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La force de dissuasion du Hizbullah

samedi 6 mars 2010 - 08h:26

Omayma Abdel-Latif

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Le Hizbullah a menacé Israël de lui rendre coup pour coup s’il s’avisait de lancer une nouvelle guerre contre le Liban. Nasrallah a donné des détails sur de nouvelles possibilités en armements qui pourraient jouer un rôle dissuassif dans n’importe quelle nouvelle confrontation.

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Combattant de la résistance libanaise




La récente bande annonce, sous-titrée en hébreu sur la chaîne télévisée Al-Manar avant les informations du soir, résume comment le Hizbullah anticipe - avec la nouvelle équation qui en découle - un conflit avec Israël : un bâtiment pour un bâtiment, une raffinerie de pétrole pour une raffinerie de pétrole, une usine pour une usine.

La déclaration faite dans un discours prononcé par Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hizbullah, mardi dernier à l’occasion de la journée de commémoration des Martyres du mouvement, n’indique peut-être rien de neuf. Lors de discours précédents, Nasrallah avait déjà envoyé des messages à peine codés au sujet de la capacité du mouvement de la résistance islamique à se confronter à n’importe quelle agression israélienne à venir contre le Liban. Néanmoins, il ne s’était jamais étendu sur le type d’armements en possession du Hizbullah. Mais cette fois-ci Nasrallah a donné des détails sur de nouvelles possibilités en armements qui pourraient jouer un rôle dissuassif dans n’importe quelle nouvelle confrontation. De plus pour la première fois, Nasrallah a fait un exposé complet du type de cibles israéliennes que le Hizbullah serait capable de frapper lors de prochains combats, faisant suggérer à beaucoup de personnes que Nasrallah a amené le conflit à un nouveau et sans précédent niveau.

« Je veux dire aux Israéliens la chose suivante : non seulement si vous frappez Dahiyeh nous frapperons Tel Aviv, mais si vous frappez l’aéroport international du martyre Rafik al-Hariri à Beyrouth, nous frapperons votre aéroport Ben-Gourion à Tel Aviv ; si vous frappez nos ports, nous frapperons les vôtres ; si vous frappez notre raffinerie de pétrole, nous frapperons les vôtres... si vous frappez un seul bâtiment dans Dahiyeh, nous en détruirons plusieurs à Tel Aviv, » a déclaré Nasrallah.

Nawaf Al-Musawi, député du Bloc de Loyauté à la Résistance au parlement libanais, a expliqué les préparatifs ayant conduit à la déclaration de Nasrallah. Cette déclaration dit-il est le fruit d’efforts méthodiques réalisés 24 heures sur 24 depuis la fin de la guerre de juillet en 2006 jusqu’à ce mois de février 2010 : « Des dizaines de milliers de combattants se sont entraînés pour porter la résistance à un niveau tel qu’Israël ne puisse prendre la moindre décision précipitée de lancer une guerre sans que cela s’avère suicidaire pour lui, » a expliqué Al-Musawi. La nouvelle équation posée par Nasrallah, poursuit Al-Musawi, est le début d’un nouveau chapitre dans le conflit israélo-arabe, car les menaces de guerre et d’agression proférées par Israël ne resteront plus sans réponse. Le Hizbullah, selon ses responsables, est bien mieux équipé aujourd’hui qu’il ne l’était en 2006. « Si les Israéliens pensent pouvoir nous causer plus de dommages, ils savent maintenant que nous pouvons aussi leur infliger plus de dégâts, » a déclaré au Times Sheikh Naim Qassim, secrétaire adjoint du Hizbullah.

Le discours de Nasrallah a été fait deux jours après que Samir Geagea, chef des Forces libanaises [fascistes libanais ayant dans la passé participé activement pour le compte des Israéliens aux massacres de Sabra et Chatila - N.d.T] et ancien seigneur de guerre, ait accusé le Hizbullah, dans un discours daté du 14 février de donner à l’Israël un prétexte pour lancer une guerre contre le Liban puisque le Hizbullah conservait son arsenal. Cette idée avait fait des émules, en particulier parmi les partis chrétiens de droite du bloc du 14 mars - le parti phalangiste et les forces libanaises. Nasrallah a répondu à cela en retournant l’accusation. « C’est une rhétorique très dangereuse parce qu’elle justifie absolument n’importe quelle agression israélienne et juge à l’avance la résistance [libanaise] responsable de n’importe quelle attaque israélienne. Est-ce un appel à une guerre israélienne contre le Liban ? Sommes-nous à nouveau dans les circonstances de 1982 ? Est-ce que certains s’imaginent qu’il n’y a aucune voie possible pour leurs rêves et leur espérances si ce n’est par une guerre israélienne contre le Liban ? C’est cela, la question, » a questionné Nasrallah avec force.

Geagea a répété sa position le lundi 21 février, dans une conférence de presse organisée pour répondre au discours de Nasrallah. Il a suggéré qu’ « il n’y avait aucune raison d’organiser une session censée aborder la question d’une stratégie unifiée de défense pour le Liban. » Nasrallah a exigé que l’Etat libanais et le gouvernement prennent clairement position face à pareils propos. Le Premier ministre libanais Saad Al-Hariri a répondu indirectement par un certain nombre de déclarations dans les journaux italiens et lors d’une visite au Vatican au cours de laquelle il a critiqué Israël et l’a accusé de menacer de guerre le Liban.

En tout cas, la dernière déclaration de Nasrallah a mis en évidence la naïveté de l’opinion qui domine dans les cercles intellectuels de Washington au sujet de la capacité des Etats-Unis à impliquer le Hizbullah dans des entretiens de bas niveau « en coopération avec les Anglais et tout en informant les Israéliens, » — comme le suggérait un observateur — pour finalement forcer le Hizbullah à la démilitarisation en suivant le même processus de désarmement que l’IRA [Irish Republican Army]. Cette vue, qui consiste à considérer l’armement du Hizbullah comme une menace non seulement pour Israël mais « pour le Liban », suppose qu’une des incitations possibles pour que le Hizbullah abandonne son arsenal soit un engagement israélien de s’abstenir d’attaquer le Liban si « le Hizbullah se soumettait à un processus de désarmement ». Mais pour le Hizbullah, qui estime que la communauté internationale a abandonné le Liban lors de la guerre 2006, une telle proposition ignore les réalités les plus élémentaires.

L’idée ci-dessus - telle qu’elle a été présentée par les analystes Steven Simon et Jonathan Stevenson du département américain des affaires étrangères en janvier - suggère que souscrire à un tel programme de démilitarisation fournirait au Hizbullah une immunité temporaire au cas où l’Israël « réalise une autre incursion, mieux calibrée ». Penser que le Hizbullah s’engagerait dans un tel processus de désarmement pour obtenir une immunité est la preuve de l’ignorance par ces deux analystes des capacités, en conviction et en calculs, du mouvement de résistance. Simon et Stevenson ont même lié ce processus de désarmement à la fourniture à l’armée libanaise d’armes américaines plus perfectionnées. Mais tout le monde est convaincu que les Etats-Unis ne fourniront jamais à l’armée libanaise d’armes pouvant représenter une menace pour Israël, ou même simplement empêcheraient les survols israéliens quotidiens qui violent la souveraineté libanaise.

Al-Musawi, se faisant le reflet de cette conviction, suggère que l’armée libananise s’oriente vers une coopération stratégique et militaire avec la Syrie et l’Iran.


Du même auteur :

- Liban : retours de flamme

28 février 2009 - Al-Ahram Weekly - Traduction de l’anglais : al-Mukhtar


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