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Evo Morales en état de légitime défense - Le grand écart de la politique US

dimanche 14 septembre 2008 - 08h:47

K. Selim - K Habib/Le Quotidien d’Oran

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Evo Morales, la veille de la commémoration du 11 septembre, celui du coup d’Etat de Pinochet contre Salvador Allende, organisé avec le soutien de la CIA et de la Maison-Blanche, a déclaré l’ambassadeur américain persona non grata.

Evo Morales en état de légitime défense

par K. Selim

En Bolivie, le président Evo Morales, élu démocratiquement et conforté par les électeurs dans un référendum où il remettait en jeu son mandat, est empêché d’appliquer son programme. La droite bolivienne et ses puissants relais étrangers ne lui pardonnent pas la nationalisation du gaz et la réforme agraire. Il a été - confortablement - élu sur la base de ce programme par la majorité de la population, mais c’est une majorité de pauvres, et apparemment ces électeurs comptent peu. Et ils comptent encore moins quand il s’agit d’Indiens pauvres.

Les Etats-Unis défendent la démocratie dans les pays qu’ils n’aiment pas, en Iran ou en Corée par exemple ; ils y sont hostiles dans une Bolivie où les urnes ont donné le pouvoir à un militant indien. De manière ostentatoire, l’ambassadeur américain, Phillip Goldberg, a rencontré le préfet de Santa Cruz, la région qui renferme les plus grandes richesses gazières. Simple visite de courtoisie ? Non, le préfet de Santa Cruz, Ruben Costas, est le chef de file d’une entreprise de sédition menée au nom d’une stratégie sécessionniste. Son but est clairement de soustraire les richesses gazières, que Morales a eu l’outrecuidance de nationaliser, au pouvoir central et donc au pays. Le tout sur fond de racisme anti-indien. La féodalité bolivienne, essentiellement d’origine européenne, ne supporte pas l’émergence politique des Indiens pauvres. Evo Morales, la veille de la commémoration du 11 septembre, celui du coup d’Etat de Pinochet contre Salvador Allende, organisé avec le soutien de la CIA et de la Maison-Blanche, a déclaré l’ambassadeur américain persona non grata. Bien entendu, à Washington, la bureaucratie d’empire s’indigne. Les centres de pouvoir n’ont pas admis le choix démocratique de la majorité des Boliviens et encouragent en sous-main certaines provinces, les plus riches, dans une entreprise de division du pays. Depuis le renvoi de l’ambassadeur américain, les partisans de la sédition sont passés à l’action violente en tuant plusieurs paysans indiens acquis à Evo Morales.

Le président bolivien n’a pas tort de parler de « coup d’Etat civil » en cours de déploiement. Il est patent que sont progressivement réunies les conditions d’une guerre civile propice à la fabrication d’un Biafra ou d’un Kosovo en Bolivie. «  Celui qui cherche la division de la Bolivie, c’est l’ambassadeur des Etats-Unis », avait accusé Evo Morales. Le président bolivien, estiment beaucoup d’observateurs, a fait preuve de naïveté démocratique en décidant que les préfets seraient élus et non désignés par l’Etat. Or, certains de ces préfets, dans les régions les plus riches du pays, s’inscrivent, avec l’appui de l’extérieur, dans des logiques de sécession. Violences, manipulations, obstruction..., Evo Morales ne verse certainement pas dans la paranoïa en observant la répétition de tous les éléments qui ont mené au coup d’Etat du 11 septembre au Chili. Dans un tel contexte, les manoeuvres de l’ambassadeur américain sont loin d’être anodines. Rendre visite au préfet qui organise ouvertement la guerre de sécession et qui envoie des nervis racistes s’attaquer aux paysans indiens et aux services publics, est bien ce qu’il paraît : un soutien clair et direct à des aventuriers qui menacent l’unité nationale. Le gaz bolivien fait décidément saliver au point que l’on semble tranquillement envisager un Kosovo bolivien. Car c’est bien une tentative de démantèlement d’un pays à laquelle fait face un président à l’incontestable assise démocratique. Morales, président légitime et représentatif de son peuple, est fondé à agir et à s’opposer à un nouveau coup d’Etat. Accepter les immixtions grossières d’un ambassadeur en mission de déstabilisation ne serait plus seulement de la candeur diplomatique, ce serait un coup porté aux aspirations des plus larges secteurs de la population bolivienne. Le président Morales l’a visiblement compris et a agi en conséquence.

