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Le circuit de "Briser le Silence" à Hébron gravement perturbé

samedi 19 juillet 2008 - 07h:40

Anne Paq - The Electronic Intifada

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Les résidents palestiniens sont devenus les fantômes de Hébron à cause de quelques centaines de colons israéliens qui terrorisent la population locale depuis des années...

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Les colons ont fait de la vieile ville de Hébron une ville fantôme.




Le 27 juin, je participai à l’une des visites de la ville de Hébron et de ses colonies, en Cisjordanie, visites organisées par Briser le Silence. Briser le Silence est un groupe constitué de soldats et de vétérans de l’armée israélienne qui veulent faire connaître l’injustice de l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza.

Une fois encore, le parcours a été perturbé par les colons.
Avant le départ, l’organisateur, Yehuda Shaul - l’un des fondateurs de Briser le Silence, et ancien soldat israélien qui a servi 14 mois à Hébron -, nous avait prévenu que le parcours pourrait ne pas se dérouler comme prévu. Lors du circuit précédent à Hébron, le 17 juin, les colons israéliens avaient attaqué le groupe, lancé sur lui un liquide bouillant, blessant un photographe espagnol. Néanmoins, Yehuda nous avait demandé de ne pas répondre aux provocations des colons, quoi qu’il puisse se passer.

Au premier arrêt, dans la colonie de Kiryat Arba, proche de Hébron, un groupe de colons comprenant des enfants attendait l’arrivée de notre car. Dès que nous sommes descendus, ils nous ont aussitôt entourés et ont commencé à crier et à empêcher Yehuda de se bouger et de parler à propos de la colonie. La police israélienne est intervenue mais a laissé les colons continuer à perturber le groupe.

L’un des colons s’est mis à parler dans un haut-parleur en faisant tant de bruit qu’il était devenu impossible d’entendre Yehuda. Le groupe a été également empêché de se rendre sur la tombe de Baruch Goldstein, ce colon israélien né aux Etats-Unis qui a assassiné 29 Palestiniens et en a blessé beaucoup plus alors qu’ils priaient, en attaquant la mosquée Ibrahimi à Hébron en 1994. Pour de nombreux colons, il est un héros et sa pierre tombale qui célèbre le massacre est devenue un lieu de pèlerinage.

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Les colons balancent leurs déchets au-dessus des ruelles où vivent les Palestiniens.

Une fois le groupe revenu au car pour aller à la vieille ville de Hébron, les colons se sont assis sur la route, face au car, pour l’empêcher de partir. Ils ont ouvertement perturbé l’ordre public et la police qui se tenait tout près n’avait aucune intention de leur infliger une amende ni d’intervenir pour laisser le groupe continuer sa tournée. A Hébron, il semble qu’aucune loi n’oblige les colons à respecter l’ordre, malgré le nombre impressionnant de soldats et de policiers présents dans les rues, bien plus nombreux que les colons.

Les 700 colons juifs de la vieille ville sont réputés pour leurs man ?uvres d’intimidation et leurs harcèlements violents, pas seulement à l’égard des 150 000 Palestiniens qui vivent à Hébron - ce qui a eu comme résultat de faire de la cité, en partie, une ville fantôme, une majorité des entreprises palestiniennes ayant été obligées de fermer et une majorité de familles de partir - mais aussi à l’égard des visiteurs, tant israéliens qu’internationaux.

Après environ une heure de discussions avec la police israélienne, le car a pu finalement passer la porte de Kiryat Araba et se rendre dans la vieille ville de Hébron. Nous sommes arrivés au Tombeau des Patriarches, lieu saint à la fois pour les juifs et pour les musulmans, où nous avons retrouvé le même groupe de colons qui nous attendaient. Ils se sont servi de barrières pour essayer de nous empêcher de descendre du car, puis ils ont couru aux toilettes pour les fermer quand ils ont vu que certains parmi nous voulaient les utiliser. Ils nous ont insultés, nous traitant de « nazis » ou de « traîtres ».

Les participants au circuit qui filmaient ou prenaient des photos ont été harcelés et il était devenu impossible de prendre des films et photos sur ce qui se passait. La police a fait une tentative plutôt timide pour déloger les colons de la route, sans succès. Elle a alors demandé que notre groupe retourne à son car et elle a fait partir les colons qui dansaient et se réjouissaient d’avoir bloqué le circuit de Briser le Silence à Hébron.

Yehuda nous a assuré que d’autres circuits seraient prévus et que si l’intérêt du voyage était de montrer au public la réalité brutale de ce qui se passait à Hébron, alors c’est ce que ferait Briser le Silence. Cela permet à certains d’ouvrir les yeux, non seulement à de nombreux visiteurs étrangers mais aussi à quelques Israéliens qui veulent connaître l’autre version de l’histoire pour comprendre la gravité de la situation dans la ville de Hébron.

Pour beaucoup, le plus inquiétant est que les Palestiniens de Hébron ont été à peine aperçus au cours de la visite. Les résidents palestiniens sont devenus les fantômes de Hébron à cause de quelques centaines de colons israéliens qui terrorisent la population locale depuis des années et l’ont obligée à quitter la cité palestinienne autrefois pleine de vie. Les quelques Palestiniens qui restent dans la vieille ville vivent constamment sous la peur.

Comme Yehuda l’indique dans son introduction « Ce que vous verrez à Hébron est un laboratoire ». S’il veut dire que Hébron est un modèle pour poursuivre la colonisation illégale de la terre, alors elle se fait au détriment des Palestiniens qui vivent ici depuis des centaines d’années et qui sont contraints de quitter leur patrie. Espérons que l’avenir lui prouvera qu’il a tort car aussi longtemps que les colons continueront d’occuper la terre palestinienne et que les colons seront libres de terroriser la population locale, il ne pourra y avoir de paix en Israël/Palestine, aucune solution, ni aucun avenir pour les Palestiniens, en dehors de devenir des fantômes dans leur propre patrie.

Diaporama d’Anne Paq

Anne Paq est photographe freelance et membre du collectif Actvestills - Accès à son site.

Anne Paq : « J’utilise les images d’une manière engagée. Les mots deviennent parfois vides de sens. J’espère alors que mes photos contribueront à une meilleure compréhension de la situation et permettront de souligner que derrière des concepts juridiques et des politiques trop abstraits, il y a avant tout des personnes qui attendent, qui souffrent et qui espèrent. »

Anne Paq écrit depuis Hébron, en Cisjordanie occupée
Live From Palestine - 14 juillet 2008 - The Electronic Intifada - Traduction : Info-Palestine.net


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