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Le spectre des guerres civiles au Proche-Orient

dimanche 7 janvier 2007 - 17h:06

Emad Awad

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Au seuil de l’année 2007, les mises en garde se sont succédé contre une prolifération éventuelle des guerres civiles au Proche-Orient.

Trois endroits à haut risque ont été désignés : l’Iraq, le Liban et les territoires palestiniens. Ces signaux d’alarme sont-il justifiés ? Afin de pouvoir cerner le problème, il serait opportun de préciser que le terme « guerre civile » est employé pour définir un état de guerre qui se déroule sur les territoires d’un pays, mettant aux prises une partie de la population avec une autre. Chacun voit dans son ennemi, et même en celui qui voudrait rester neutre, un traître avec lequel il n’est plus possible de cohabiter. Partant, l’unique issue envisagée n’est, hélas, autre chose que l’anéantissement de l’autre et de ses alliés réels ou potentiels. A partir de cette définition, il serait justifié d’évoquer la présence du spectre de la guerre civile dans les foyers précités. En effet, les données sur le terrain témoignent de l’existence d’une tension accrue susceptible de dégénérer subitement en confrontation déclarée. Le fait que ces foyers soient liés par la proximité géographique d’une part et sujets à des interférences extérieures, d’autre part, amplifie le danger et évoque le pire, à savoir l’embrassement de la région.

Parmi les trois cas, celui de l’Iraq est le plus tangible. Des affrontements internes ont eu lieu avec un rythme soutenu, voire accéléré. Le Pentagone n’avait-il pas estimé, début septembre 2006, que les conditions d’une guerre civile existaient déjà dans ce pays au moment même où « l’insurrection » proprement dite, dirigée contre l’occupation, était passée au second plan ? Bien que des initiatives aient été entreprises pour endiguer ce danger, telles que la signature en octobre du Document de La Mecque entre des religieux chiites et sunnites, force est de constater que l’effusion du sang entre les deux confessions musulmanes allait croissant. Ainsi, on peut comprendre, en partie, la portée des déclarations de M. Abdelaziz El Hakim, chef du Conseil Suprême pour la Révolution Islamique en Iraq (CSRII), après s’être entretenu avec le maître de la Maison Blanche le 6 décembre dernier. Il insistait sur le fait que « l’éradication de la menace d’une guerre civile ne peut être obtenue qu’en dirigeant des frappes déterminées contre les terroristes bassistes et les extrémistes sunnites du type Al-Qaëda ». Au-delà des déclarations, il est patent que la situation sur le terrain ne cesse d’empirer, ce qui explique le pessimisme du secrétaire général sortant de l’Onu Kofi Annan lorsqu’il a déclaré, devant le Conseil de sécurité, que la perspective d’une guerre civile tous azimuts et même d’un conflit régional est devenue beaucoup plus réelle en Iraq.

Quant au Liban, il semble prendre un tournant dangereux. En effet, depuis la fin des confrontations militaires entre le Hezbollah et Israël l’été dernier, les signes d’une polarisation politique ne manquaient pas. S’il est vrai que l’opposition, coiffée par le cheikh Nasrallah et le général Aoun, a réussi à contourner toute tentative d’évoquer un conflit de nature « confessionnelle », la crise ne demeure pas moins explosive. Des informations faisaient état des efforts visant à armer les « milices » de tous bords, tandis que le dialogue entre les protagonistes s’est transformé en un dialogue de sourds. Dans ce contexte, le fait que la médiation menée par le secrétaire général de la Ligue des Etats arabes, Amr Moussa, durant le mois de décembre n’ait pas débouché sur une formule acceptable et acceptée par les parties concernées ouvre la voie à une évolution négative de la crise. Mais au-delà des évolutions internes, serait-il possible de neutraliser les interventions « obscures » qui viseraient à allumer l’étincelle fatale ? Les territoires palestiniens, eux, franchissent le seuil de l’année 2007 avec la douleur, l’étranglement et la division.

Or, les trois cas évoqués ne peuvent être séparés du contexte de tension générale qui plane sur la région. En arrière-plan, nous trouvons la confrontation entre les Etats-Unis, soutenus par l’Occident, et l’Iran. Il ne s’agit pas uniquement de son dossier nucléaire mais également de ses orientations régionales. Au Liban, Téhéran est accusé d’avoir armé et soutenu le Hezbollah. En Iraq, il est soupçonné d’avoir créé « un Etat chiite dans l’Etat iraqien ». Enfin, l’Iran est accusé d’avoir accordé un soutien politique, financier et militaire au mouvement de résistance islamique, le Hamas, dans sa lutte de pouvoir avec le Fatah. La situation est plus qu’alarmante. La proximité géographique entre les trois points chauds ainsi que les interférences régionales et internationales pourraient compliquer davantage le tableau. Partant, c’est l’avenir de la région tout entière qui se joue au seuil de cette année.

Emad Awad est politologue. Semaine du 3 au 9 janvier 2007, numéro 643 (Opinion)
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