16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Les accusations de crimes de guerre énervent Israël

jeudi 5 février 2009 - 07h:03

Joshua Mitnick

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


Après la guerre de Gaza, Israël prépare sa défense et celle de ses soldats contre les accusations de crimes à craindre devant les tribunaux européens qui disposent de « la compétence universelle ».

JPEG - 19.1 ko
Trois semaines de guerre : la bataille d’Israël contre le Hamas a fait 1 300 Palestiniens tués ; 13 Israéliens ont été tués durant les combats. Ci-dessus, des soldats israéliens à la frontière avec Gaza, le 20 janvier. (Amir Cohen/Reuters)




Il y a trois ans et demi, le général de réserve israélien, Doron Almog, était contraint de quitter la Grande-Bretagne, dès son atterrissage à Londres. Il avait été prévenu qu’un mandat d’arrêt inattendu avait été délivré contre lui par un tribunal de police britannique. Chef d’accusation : crimes de guerre.

Aujourd’hui, et alors que la récente guerre de Gaza suscite nombre d’accusations pour infractions, l’Etat juif et les avocats internationaux pour les droits humains se préparent pour les affaires criminelles potentielles contre les officiers et les dirigeants politiques, en Europe et peut-être même ailleurs.

Mais les affaires devraient venir, non devant les tribunaux internationaux ou le système judicaire israélien, mais essentiellement devant les tribunaux nationaux européens qui ont la possibilité d’amener à comparaître dans le cadre d’une démarche juridique appelée « compétence universelle », laquelle permet de juger des dossiers d’actes abominables, de tortures, ou de crimes de guerre commis à l’extérieur de leurs propres frontières.

Les Israéliens considèrent ces menaces comme faisant partie d’une chasse aux sorcières à caractère politique. Pour les Palestiniens et les militants des droits humains cependant, ces tribunaux nationaux représentent la seule instance où ils peuvent démontrer que des crimes de guerre ont été commis.

« Les systèmes mis en place dans un certain nombre de pays vont être mis à l’épreuve... Nous avons des équipes juridiques qui fonctionnent au sein et au-delà des pays européens pour le compte des plaignants palestiniens contre les crimes de guerre », indique Daniel Machover, avocat britannique né en Israël, qui agit en coordination avec le Centre palestinien pour les droits humains (PCHR) basé à Gaza, et qui a coopéré pour l’arrestation de Mr Almog en 2005. « Il n’y a pas d’autre moyen pour un pays ou un territoire sous occupation d’obtenir justice ».

Mr Machover a également aidé à la présentation, devant un tribunal national espagnol, d’un cas d’attentat israélien contre un chef militaire du Hamas, en 2002. Ce bombardement aurait fait plus d’une dizaine de morts civils dans un quartier de Gaza. Pas plus tard que la semaine dernière, un juge espagnol a annoncé qu’il y aurait une enquête, provoquant des tensions entre Israël et l’Espagne, et incitant Israël à travailler davantage encore la question des crimes de guerre.

Talonné par une série d’accusations allant d’avoir pris pour cibles des sites civils jusqu’à avoir empêché l’évacuation de non combattants, le gouvernement israélien, ces dernières semaines, a réaffirmé son engagement à défendre juridiquement les soldats et les responsables politiques impliqués dans ces affaires. Il a également décidé de tenir secrète l’identité des soldats pour en protéger le plus grand nombre contre les poursuites. (voir cependant : Noms et photos de criminels de guerre israéliens à Gaza)

Selon des responsables palestiniens, plus de 1 300 Gazaouis ont été tués et des milliers d’autres blessés durant les trois semaines d’offensive israélienne contre le Hamas, le mois dernier. Le nombre de non combattants compris dans ces chiffres est contesté. Et seuls 13 Israéliens ont été tués, la plupart étant des soldats.

