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Des militantes israéliennes féministes face à l’enrôlement des femmes dans l’armée.

dimanche 31 décembre 2006 - 15h:11

Brenda Gazzar

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Une femme israélienne qui a refusé l’enrôlement militaire se retrouve pendant deux semaines en prison. Comme d’autres qui regimbent au service militaire, elle est soutenue par un groupe, petit mais actif, qui soutient les objecteurs de conscience à partir de principes féministes.

TEL AVIV, Israël (Womenseniews) - Hadas Amit le voit de la manière suivante : elle se trouve dans une cellule militaire au nom de la morale, de la justice et l’amour de l’humanité.

La pacifiste et objectrice de conscience, âgée de 19 ans, a été condamnée le 18 décembre à 14 jours de prison pour avoir refusé de servir dans l’armée israélienne comme il est requis pour les hommes et les femmes éligibles. Bien que l’armée accepte des exemptions pour diverses raisons - y compris la pratique religieuse et le pacifisme inconditionnel - le « comité de conscience » a catégoriquement refusé le cas d’Amit.

« Si je m’étais engagée dans l’armée, ce serait absolument et à tous égards en contradiction avec mes convictions et mon mode de vie, puisque la violence, tuer, le nationalisme et le vandalisme n’en font pas partie, » a-t-elle écrit dans une lettre aux autorités militaires où elle déclarait son refus de servir ; mettre qui a circulé en vue de lancer une action d’alerte pour la soutenir.

L’organisation anti-militariste et des droits des femmes, New Profile, a fourni un conseil à Amit qui avait décidé de refuser le service militaire et l’assosiation a lancé récemment une campagne de lettres adressées aux autorités gouvernementales et aux médias. L’emprisonnement d’objecteurs de conscience comme Amit est une violation du droit international, dit le groupe qui opère à partir du domicile de volontaires, dans tout le pays, et n’a pas de quartier général officiel.

Comme d’autres organisations qui défendent les objecteurs de conscience, New Profile est à la marge en Israël. Il n’a peut-être que 60 militants, surtout des femmes mais aussi quelques hommes. Pourtant, le militantisme en cours de ces volontaires continue à attirer l’attention sur le rôle de l’armée, même au moment où des tensions entre factions et la violence récente augmentent l’éventualité d’une guerre régionale au Moyen-Orient.

Il y a un an, New Profile ; qui s’oppose aux enrôlements obligatoires et soutient quiconque refuse de s’enrôler, avait propulsé la question à la une quand une autre jeune femme, Idan Halili, avait passé deux semaines en prison pour avoir refusé de servir dans l’armée, pour les raisons de principes féministes. New Profile lui avait procuré une aide légale, avait organisé un rassemblement de soutien devant la principale base de conscription et contribué à recueillir une large couverture médiatique, y compris quatre interviews TV.

Déclaration de refus

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Dans sa déclaration de refus, Halili, alors âgée de 19 ans, avait cité l’exclusion des femmes de positions haut placées dans l’armée, le retranchement dans des « valeurs patriarcales et dans des stéréotypes de genre » comme l’agressivité et le contrôle, et une culture militaire hiérarchique dominée par les hommes, qui encourage le harcèlement sexuel. « L’armée ne peut exister en tenant compte des valeurs féministes, » a dit récemment Halili à Women’s News au cours d’une interview dans son appartement à Tel Aviv. « A cause de sa structure ; elle est hiérarchique et puissante et violente - ces valeurs y sont tellement installées, tellement basiques de l’armée - qu’il est impossible de dire : « OK. Changez-la. Changez-la de l’intérieur...et ainsi vous ne serez pas violents. » La jugeant « inapte » à servir à cause de ses opinions, l’armée a officiellement exempté Halili le 27 décembre 2005. Aujourd’hui, la militante New Profile est volontaire dans le cadre d’un service civil : elle tient une ligne téléphonique d’urgence pour travailleurs migrants qu’elle inbforme sur le trafic sexuel des femmes.

« New profile, qui a été crée par un groupe d’étude de femmes en 1998, n’appelle pas au démantèlement de l’armée mais travaille plutôt à diminuer l’influence militaire sur la société », dit Shani Werner, une militante New Profile de 21 ans, à Jérusalem. « L’option militaire doit être l’une parmi beaucoup d’autres. Elle ne doit pas être l’option décisive. »

Parmi ses activités, New Profile organise des groupes sociaux et de discussion pour jeunes gens qui se réunissent régulièrement et discutent de sujets comme l’enrôlement, la politique et le féminisme. Ce sont les rares forums où on pose aux participants la question : « Voulez-vous vous enrôler ? » dit Werner. L’organisation a aussi créé des expositions qui montrent comment le militarisme est représenté et renforcé dans les écoles israéliennes par les programmes, les chants et les excursions de la classe.