Le Quotidien d’Oran - Edito

Du même auteur :

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Le grand écart de la politique US

par Kharroubi Habib

La tension est montée entre les Etats-Unis et la Bolivie soutenue par son voisin, le Venezuela. Ces deux derniers pays ont pris la décision d’expulser les ambassadeurs américains en poste dans leurs capitales. En réaction, Washington en a fait de même à l’égard de leurs représentants diplomatiques. La toile de fond de cette détérioration des rapports entre Washington d’une part et La Paz et Caracas de l’autre en est l’état insurrectionnel qui prévaut en Bolivie, où de violentes manifestations ont éclaté dans les provinces du nord du pays à l’instigation de leurs gouverneurs qui, opposés à la politique du président Evo Morales, revendiquent le droit à « une autonomie » qui n’exclut pas le « droit de faire sécession » du reste de la Bolivie.

Non sans raison, Morales accuse les Etats-Unis d’être impliqués dans les événements qui secouent son pays et menacent son unité nationale. Le président vénézuélien Hugo Chavez les accuse lui de fomenter un complot contre lui. Les relations entre les trois capitales américaines sont tendues depuis les arrivées au pouvoir de Chavez au Venezuela et de Morales en Bolivie. Et de fait, Washington s’est rangé ouvertement aux côtés de leurs oppositions nationales respectives, en les encourageant ostensiblement à provoquer la chute de ces deux dirigeants « coupables » de prôner et de poursuivre des politiques antinéolibérales et remettant en cause l’hégémonie des Etats-Unis s’exerçant sur l’Amérique du Sud.

Dans le cas de la Bolivie, les Etats-Unis sont en totale contradiction avec le principe dont ils veulent imposer le respect à la Russie dans la crise du Caucase. Celui de l’unité de la Géorgie confrontée aux séparatismes des régions Abkhazie et Ossétie du Sud. Dans le premier cas, Washington a pris fait et cause pour le gouvernement géorgien présidé par Mikheïl Saakachvili et ne reconnaît aucune justification aux raisons qui ont donné naissance aux mouvements séparatistes. Dans le second, ils jettent le feu sur les braises de la tentation séparatiste qui se manifeste en Bolivie en réaction à la volonté d’Evo Morales de refondre par voie constitutionnelle l’organisation et le fonctionnement de la république bolivienne dans un sens moins marginalisant pour ses compatriotes d’origine indienne.

Ce grand écart dans la position américaine, selon qu’il s’agit de la Géorgie ou de la Bolivie, confirme si besoin était que Washington n’intervient pas dans le monde pour défendre des causes en se basant sur des principes immuables et valables quelle que soit la région où ils le font. Quel argument autre que celui de « zone réservée » Washington opposera-t-il à la Russie de Medvedev si celle-ci décide à son tour de soutenir activement le président bolivien Evo Morales et l’unité de son pays ?

En tout cas, le regain de tension qui affecte les relations des Etats-Unis avec la Bolivie et le Venezuela démontre qu’il n’y pas que la Russie à avoir des prétentions impériales. L’Amérique est prête à bafouer tous les dogmes de démocratie et de liberté des peuples pour maintenir son empire dont l’Amérique du Sud a de tout temps fait partie.

Le Quotidien d’Oran - Analyse

De ce même auteur :

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14 septembre 2008 - Le Quotidien d’Oran


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