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Dubaï : les explications de la Grande-Bretagne sont truffées d’incohérences

vendredi 19 février 2010 - 22h:29

Robert Fisk

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Il est temps de mettre les choses au clair.

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Mahmoud al-Mabhouh a-t-il été victime d’une connivence entre les Britanniques et Israël ?
(Reuters)

Connivence. C’est de cela qu’il s’agit. Les Emirats arabes unis soupçonnent - soupçonnent seulement, notez le - la « collaboration sécuritaire » de l’Europe avec Israël d’avoir passé la ligne de l’illégalité, quand des passeports britanniques (et d’autres nations de l’Union européenne) peuvent maintenant être utilisés pour envoyer des agents israéliens dans le Golfe tuer les ennemis d’Israël.

A 3 h 49 pm, hier après-midi, (heure de Beyrouth, 1 h 49 pm à Londres), mon téléphone libanais se met à sonner. C’est une source - impeccable, je le connais et je sais qu’il parle avec autorité à Abu Dhabi - pour me dire que « les passeports britanniques sont vrais. Ce sont des photos hologrammes avec le timbre biométrique. Ils ne sont ni faux ni contrefaits. Les noms existent vraiment. Falsifier un hologramme ou un timbre biométrique, qu’est-ce que ça veut dire !  »

La voix - je connais l’homme ainsi que ses origines - a envie de parler. « Il y a 18 personnes d’impliquer dans le meurtre de Mahmoud al-Mabhouh. En plus des 11 déjà citées, il y a deux Palestiniens qui sont actuellement interrogés, et cinq autres, dont une femme. Elle a fait partie de l’équipe qui surveillait le hall de l’hôtel. » Deux heures plus tard, un SMS arrive sur mon portable à Beyrouth, venant d’Abu Dhabi, la capitale des Emirats arabes unis. C’est la même source.

« AUTRE CHOSE, » est-il écrit en lettres majuscules et, continuant en minuscules : « La salle de commandement de l’opération se trouvait en Autriche (sic -, en fait, tout est « sic » dans cet article)... donc cela signifie que les suspects ne se parlaient pas ici entre eux, mais via la salle de commandement, sur des lignes séparées pour éviter d’être détectés ou d’être en rapport les uns avec les autres... mais ils ont été détectés et identifiés, OK ?? ». OK ? Je me demande.

Ma source est à la fois exaspérée et pressante. « Nous avons envoyé des précisions sur les 11 personnes dont les noms sont publiés à Interpol. Interpol les a fait circuler dans 188 pays - mais pourquoi la Grande-Bretagne n’a-t-elle pas prévenu les autres nations que ces gens utilisaient des passeports au nom de leur pays ? ». Elle a encore plus à dire.

« Nous avons identifié cinq cartes de crédit appartenant à ces gens, toutes émises aux Etats-Unis. » L’homme ne donne pas les nationalités européennes des cinq autres personnes - il y aurait deux femmes dans l’assassinat de Mr Mabhouh. Il dit que les pays de l’UE coopèraient avec les Emirats arabes unis, notamment le Royaume-Uni. Mais « aucun de ces pays dont nous parlons n’a notifié à Interpol les passeports utilisés dans leur nationalité. Pourquoi non ? »

La source insiste disant que l’un des noms sur un passeport - un homme qui dit ne rien savoir sur son utilisation - s’est rendu en Asie (probablement en Indonésie) et dans des pays de l’UE au cours de l’année passée. Les Emirats ont la preuve qu’un Américain est entré chez eux en juin 2006 avec un passeport britannique délivré au nom d’un citoyen britannique et qui était alors en prison dans les Emirats. Les Emirats prétendent que le passeport d’un agent israélien qui fut envoyé en Jordanie pour tuer un dirigeant du Hamas était un passeport canadien et un vrai, délivré avec la double nationalité avec Israël.

Les services de renseignements - qui, de l’avis de mon correspondant sont souvent très stupides - ont longtemps utilisé de faux passeports. Oliver North et Robert McFarlane se sont rendus en Iran pour obtenir la libération des otages américains au Liban avec des passeports qui avaient été volés auparavant à l’ambassade irlandaise à Athènes. Mais cette nouvelle information depuis les Emirats peut faire que certains gouvernements européens se reprennent - et qu’ils feraient mieux d’avoir les bonnes réponses aux questions. Les services de renseignements - arabes, israéliens, européens ou américains - adoptent souvent une attitude arrogante à l’égard de ceux dont ils prétendent se cacher. Que peuvent dire les Arabes sur un assassinat par le Mossad, si tel est le cas ? Eh bien, nous verrons.

La connivence est un mot que les Arabes comprennent. Il rappelle la guerre de Suez en 1956, quand la Grande-Bretagne et la France s’entendirent avec Israël pour envahir l’Egypte. Tant Londres que Paris nièrent le complot. Ils mentaient. Mais pour un pays arabe du Golfe qui soupçonne ses anciens maîtres (le Royaume-Uni pour ne pas le citer) d’avoir pu être mêlés à l’assassinat d’un officiel du Hamas en visite, c’est apparemment aujourd’hui trop gros. Il y a encore beaucoup à tirer de cette histoire. Attendons et nous verrons s’il y a des réponses en Europe.

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18 février 2010
- The Independent - traduction : JPP


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