En commençant son intervention aux Nations-Unies, l’ambassadrice US, Susan Rice, a appelé Israël à enquêter sur le comportement de son armée dans la récente guerre de Gaza et elle a porté des accusations contre le Hamas pour avoir tiré des roquettes sur les villes israéliennes et fonctionné à partir de sites civils.

Une enquête israélienne est peu probable étant donné que la plupart des Israéliens sont convaincus que l’armée israélienne a fait de son mieux pour limiter les blessés chez les civils. Selon Israël et les USA, Hamas aurait violé la loi internationale en tirant les roquettes sur des villes et agglomérations et en utilisant comme bases des sites civils palestiniens.

Paradoxalement, Israël est l’un des premiers pays à avoir invoqué le principe de la compétence universelle quand son système judiciaire s’est déclaré fondé à juger le chef nazi Adolf Eichmann pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre durant la Deuxième Guerre mondiale.

Ni Israël ni les Palestiniens, cependant, ne sont parties au traité qui a institué la Cour pénale internationale de La Haye et de ce fait, il est difficile de monter un dossier pour crimes de guerre devant cette instance. Aussi, les plaintes juridiques contre le comportement israélien ont été déposées devant des tribunaux nationaux en Europe et non devant les tribunaux internationaux.

Un juriste israélien a exclu que les tentatives de procès pour crimes de guerre à l’étranger seraient un prolongement de la « guerre médiatique » contre l’Etat juif pour son opération contre Gaza. Daniel Reisner, ancien chef de la division internationale de l’armée israélienne, a déclaré que la compétence universelle était utilisée seulement pour accuser Israël, pas le Hamas. « Le danger maintenant pour Israël, ce sont ces pays qui possèdent une compétence extraterritoriale sans condition de nationalité. » dit Mr Reisner. «  La question est de savoir s’ils représentent un danger majeur ou mineur. »

Un tribunal belge avait examiné en 2001 une accusation contre l’ancien Premier ministre israélien, Ariel Sharon, pour son rôle dans les massacres allégués durant l’invasion du Liban en 1982.

Mais une application large de la compétence universelle par des tiers tribunaux nationaux, sans lien avec les auteurs ou les victimes présumés de crimes de guerre, est une évolution relativement récente et selon certains juristes européens, elle doit encore faire ses preuves.

L’avocat belge Michael Verhaeghe avait déposé plainte contre Mr Sharon - un acte juridique qui a réveillé les Israéliens face aux menaces de poursuites pour crimes de guerre devant les tribunaux européens. Il avait finalement convaincu la Cour suprême belge de se déclarer compétente, en se basant sur un texte de loi national de 1993, mais la législation fut par la suite abrogée par le parlement belge.

Selon lui, le nombre d’Etats en Europe et ailleurs qui disposent de la compétence universelle nécessaire pour juger, dans leurs tribunaux, des crimes de guerre commis par des combattants dans des guerres extérieures, diminue. Et pourtant, Mr Verhaeghe pense qu’il n’est pas possible que les soldats israéliens, s’ils ont commis des crimes de guerre, « puissent se sentir intouchables et en sécurité comme auparavant. »

Aucun des dossiers n’est allé à procès.

Le 29 janvier dernier néanmoins, un juge d’un tribunal national d’Espagne, a ordonné une enquête sur les actes commis par Israël dans un attentat contre un membre du Hamas, Salah Shehadeh, en 2002, où 14 autres Palestiniens ont trouvé la mort, dont 9 enfants.

Le ministère de l’Infrastructure nationale israélien, Binyamin Ben Eliezer, alors ministre de la Défense et qui est l’un des sept suspects nommés dans l’enquête, a déclaré que la décision du tribunal était « scandaleuse ».

« Les organisations terroristes... se servent de systèmes mis en place par des Etats démocratiques pour intenter des procès contre un pays qui combat le terrorisme, » dit-il.

Tel Aviv, le 4 février 2009 - The Christian Science Monitor - traduction : JPP


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.