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Iran : L’idiome des missiles

jeudi 10 juillet 2008 - 15h:33

M. Saâdoune - Le Quotidien d’Oran

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Au-delà de la démonstration des capacités des militaires iraniens, il est clair qu’il s’agit d’une sorte de réponse du berger à la bergère après les manoeuvres aériennes massives de l’armée israélienne en Méditerranée...

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Tir le 9 juillet 2008 (AFP)

Les récents essais de fusées par l’armée des Gardiens de la révolution iranienne ont suscité naturellement l’émoi des Occidentaux, et en premier lieu des Américains, qui voient dans l’exercice une infraction aux décisions du Conseil de sécurité. Les missiles testés par l’Iran constituent des versions modernisées d’engins balistiques d’une portée allant jusqu’à deux mille kilomètres. Ce pays est capable depuis plusieurs années de déployer des centaines, probablement plusieurs milliers de fusées Shehab 3 à longue portée.

Selon les responsables des Gardiens de la révolution, la nouvelle version des Shehab 3, d’une capacité inchangée de charge d’une tonne d’explosifs classiques, consiste dans le mirvage des ogives, c’est-à-dire la possibilité de fragmenter la charge en plusieurs unités distinctes. Il s’agit d’une évolution technique notable, en ce sens qu’elle autorise la multiplicité et la simultanéité des frappes sur un objectif unique ou sur plusieurs objectifs.

Mais au-delà de la démonstration des capacités des militaires iraniens, il est clair qu’il s’agit d’une sorte de réponse du berger à la bergère après les manoeuvres aériennes massives de l’armée israélienne en Méditerranée, les Iraniens démontrant de la sorte qu’ils disposent de capacités de riposte qu’il convient de considérer à leur juste mesure.

Les pressions occidentales visant à empêcher ce pays de maîtriser l’enrichissement de l’uranium, comme il en a le droit en tant que signataire du Traité de non-prolifération nucléaire, ont atteint des seuils inédits. La menace de guerre explicitement brandie contre le régime de Téhéran revient régulièrement par divers canaux médiatiques, rappelant irrésistiblement les conditionnements psychologiques préalables à l’invasion de l’Irak.

Il paraît donc naturel que face à cette menace, la République islamique, en posture défensive, montre qu’elle dispose de moyens de rétorsion douloureux. En effet, le rapport des forces en présence est très nettement en défaveur de l’Iran, tout comme était disproportionné le rapport de force entre le Hezbollah libanais et la très puissante armée israélienne. Une stratégie appropriée et la maîtrise de systèmes d’armes rustiques mais efficaces ont montré que la supériorité technologique ne constitue pas en soi la garantie de réduire l’adversaire. L’endurance et la résilience - la possibilité d’évoluer malgré un environnement adverse - sont les qualités reconnues du peuple iranien. Il faudra aussi en tenir compte dans l’éventualité d’une confrontation armée aux répercussions multiples.

Pour démentielle qu’elle puisse paraître, l’hypothèse d’un conflit asymétrique doit être prise au sérieux : les va-t-en-guerre américains sont encore au pouvoir pour de longs mois. Et si la perspective de l’élection du candidat démocrate venait à se confirmer, il n’est pas exclu que les faucons derrière George W. Bush et Dick Cheney se lancent dans une aventure dont ils se délectent de transmettre la gestion au prochain locataire de la Maison-Blanche.

Dans ce contexte incertain, les exercices iraniens rappellent au monde qu’une nouvelle guerre dans la région aura un prix exorbitant. Les Occidentaux sont-ils disposés à l’assumer ? C’est toute la question posée par les missiles perses.

Du même auteur :

- Les fous de guerre
- Discordances arabes
- Tandis qu’Israël colonise...

10 juillet 2008 - Le Quotidien d’Oran - Edito


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