Siège de Gaza : témoignage (4)

« Nous recevons ici au Centre entre 20 et 25 référents chaque jour et nous examinons environ 700 enfants par semaine. L’année dernière nous avons soigné plus de 8.400 enfants à Gaza en plus des 8.000 autres enfants dans notre centre de Khan Yunis. Tous ces enfants ont moins de 5 ans et ils sont tous sous-alimentés. »

L’an passé, le centre Ard El Insan a reçu près de 8500 jeunes enfants sous-alimentés - Photo : PCHR

Najah Zohod est le directeur nutritionnel du Centre de Nutrition Infantile Ard El Insan situé dans la ville de Gaza. Le centre ne travaille qu’avec des enfants sous-alimentés âgés de moins de 5 ans. Les enfants sont régulièrement dirigés sur le Centre par l’UNRWA qui est basé à Gaza et qui soutient certaines des communautés les plus pauvres de la Bande de Gaza. Mais beaucoup de mères viennent d’elles-mêmes au centre avec leurs bébés et jeunes enfants. Aujourd’hui le centre déborde de femmes et d’enfants qui font la queue pour obtenir une consultation et un traitement. La plupart des enfants sont calmes et certains paraissent maigres et apathiques.

« Les groupes que nous visons sont les enfants souffrant de sous-alimentation au deuxième et troisième degré » dit Najah Zohod. « Nous pesons chaque enfant qui arrive ici et prenons des échantillons de sang et d’urine. Près de la moitié des enfants sont sous-alimentés mais 32% souffrent de sous-alimentation au deuxième degré et les 16% autres appartiennent au troisième stade de sous-alimentation. ». Tous les enfants évalués comme souffrant d’une sous-alimentation de deuxième et troisième degré sont dirigés vers l’Unité de Nutrition. « Nous leur donnons ici des repas nutritifs et apprenons aussi aux mères à fournir à leurs enfants un régime équilibré et sain » dit Najah. « Nous servons aux enfants de la viande fraiche, des fruits et des légumes. Mais cette semaine, nous ne pouvons pas servir aux enfants des fruits à cause du bouclage ».

Le siège continu par Israël et son bouclage de la Bande de Gaza affecte de façon chronique tous les aspects de la vie à Gaza y compris l’accès à de la nourriture fraiche et à l’eau. Cela fait des semaines que la viande fraiche est devenue rare et maintenant il y a aussi un déficit de fruits frais. Et pendant ce temps les coupures de courant continuelles dans toute la Bande laissent 50% des familles de Gaza (soit environ 750.000 personnes) avec un manque drastique d’eau potable car il n’y a pas assez de combustibles pour faire fonctionner les pompes à eau électriques plus de 4 à 6 heures par jour.

Malgré le fait que la punition collective soit illégale selon la loi internationale des droits humains et la loi humanitaire, les forces d’Occupation Israéliennes (FOI) continuent à punir collectivement 1.5 millions de civils Gazaouis. Beaucoup des femmes qui viennent au Centre Ard El Insan pour obtenir une aide afin de nourrir leurs enfants sous-alimentés, dépendent aujourd’hui de l’aide alimentaire de l’UNRWA ou du PAM. Mais le PAM est actuellement dans l’impossibilité de fournir aux 84.000 des ses bénéficiaires les plus pauvres de Gaza leurs pleines rations d’assistance et ce, également à cause du bouclage continu. Certaines des familles les plus pauvres dans la Bande de Gaza ont du mal à trouver une nourriture appropriée pour leurs enfants.

Dans la zone de repas du Centre, des femmes sont en train de donner à manger à leurs enfants de la viande fraiche et une soupe de légumes, que le centre leurs fournit gratuitement. Une des mères Fatma Mishrif (23 ans), vit dans le camp de réfugiés de Nusseirat au centre de la Bande de Gaza. « La première fois que j’ai amené ma fille au Centre, elle avait 6 mois et était très sous-alimentée et je ne savais pas comment lui redonner la santé » raconte-t-elle. « Mais le Centre m’a vraiment aidée et maintenant ma fille va beaucoup mieux. Cet endroit est très important pour tous nos enfants. » Le centre offre aussi aux mères des rations nutritives d’aliments secs données par l’UNRWA et qu’elles peuvent utiliser chez elles pour nourrir leurs enfants.

Ard El Insan utilise une approche globale offrant aux mères un soutien continu en nutrition infantile, allaitement et autres compétences parentales. Mais le directeur médical du Centre, Adnan Al-Wahaidi soutient catégoriquement que le siège israélien aggrave la malnutrition infantile dans la Bande de Gaza. « Les effets de ce siège et bouclage ont eu des graves conséquences pour les bébés et les jeunes enfants » dit-il. « Nous avons enregistré une augmentation notable de taux récents de malnutrition infantile et particulièrement de malnutrition chronique. Il y a eu par exemple une augmentation sérieuse de bégaiements chez les enfants ce qui est un syndrome de malnutrition chronique car cela indique une exposition prolongée de la sous-alimentation. »

Selon le Bureau Central Palestinien des Statistiques, 10.7% des enfants de Gaza de moins de 5 ans souffrent actuellement d’un retard de croissance dû à une malnutrition chronique. Le Docteur Al-Wahaidi estime ce chiffre est « choquant » et fait remarquer que le pourcentage de retard de croissance des enfants de moins de 5 ans des pays arabes voisins est inférieur à 6%.

« Un des problèmes principaux de la Bande de Gaza » dit-il « est que nous n’avons pas suffisamment de ressources de nourriture. Nous ne pouvons pas cultiver les variétés de fruits et de légumes dont nous avons besoin pour fournir à nous et à nos enfants une alimentation équilibrée. Nous dépendons des importations de nourriture mais à cause du siège et du bouclage, la nourriture sur les tables des habitants de Gaza est tout à fait déficiente. » Le Docteur Al-Wahaidi reconnaît que Gaza est maintenant devenu dépendant de l’aide extérieure. « Nous avons aujourd’hui des dizaines de milliers de familles qui n’ont pas d’autre choix que l’assistance humanitaire » dit-il. « Mais si ce siège est maintenu alors les interventions et la prévention vis-à-vis de la malnutrition infantile ne suffiront pas. Nous ne serons plus capables d’y faire face ».

Lisez les autres témoignages :

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12 février 2008 - Palestinian Centre for Human Rights - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/files/campa...
Traduction : Ana Cléja