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Les dialysés de Gaza : des otages politiques

samedi 17 juin 2006 - 17h:44

Defence for Children International / Palestine

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Il y a actuellement 19 enfants astreints à un traitement de dialyse pour des problèmes de rein à l’hôpital principal Al-Shifa dans la ville de Gaza... A cause du manque de matériel médical, les séances de dialyses ont dû être réduites pour tous les malades, de trois fois à deux fois par semaine. Ceci a des implications significatives sur l’état de santé des patients.

Tous les jours de ce mois, les médias internationaux ont déclaré que les salaires de quelques employés de l’Etat palestinien seraient payés de façon imminente. Mais des milliers et des milliers de travailleurs attendent toujours. Plus de 90 jours sont passés depuis les derniers salaires payés, en février ; des jours pendant lesquels les ménages ont dû couper dans leurs dépenses les plus essentielles pour lesquelles ils avaient déjà utilisé leurs maigres économies ; des jours pendant lesquels les familles ont dû se résoudre à vendre des objets personnels auxquels elles tenaient pour trouver de l’argent pour survivre.

En trois mois, parce qu’un gouvernement Hamas élu démocratiquement est venu aux affaires, l’économie palestinienne qui souffrait déjà d’un déficit budgétaire chronique s’est enfoncée de plus en plus dans une crise. Israël bloque des millions de dollars de revenus fiscaux qui appartiennent à l’Autorité palestinienne (AP) pendant que les donateurs étrangers - dont les USA et l’Union européenne - ont suspendu les aides directes au gouvernement.

Des millions de Palestiniens sont touchés par la crise et pas simplement les enseignants, les médecins et la police qui n’ont pas reçu leurs salaires, mais toute les familles et des millions d’autres Palestiniens, usagers de leurs services. Le manque de financement signifiait que l’AP ne serait plus capable de fournir les services de base, et dans tous les territoires palestiniens occupés (TPO), il y a peu de secteurs qui ont été aussi durement touchés que celui de la santé.


Etude de cas : les dialysés de Gaza

Il y a actuellement 19 enfants astreints à un traitement de dialyse pour des problèmes de rein à l’hôpital principal Al-Shifa dans la ville de Gaza. Habituellement, les enfants viennent à l’hôpital pour la dialyse trois fois par semaine ; elle dure de deux à quatre heures chaque fois, ils sont reliés à un dialyseur qui leur prend du sang et le passe dans un système de filtration pour éliminer des toxines avant de le réinjecter dans leur organisme par un tube qui pénètre dans leur bras. En plus de ce traitement, les enfants souffrant d’insuffisances rénales prennent quelquefois cinq types différents de médicaments, notamment des antibiotiques, des prophylactiques, des hormones et d’autres qui protègent les reins, évitent plus de dommages rénaux et préviennent contre un début d’anémie et d’autres complications. Ces médicaments sont habituellement disponibles dans les pharmacies de l’hôpital et gratuits pour les patients souffrant de maladies chroniques.

La dialyse n’est jamais un moment agréable, mais maintenant, c’est encore bien plus difficile pour les jeunes malades d’Al-Shifa et les familles. L’hôpital, sous la responsabilité du ministère de la Santé, n’a plus les fonds pour acheter les médicaments essentiels ou le matériel médical. La pharmacie de l’hôpital est à court de médicaments, notamment ceux nécessaires aux dialysés, aussi celui-ci doit-il rechercher d’autres sources pour les médicaments. Les stocks de filtres, qui coûtent 60 dollars pièce, et de matériels jetables comme les tubes, les aiguilles utiles aux dialyses sont si dangereusement bas que l’hôpital a été contraint de réduire la fréquence des séances de dialyses. D’ailleurs, étant donné que la majorité du personnel médical ne reçoit plus de salaires depuis trois mois, beaucoup ne peuvent plus se permettre de venir travailler et ont choisi de rester à leur domicile pour réduire les dépenses.

Alors que la crise économique s’est profondément installée à Gaza, le coût d’achat des médicaments non subventionnés à des pharmacies extérieures, plus celui du déplacement à l’hôpital, aller et retour, pour recevoir le traitement, augmentent la pression sur les familles qui se battent déjà pour faire face. Pour les patients atteints de maladies chroniques, tels les dialysés, la conséquence de ces restrictions met leur vie en danger.

Depuis le diagnostic il y a six ans, concernant Heba Jihad Al-Najar, elle a reçu un traitement permanent à l’hôpital Al-Shifa, notamment des séances de dialyses trois fois par semaine. Pendant ce temps, la pharmacie de l’hôpital a pu lui assurer tous les soins dont elle avait besoin. Cependant, au cours des mois passés, la situation de l’hôpital est devenue très difficile. « Je ne pouvais pas trouver le médicament à la pharmacie de l’hôpital » dit Heba. « J’ai essayé d’en acheter dans une pharmacie spéciale, en dehors de l’hôpital ».

