comme pour toute autre entité internationale. Aucun pouvoir n’a le droit de décider quels biens doivent entrer ou être interdits dans la bande de Gaza, et pas mêmes les importations d’armes aussi longtemps que tous les arsenaux américains et européens seront mis à disposition d’Israël pour qu’il puisse satisfaire tous ses besoins militaires. Alors qu’Israël est l’agresseur, l’occupant et le contrevenant constant au droit international...

Ce sont les peuples sous occupation et sous blocus qui ont besoin d’être renforcés pour pouvoir se libérer et retrouver leur dignité volée.

Plutôt que de prétendre que le matériel de plomberie et de ciment sont des armes, il vaudrait beaucoup mieux pour les amis d’Israël, exhorter celui-ci à discuter avec le Hamas et accepter une de ses nombreuses trêves proposées, si Israël veut sérieusement mettre fin à la violence que son occupation et sa brutalité ont générée.

Tous les appels sincères à lever le siège devrait également garantir qu’il soit mis fin au monopole israélien sur la région et à son règne terroriste et en dehors de toute loi.

* Hasan Abu Nimah est ancien représentant permanent de la Jordanie aux Nations Unies. Cet article est paru en premier dans le Jordan Times.

Du même auteur :

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24 juin 2010 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction de l’anglais : Claude Zurbach


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