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Agriculteurs sous occupation

dimanche 13 juillet 2008 - 07h:27

Josh Jones - Palestine Monitor

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Je ne veux pas me venger. Tout ce que je veux, ce sont mes droits, en tant qu’être humain.

Les enfants de cette vallée sont exposés en permanence aux risques des exercices de tirs à balles réelles exécutés par l’armée israélienne dans la zone. Leur mère (ci-contre) nous dit comment les soldats font sauter des explosifs de toutes sortes, depuis des bombes à agents chimiques à des grenades assourdissantes, sur les collines qui entourent leur ferme. Le terrain qu’ils laissent derrière eux est alors plein de dangers car beaucoup d’engins restent là sans avoir explosé.

C’est progressivement que nous nous sommes habitués à la gentillesse et à l’hospitalité de cette famille qui vit dans la région de Tubas [au nord-est de la Cisjordanie, en limite de la vallée du Jourdain], au cours de notre séjour en Palestine. Nous sommes une délégation du groupe de solidarité Tubas-Brighton et nous faisons un court mais intense passage dans la vallée du Jourdain, en Cisjordanie. Dans cet article, nous nous concentrons sur la vie de quelques-uns de ces fermiers, Bédouins et autres, que nous avons rencontrés durant ce bref séjour.

Cette famille d’agriculteur vit dans un petit groupe de tentes, pas loin de Tubas. Comme les autres Bédouins, elle se voit refuser l’accès à toute source d’eau du secteur et elle est obligée de se déplacer loin pour pouvoir acheter de l’eau. Pourtant, sa plus grande difficulté réside assurément dans la présence de cette base militaire israélienne, à environ un mille des tentes. Ces dernières années, l’armée a creusé d’immenses tranchées à travers la plaine que le peuple bédouin cultive, et elle utilise cette zone pour faire des exercices de tirs et de chars. J’ai parlé avec une femme de la ferme d’à côté qui a reçu une balle dans la tête alors qu’elle faisait sa récolte dans son champ. Elle a pu survivre avec 15 poins de suture.

Je demande à la grand-mère de la famille qui nous reçoit s’ils ont des problèmes avec les militaires. « Ils viennent la nuit, répond-elle, et ils nous crient de quitter les tentes. » J’étais stupéfait. « Pourquoi ? », « Ils disent qu’ils veulent que l’endroit soit "propre" ». « En pleine nuit, ils rentrent dans Hummers et encerclent les tentes, nous criant de sortir. Nous réveillons les enfants qui, bien entendu, se mettent à pleurer. Puis, nous restons dehors à attendre, sous la menace de leurs armes, quelquefois pendant une demi-heure, pendant qu’ils fouillent nos tentes ».

Notre conversation se poursuit. Je lui dit alors que j’ai parlé avec la femme de la ferme d’à côté qui a reçu une balle dans la tête. Sa famille à elle a-t-elle aussi été touchée ? « Les balles sifflaient au-dessus de nos têtes, répond-elle, mais jusqu’ici, Dieu a été gentil avec nous ».

Ces agriculteurs vivent ici depuis des générations, mais si une partie quelconque de leur terre reste « non cultivée » pendant plus de 2 ans, elle devient propriété israélienne d’après la loi israélienne. On a du mal à imaginer comment ces familles arrivent à survivre dans les conditions difficiles où elles sont placées, mais jusqu’à présent, elles sont restées sur leur terre, en dépit des exercices de tirs à balles réelles et des immenses tranchées.

Un homme du village de Frush Beit Dajan se tient debout devant la bâtisse en briques de boue que lui et sa famille sont obligés d’habiter depuis que leur maison a été démolie. Après avoir détruit leur maison, les services civils israéliens ont interdit à la famille de faire la moindre réparation sur les bâtiments de la ferme délabrée dans laquelle ils vivent actuellement.

Frush Beit Dajan est un petit village pittoresque de fermiers, niché dans un grand creux près de la vallée du Jourdain. Nous sommes arrivés un peu plus tôt et nous discutons avec des agriculteurs jusque tard dans la soirée, buvant plus de thé et de cafés que je croyais possible d’en boire.

Le père de cette famille nous dit comment l’un de ses fils, âgé de 5 ans, a récemment été mordu par un serpent venimeux pendant son sommeil. Le serpent était entré par l’un des nombreux trous du bâtiment en ruine. Le père a essayé de le conduire au service des urgences de l’hôpital le plus proche, mais il a été bloqué à un check-point par l’armée et obligé de rentrer chez lui. Son fils est mort plus tard, dans la nuit.

Je n’arrive pas à imaginer comment l’on peut garder toute sa gentillesse et son humanité après de tels incidents. Alors que nous prenons du thé à la menthe, le père me dit qu’il ne voulait pas se venger. « Tout ce que je veux, dit-il, ce sont mes droits, en tant qu’être humain. »


Josh Jones est photographe indépendant au Royaume-Uni.
Son site : http://picasaweb.google.com/Joshua.C.J
Son mel : joshua.c.j@gmail.com.

7 juillet 2008 - Palestine Monitor - photos Josh Jones - Traduction : JPP


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