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Qui empêchera Israël de se perdre ?

mercredi 14 janvier 2009 - 20h:02

Mark LeVine - The Electronic Intifada

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L’une après l’autre les justifications données par Israël pour sa dernière guerre à Gaza se défont.

Dire que cette guerre est purement défensive et n’a été lancée qu’après la rupture par le Hamas du cessez-le-feu de six mois est un argument qui a été contesté, non seulement par des observateurs avertis tels que Jimmy Carter, l’ancien Président des Etats-Unis qui a contribué à faciliter la trêve, mais également par les centres de réflexion israéliens de centre-droite.

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Les justifications données par le gouvernement israélien sont passées au crible [GALLO/GETTY]

Le Centre d’information sur le renseignement et le terrorisme, dont le rapport du 31 décembre intitulé "Six Months of the Lull Arrangement Intelligence, (rapport sur l’accord d’accalmie de six mois) a confirmé que la trêve du 19 juin n’a été que sporadiquement rompue et non pas du fait du Hamas mais plutôt par ... « des groupes terroristes voyous ».

C’est plutôt après qu’Israël eut assassiné sans provocation six membres du Hamas le 4 novembre que se produisirent l’escalade et l’érosion de l’accord d’accalmie et le lendemain, Israël a intensifié le siège de la Bande.

Selon une étude menée conjointement par l’Université de Tel-Aviv et l’Université européenne, ces actions s’inscrivent dans un contexte plus large de la violence israélienne qui a mis fin à 79 pour cent de toutes les accalmies depuis le début de la deuxième intifada, alors que le Hamas et les autres factions palestiniennes ne sont responsables que pour 8 pour cent de ces ruptures.

Effectivement, le ministère israélien des affaires étrangères semble se rendre compte que cet argument perd de sa crédibilité.

Pendant une conférence téléphonique connectant une demi douzaine de professeurs pro-israéliens jeudi dernier, Asaf Shariv, consul général d’Israël à New York, s’est concentré davantage sur le réseau complexe de tunnels reliant Gaza au Sinaï.

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Inspection des dommages après une frappe aérienne qui a touché une mosquée [GALLO/GETTY]

Il a prétendu que ces tunnels étaient aussi ?grands que les tunnels Holland et Lincoln » à preuve que des lions et des singes avaient pénétré à Gaza via ces tunnels. En fait, les lions étaient deux lionceaux qui avaient été drogués, jetés dans un sac et traînés par un tunnel à destination d’un zoo privé.

L’image de soi israélienne

L’affirmation selon laquelle le Hamas n’acceptera jamais l’existence d’Israël s’est révélée tout aussi fallacieuse, les dirigeants du Hamas ayant expressément annoncé une telle intention dans les pages du Los Angeles Times, volonté qu’ils confirment à tout dirigeant international ou journaliste qui acceptent de les rencontrer.

Chaque fois qu’une nouvelle famille de 10, 20 ou 30 personnes est ensevelie sous les gravats d’un bâtiment à Gaza, s’effondre l’argument selon lequel les forces israéliennes ont fait tout leur possible pour diminuer les pertes civiles - pendant longtemps pièce maîtresse de l’image d’une démocratie israélienne éclairée et morale .

Quiconque a une connexion internet peut rechercher avec google la « catastrophe humanitaire à Gaza » ainsi que les documents du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (BCAH) de l’ONU. Il lira des centaines de pages de preuves documentant la réalité des combats actuels et le siège de longue durée qui les a précédés.

La Croix-Rouge, qui se garde normalement de critiquer les parties à un conflit, a sévèrement condamné Israël pour avoir empêché le personnel médical de se porter au secours de blessés palestiniens, dont certains sont restés bloqués pendant des jours, mourant lentement de faim dans les décombres de Gaza au milieu de leurs proches décédés.

