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Un martyr vivant

mercredi 12 mars 2008 - 05h:54

Rami Almeghari - The Electronic Intifada

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“Il insista pour que nous prenions une photo de nous tous ; c’était la première fois depuis notre mariage il y a 12 ans, comme s’il sentait que sa fin approchait” relate Ghada al-Khatib, la veuve de Awni al-Khatib, dans leur maison d’Al-Shati, un camp de réfugiés dans la partie ouest de la ville de Gaza.

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La famille al-Khatib, dernier portrait d’Awni - Photo : Rami Almeghari

Il y a quelques jours Awni al Khatib est décédé des lésions au cerveau dont il souffrait depuis 1990, cette année là un tir israëlien l’a atteint à la tête avec une balle acier-caoutchouc.

Awni est l’un des milliers de palestiniens blessés par de telles balles pendant la première intifada qui éclata en 1987.

L’état d’esprit d’Awni érait instable depuis notre mariage et il a toujours souhaité mourir plutôt que rester en vie,” explique Ghada.

La jeune veuve, d’une vingtaine d’années, évoque la personnalité de son mari, elle dit qu’il était doux et tolérant, et d’une manière générale il accordait plus d’importance à sa famille qu’à lui-même.

Cependant, il a toujours prié pour que sa mort soit proche, se souvient-elle.

Ghada explique qu’Awni s’évanouissait fréquement - dans la rue, à la maison ou n’importe où.

“Nous avons perdu un mari et un père tendre et plein de bonté, et je ne pense pas que quoi que ce soit dans cette vie puisse compenser une perte aussi grande. Récemment, il avait insisté pour que nous vendions la maison afin de rembourser quelques dettes. Awni était un très bon père, il était toujours disponible malgré sa blessure incurable.”

Ghada conclut ses propos par ces mots, “Abu Jehad [Awni] a tout simplement vécu en martyr.”

Awni laisse derrière lui 6 enfants, dont une petite fille de 9 mois, qui vivent tous dans un petit logement mal équipé, composé de trois pièces, dans l’une des ruelles du camp de réfugiés de Shati.

Abdelrahin al-Khatib nous dit que son frère a été visé et blessé à la tête au camp de Shati alors qu’il avait 16 ans, en 1990.

A la suite de cela, il a été traité à l’hôpital israélien de Tal Hashomir pendant quelques mois. Quand son état s’est stabilisé, il a été rapatrié sur Gaza, la balle acier-caoutchouc toujours logée dans sa tête.

A cause de ses blessures il souffrait de crises qui perturbaient sa vie quotidienne, et il était d’humeur instable la plupart du temps, dit Mahammad.

“Dieu a eu pitié de lui”, croit Mohammad.

Durant la première intifada, ou lors du soulèvement contre l’occupation israèlienne, l’armée d’Israël a employé divers moyens pour mettre fin à la résistance du peuple palestinien, dont les tirs à balles acier-caoutchouc, qui rendirent infirmes des milliers de jetteurs de pierres.

Selon la “Palestinian Wounded Society”, 70.000 paletiniens ont été blessés entre 1987 et 1993, 40 pour cent souffrent d’invalidités permanentes. Beaucoup souffrent de lésions au cerveau ou d’amputations des membres.

La mort d’Awni al-Khatib n’est pas la première et sûrement pas la dernière qui soit due à ce type de blessure, il y a encore des milliers d’autres “martyrs vivants.”

Du même auteur :

- Alimenter le désastre
- La Croix-Rouge forme les combattants dans Gaza au respect de la loi humanitaire
- Les Palestiniens manifestent contre la réunion d’Annapolis
- Planter les graines de l’indépendance

8 janvier 2008 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction de l’anglais : Brigitte Cope


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