Au moins quatre autres organisations en Israël soutiennent les « refuzniks » qui refusent de servir dans l’armée. Le groupe le plus connu Yesh Gvul, par exemple, qui travaille souvent avec New Profile et dont le nom signifie en hébreu « Il y a une limite », milite surtout contre l’occupation d’Israël en soutenant les soldats qui refusent d’exécuter les tâches de « nature répressive ou agressive ».

Embrasser la discussion

Cependant, New Profile est le seul groupe refuznik qui se définit lui-même comme féministe. « Il défend l’égalité entre femmes et hommes », dit Werner, et intègre des discussions visant à une société plus humaine et plus juste qui « n’humilie personne, donne des droits à tout le monde et...qui ne contrôle pas un autre peuple, » dit Werner.

Pendant la guerre d’Israël contre le Hezbollah au Liban, cet été, le groupe a reçu plus de 700 appels téléphoniques d’Israéliens cherchant un conseil et une information pour voir comment échapper au service militaire et éviter d’aller à la guerre.

« C’est un grand nombre. Beaucoup plus que ce que nous recevons d’habitude comme appels dans des mois normaux, » dit Tali Lerner, une militante de New Profile, qui est membre du réseau israélien « Coalition des femmes pour la paix. « Cela indique que beaucoup de gens ne croyaient pas en cette guerre...Des gens qui essayent de dire que l’option de solutions violentes ne nous mène nulle part. »

Outre le soutien apporté à des hommes et des femmes qui ne veulent pas entrer à l’armée, New Profile s’oppose à l’habitude largement répandue de soldats haut gradés - presque toujours des hommes - quittant l’armée et occupant des postes supérieurs dans l’éducation et la politique. Des autorités de l’armée disent que de grandes avancées ont été faites pour les femmes ces dernières années et soulignent qu’aujourd’hui des femmes servent comme pilotes, dans la marine et dans une série de positions de combat. « Les femmes sont tout sauf marginales quand elles choisissent un boulot où elle font la différence, » dit le porte-parole des forces de défense israéliennes, Noa Meir. Comme dans tout boulot, l’expérience d’un employé dépend beaucoup de son patron particulier.

Expériences individuelles

Exactement, disent certains observateurs bien informés : l’expérience d’une femme dans l’armée peut être très différente de celle d’une autre femme.

« Pour certaines femmes, le service militaire est une expérience qui les renforcent, pour d’autres, c’est dévastateur, » dit Orna Sasson-Levy, maître de conférence au département de sociologie et dans un programme études-femmes à l’Université de Bar Ilan. « Pour certaines, c’est les deux. Pour beaucoup, c’est les deux. »

« En gros, l’armée ne traite pas les femmes à l’égal des hommes. » Cela dépend pour beaucoup du rôle, de la position et du grade d’une femme, dit-elle. Celles qui servent dans les services de renseignements militaires, par exemple, utilisent leur cerveau et ont une autorité significative alors que celles qui travaillent comme secrétaires font souvent une expérience « déprimante » et peuvent souffrir d’une perte de confiance en soi parce qu’un tel poste offre peu de chance de se réaliser.

Sarai Aharoni, une militante de Isha L’Isha (De femme à femme) : Le Centre féministe de Haïfa, dans le nord d’Israël, reconnaît que l’armée offre à beaucoup de femmes une chance d’être indépendante et d’acquérir les aptitudes de base nécessaires à la recherche un emploi, pour la première fois dans leur vie. Le service dans l’armée est hautement valorisé ici et l’avoir accompli peut influer de manière significative sur les revenus et les opportunités d’emploi, en particulier pour celles qui n’ont que des choix limités sur le marché du travail..

« C’est là quelque chose que New Profile critique à juste titre », dit Aharoni. « Il ne revient pas à l’armée d’être ce mécanisme qui permet aux gens d’acquérir des droits légitimes pour tout citoyen. »

Sasson-Levy dit qu’il faudra bien plus que simplement soutenir les « refuzniks » pour réduire le militarisme dans la société israélienne. « La démilitarisation est un processus qui ne pourra démarrer que lorsque l’armée aura moins d’importance, » dit-elle. « Elle aura moins d’importance quand nous aurons établi une paix véritable avec nos voisins palestiniens. »

Brenda Gazzar est journaliste freelance, basée à Jérusalem.

Women’s eNews, 21 décembre2006 - Israeli Activists Call Enlistment a Woman’s Choice
Traduit de l’anglais par Edith Rubinstein


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