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La banqueroute du Madoff libanais

dimanche 13 septembre 2009 - 07h:40

Robert Fisk

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L’homme d’affaires avait promis à ses clients 40% de retour sur investissement...

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Salah Ezzedine

Tout le monde avait confiance en Salah Ezzedine. Un homme d’affaires et financier milliardaire du sud du Liban, chiite musulman. Il a organisé des pèlerinages à la Mecque, managé une importante maison d’édition de Beyrouth et la chaîne de télévision pour enfants, réalisé de très importants investissements dans des conglomérats est-européens dans le pétrole et le fer, et - beaucoup plus dans la question qui nous occupe - il était l’ami intime de très importants dirigeants du Hezbollah.

En effet, de nombreux membres du mouvement de guérilla le plus puissant et le plus efficace au monde, ainsi que des familles de leurs « martyrs » dans la guerre contre Israël, ont placé en même temps leur foi et leur argent dans les mains de M. Ezzedine.

Mais pour la plus grande peine de la milice financée et armée par l’Iran, M. Ezzedine s’est avéré être un « Abou Madoff », se déclarant lui-même en faillite, à hauteur de 1,195 milliard de dollars (soit 760 millions de livres sterlling), après avoir persuader ses investisseurs de croire pour leurs placements en un étonnante 40% d’intérêt, qu’il est finalement incapable de payer selon les fonctionnaires de justice au Liban.

Le Hezbollah est resté silencieux comme une tombe - il y en a beaucoup au Liban - pour autant qu’elles puissent l’être. La station de radio de M. Ezzedine comme sa maison d’édition avaient repris le nom d’Hadi Nasrallah, fils du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui a été tué durant une attaque courageuse mais suicidaire contre les troupes d’occupation israéliennes au sud du Liban.

Mais pire encore, il semble maintenant que l’effondrement financier M. Ezzedine soit devenue inévitable après qu’il ait signé un chèque de 200 000 dollars remis à Hussein Haj Hassan, un des plus proches conseillers politiques de Nasrallah et qui fait partie du groupe de députés du Hezbollah au parlement. Le chèque était sans provision. La réponse à ce problème dans les abris sous-terrain du Hezbollah ne peut être qu’imaginée.

Le mouvement, créé en 1982 à la suite de l’invasion du Liban par Israël, avait construit son prestige dans le monde arabe sur sa parfaite réputation de probité financière et politique. Les dictatures du Moyen-Orient et la direction de troisième rang de l’Autorité palestinienne abritent leurs millions dans des comptes bancaires étrangers, mais pas l’incorruptible Hezbollah ! Du moins, c’est ce que tout le monde croyait, jusqu’à ce que le scandale ait éclaté autour de Salah Ezzedine. Il est actuellement interrogé par la justice libanaise, et serait en détention dans l’ancienne et sombre prison de Roumieh, au nord de Beyrouth.

L’histoire parait familière. Submergé par d’énormes profits dans le secteur pétrolier, Salah Ezzedine - disent des économistes de Beyrouth - a commencé à viser l’épargne de la population chiite du Liban, promettant des retours de 40% d’intérêt sur les placements - grâce à l’argent de nouveaux investisseurs attirés par les retours de son projet. Que Salah Ezzedine ait fait cela en reprenant les calculs d’un Bernard Madoff ou par souci de charité pour répandre sa propre richesse parmi la plus grande communauté du Liban, nous ne le savons pas.

Le Hezbollah - le « Parti de Dieu » en arabe - est resté étrangement silencieux depuis une semaine, une caractéristique inhabituelle pour un mouvement si conscient des effets de la publicité dont les propres millions - expédiés en devises américaines à Beyrouth depuis Téhéran - ont servi à reconstruire des dizaines de villages chiites musulmans détruits par les bombardements israéliens du sud Liban en 2006.

On à a pu voir des membres du Hezbollah distribuant des liasses de billets neufs de cent dollars à des villageois et à des milliers de propriétaires dont les possessions avaient été « réduites en décombres » par les bombardements du quartier Dahiya de Beyrouth. Beaucoup de ces personnes, selon les informations dans les journaux libanais, ont aujourd’hui perdu leur argent suite à la faillite de Salah Ezzedine.

Traditionnellement ignorés par le gouvernement du pays et vivant dans les collines pierreuses du sud du Liban - où souvent pousse le tabac - ainsi que dans la vallée de la Bekaa, des membres de la communauté musulmane chiite avaient émigré en Afrique de l’Ouest, au Brésil et en Hollande et ont fait fortune à l’étranger (en particulier sur le marché du diamant à Anvers).

L’ampleur de leurs transferts d’argent est visible dans plusieurs de leurs villages ancestraux. Des villas d’une richesse que l’on remarque et qui est inconvenante - regorgeant de colonnades de marbre, de piliers grecques et de pelouses soignées - sont installées sur des pentes désolées à parfois seulement quelques mètres de la frontière israélienne.

Bien sûr, il y a une autre raison pour laquelle le Hezbollah a peut-être envie de garder le silence en ce moment. De nombreux musulmans estiment que l’intérêt bancaire est une pratique non islamique, c’est pourquoi les chiites libanais plaçaient leur argent dans des entreprises dirigées par Salah Ezzedine qui avait la réputation d’un homme « pieux » - une option en extra pour tous les amis du Hezbollah - et dont les pèlerinages étaient devenus un élément essentiel au Liban dans cette période précise du calendrier musulman.

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8 septembre 2009 - The Independent - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.independent.co.uk/opinio...
Traduction : Info-palestine.net


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