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Plus que le caricaturiste de la cause palestinienne

vendredi 13 juin 2008 - 23h:35

Sal Emergui - El Mundo

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Sur la caricature, on voit un dirigeant palestinien qui entre dans un camp de refugiés et demande à un résident, pauvre et pieds nus : « Tu es du Hamas ou du Fatah ? ». L’homme lui répond : « J’ai faim ! »

C’est une des plus de 40000 ?uvres de Naji Al Ali, sans doute le caricaturiste palestinien le plus influant qui se souvient et regrette.

Un intellectuel qui, avec le même courage, condamnait et se rebellait contre l’occupation israélienne, attaquait les dirigeants arabes, normalement dessinés avec une grande panse (« ils savent bien vivre ») et sans jambes sur la terre, symbole qu’ils « ne respectent pas leurs racines ».

Un inconnu l’a tué à bout portant le 22 juin 87 à Londres. Après cinq semaines dans le coma, il décéda mais son travail, son nom et son message continuent d’être présents dans la mémoire palestinienne.

Ses dessins et en particulier son personnage le plus connu, Handala, représentent les enfants refugiés palestiniens. Ou lui-même, né en 1938 dans un village arabe de Galilée et que la création d’Israël en 48 provoqua sa « Nakba » (désastre) individuelle et collective. Comme beaucoup d’autres palestiniens, il a grandi dans le camp de réfugiés d’Ein El Jilwe, dans le sud du Liban. En 1961, lors d’une visite au camp, l’écrivain et porte-parole du Front Populaire de Libération de la Palestine Ghassan Kanafani (précédemment victime d’une voiture piégée (préparée) par le Mossad israélien) a vu quelques dessins de Naji et cette même année on publiait sa première caricature.

Ces jours, on a célébré à Nazareth - précisément très près de ce qui fut son village natal - une exposition dont les dessins simples et acides d’Al Ali ont eut le rôle principal. Layla Shjade, qui a fait une thèse sur son travail, considère que « sa vie fut un microcosme de la souffrance du réfugié palestinien, qui lorsqu’il était un enfant tellement seul, s’est exilé de son pays et depuis a été humilié par tous, en commençant par Israël. Ce qui l’a indigné le plus particulièrement, ce sont les dirigeants arabes qui utilisèrent la souffrance des palestiniens pour leurs propres intérêts »

Et j’ai ici des raisons qui expliquent son énorme succès : il reflète la situation et l’impuissance des palestiniens. Il a impulsé la lutte contre l’occupation israélienne. Il ne s’identifie à aucun mouvement précis. Il « souffrait » de la position des dictatures arabes et l’alliance de quelques unes avec l’Occident.

Handala critiquait avec une triste ironie la richesse des pays du Golfe et la vente de pétrole aux Etats-Unis et en Europe. A la fin des années 70, sa colère se dirigea vers l’Egypte pour la signature de paix avec Israël « renonçant à la solidarité avec le peuple palestinien dans l’intérêt des relations avec le président Jimmy Carter ». Dans un des dessins, les chefs/leaders arabes se réunissent autour d’une table de nourritures et boissons, tandis qu’un lève sa/la coupe et dit : « En solidarité à tous les enfants des camps de refugiés qui meurent de faim... Tchin-Tchin/Un toast »

Dans ses ?uvres, il a clairement montré que la signature d’un accord avec Israël n’était pas possible sans le retour des refugiés palestiniens. Sa plume avait plus de valeur que les enquêtes. Sa parole était plus respectée que celle des leaders.

Ses durs messages contre les dirigeants arabes le menèrent aux boycotts et exils. En même temps, il reçut de nombreux prix, la reconnaissance de ses collègues et celle des plus défavorisés entre les milliers de palestiniens, dont la voix n’est pas entendue. Handala était - ou continue d’être - sa fenêtre vers le monde.

Le personnage d’un enfant de 10 ans, avec les bras résignés, croisés sur le dos et les pieds nus tirant des pierres à quelques occasions. « D’une certaine façon il s’avançait sur la première Intifada puisqu’avant cela, beaucoup de murs des camps de refugiés étaient griffonnés du dessin de Handala tirant des pierres contre les soldats israéliens » pense Layla.

« Peut être que ce n’est pas une exagération de dire qu’après ma mort, je continuerai à vivre à travers Handala », confessa-t-il à Londres, ville dans laquelle il peignit sa dernière protestation.

28 mai 2008 - El Mundo - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.elmundo.es/elmundo/2008/...
Traduction de l’espagnol : Myriam


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