Entretemps, les Nations unies ont carrément nié les assertions israéliennes, selon lesquelles des combattants palestiniens utilisaient, pour lancer leurs attaques, le complexe scolaire de l’UNWRA bombardé le 6 janvier dans lequel quarante civils sont morts ;l’ONU a sommé Israël de prouver le contraire.

Crimes de guerre avoués

En outre,on considère à juste titre comme aveu de crimes de guerre, nombre de remarques faites par d’importants politiciens et généraux israéliens, notamment Tzipi Livni, la ministre des affaires étrangères, refusant de faire la distinction entre les civils (personnes ou institutions) et les combattants en disant « le Hamas ne fait pas la distinction ... pourquoi la ferions-nous ? ».

Si on examine les déclarations faites par les responsables militaires israéliens avant l’invasion, il est évident qu’ils avaient bien décidé de viser l’infrastructure civile de Gaza et avec elle, les civils.

Ci-après un passage d’une interview du Général-Major Gadi Eisenkot - publiée en octobre dans le quotidien israélien Yedioth Ahronoth - dans lequel il dit :

« Nous déploierons une puissance disproportionnée contre chaque village depuis lequel des tirs auront visé Israël, et nous causerons des dommages et des destructions énormes. Dans notre chef, ces [villages] sont des bases militaires ».

« Ce n’est pas une suggestion. C’est un plan qui a déjà été approuvé ».

Le droit international interdit absolument d’infliger des « dommages et des destructions énormes » de même que de traiter des villages entiers comme des « bases militaires ».

Avec sa description du plan et vu ce qui se passe actuellement à Gaza, Eisenkot admet à l’évidence qu’il y a eu conspiration et intention de commettre des crimes de guerre, et si on l’ajoute aux commentaires ci-dessus et à beaucoup d’autres, on ne peut pas croire qu’Israël ait essayé de protéger les civils et ne met pas en ?uvre une force disproportionnée.

...

Violence-puissance

Qui empêchera Israël de se perdre ?
Les Israéliens en sont, à l’évidence, incapables. Leur addiction à l’illusion que violence égale puissance a atteint des niveaux de maladie mentale collective.

Comme l’a dit le journaliste de Haaretz, Yossi Melman, le 10 janvier, « Israël s’est créé l’image d’un fou qui a perdu la boule ».

Ce ne sont pas les Palestiniens dont beaucoup sont dans le même état.

Ni le Quartette pour le Moyen-Orient, l’Union européenne, les Nations unies ou la Ligue Arabe, tous totalement impuissants à influencer la politique israélienne.

Ni le leadership juif organisé aux USA et en Europe, encore plus aveugle à ce qui se passe que la plupart des Israéliens, lesquels se permettent au moins de débattre de la sagesse des politiques de leur gouvernement.

Ni la communauté juive progressiste en expansion, à qui il faudra des années pour acquérir suffisamment de puissance sociale et politique avant de pouvoir contester le statu quo.

Et ni les politiciens, ni les hommes politiques étasuniens de premier range qui soit, ne veulent pas s’aliéner les électeurs juifs étasuniens, soit ont subi un tel lavage de cerveau sous l’effet de la propagande inlassable diffusée par le lobby israélien qu’ils sont incapables de se faire une idée indépendante du conflit.

Pendant la course à la présidence étasunienne, on s’est moqué de la dimension messianique de Barack Obama. L’idée n’est plus tellement drôle à présent. Il est difficile d’imaginer que quelqu’un moins important que lui sauve Israël, les Palestiniens et le monde de quatre nouvelles années de violence stupide.

Mark LeVine est professeur d’histoire du Moyen Orient à l’Univesité de Californie. Il est l’auteur de Heavy Metal Islam : Rock, Resistance, and the Struggle for the Soul of Islam et de “ An Impossible Peace : Israel/Palestine Since 1989 » qui sera publié prochainement. .

L’article a été publié dans sa totalité ici :

http://english.aljazeera.net/focus/...

Traduction : Anne-Marie Goossens


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