A cause du manque de matériel médical, les séances de dialyses ont dû être réduites pour tous les malades, de trois fois à deux fois par semaine. Ceci a des implications significatives sur l’état de santé des patients qui souffrent déjà de complications diététiques et de perte sérieuse de poids. Le Dr Ayman Sisi, directeur de l’unité de dialyses à l’hôpital, a prévenu que la réduction de la fréquence des procédures de dialyses est critique pour la vie des enfants souffrant de faiblesse rénale. « Les dialyses sont vitales pour ces malades », dit-il. « Elles remplacent le rôle des reins, si ceux-ci ne reçoivent pas le traitement exigé, les corps des malades seront empoisonnés. »

Héba et beaucoup d’autres enfants sur dialyses à Al-Shifa souffrent de maladies congénitales qui requièrent des hormones supplémentaires chaque mois ; ce qui coûte quelque 2 000 NIS - nouveaux shekels israéliens - (445 dollars ou 352 ?) à chaque fois, en plus de la dialyse. Leur donner du sang peut permettre quelquefois de suppléer les manques d’hormones disponibles de la pharmacie de l’hôpital. Mais les médecins mettent en garde que c’est un procédé non satisfaisant car le sang utilisé peut manquer d’hormones avec comme effets secondaires l’anémie ou une réduction des plaquettes de sang qui sont essentielles pour sa coagulation. Le Dr Sisi avertit qu’une baisse dans les niveaux de plaquettes pourrait être très grave ; « si les niveaux de la plaquette dans le sang tombent très sensiblement, c’est très dangereux et peut menacer sérieusement la vie du malade » ; Heba Jihad Al-Najar indique c’est son cas (*).

Juma’a As’aad Hasab Allah, sous dialyse à Al-Shifa depuis trois ans, parle du fardeau que la situation économique représente pour sa famille. « Il est devenu très difficile de trouver les médicaments, ils sont trop chers, ils coûtent 120 shekels ($ 26,50) et il faut en plus 240 shekels ($ 53 dollars) par mois pour me déplacer à l’hôpital recevoir le traitement. Nous sommes une famille de 10 personnes et seul mon frère aîné travaille. Il gagne 1 110 shekels ($ 243) par mois, mais il n’est plus payé depuis février puisqu’il est employé de l’Autorité (palestinienne). J’ai très peur pour ma santé en raison du manque de médicaments et pour les difficultés économiques que ma famille rencontre car elle doit supporter mes dépenses médicales ».

Pour Mohammad Musa Bahlol, ses problèmes rénaux ont été diagnostiqués en 2003. Il dit que la situation actuelle l’a mis dans une position très difficile avec sa famille. « Il y a un mois, je suis venu à l’hôpital où ils m’ont dit qu’ils n’y avait plus de médicaments disponibles (à la pharmacie de l’hôpital). Je n’ai pas dit à ma famille qu’il n’y en avait plus (et donc qu’ils devaient être achetés ailleurs à un prix supérieur), parce que je m’inquiétais de devenir une charge pour mon père et mon frère à cause d’une situation économique très mauvaise. Mais du fait que je ne recevais pas les médicaments, je fais de l’anémie. Mon compte de plaquettes a baissé sérieusement (*) à cause du manque d’hormones. J’espère que la situation économique et politique va s’arrêter et que bientôt je pourrai continuer mon traitement à l’hôpital. "


La souffrance de Héba, Juma’a et Mohammed, et de centaines d’autres enfants recevant, ou ayant besoin de recevoir, des traitements médicaux à Gaza, cette souffrance peut et doit être soulagée immédiatement. La douleur et le handicap de leur maladie se sont aggravés à cause des man ?uvres du gouvernement israélien et des politiciens étrangers.

Le gel des fonds par les donateurs étrangers et le refus du versement des revenus fiscaux par Israël équivalent à une punition collective, expressément prohibée par la loi internationale, sous la forme de sanctions financières sur le peuple palestinien - une punition imposée sur eux car ils ont exercé leur droit à la démocratie et sur le système politique palestinien car il a respecté le choix du peuple.

Des représentants d’ONG du secteur de la Santé ont rencontré le ministre palestinien de la Santé en mai pour discuter des possibilités d’une plus grande coopération entre le ministère et les ONG pour aider à combler le vide dans les prestations des services. Cependant, il y a un consensus au sein de la communauté des ONG comme quoi elles sont incapables - et non disposées - de se substituer au système de santé public. Si les prestations de services ne peuvent plus être assurées en raison de la pression, alors en vertu de la loi internationale, la responsabilité de leurs fournitures incombe à Israël.

En tant qu’Etat signataire de la Convention des Nations unies sur les Droits de l’enfant, Israël est obligé en vertu de l’article 24 du traité de reconnaître le droit de chaque enfant sous sa juridiction effective « au bénéfice du niveau le plus élevé possible des normes de santé et aux infrastructures pour le traitement des maladies et la guérison. Les Etats signataires doivent s’assurer qu’aucun enfant n’est privé de son droit d’accès à de tels services de santé ».

D’ailleurs, les articles 55 et 56 de la Quatrième Convention de Genève établissent clairement qu’Israël, en tant que puissance occupante, n’a pas seulement le devoir d’assurer l’approvisionnement médical dont ont besoin les hôpitaux des Territoires palestiniens occupés, mais également d’assurer et de maintenir les services des hôpitaux. En tant que parties essentielles à la Convention de Genève, les autres Etats n’ont pas qu’un devoir moral mais aussi une obligation légale de s’assurer qu’Israël respecte ses engagements à l’égard de la population protégée des Territoires occupés.

Le DCI/section Palestine (Defence for Chirldren International) exprime ses profondes inquiétudes sur les conséquences à craindre du fait de l’arrêt partiel ou complet des prestations médicales pour les enfants de Gaza. Il invite la communauté internationale, et Israël en particulier, à cesser immédiatement ces actions qui provoquent inutilement la souffrance sur des parties déjà vulnérables de la population palestinienne.

* - attente de complément d’informations pour la traduction définitive de cette phrase.

8 juin 2006 - Témoignages et photo de DCI/PS.
http://www.dci-pal.org/english/disp...
Traduction : JPP


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