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Liban : Quelles leçons tirer de la bataille de Nahr al Bârad ?

vendredi 8 février 2008 - 07h:06

Ghassan El-Ezzi - Confluences Méditerranée

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Il n’y a rien d’étonnant à ce que la classe politique libanaise qui est déchirée par des divisions politiques et doctrinaires, ne s’accorde pas sur les conséquences régionales et internationales de la bataille qui a duré une centaine de jours dans le camp de réfugiés palestiniens de Nahr Al Bârad entre l’armée libanaise et ce qu’il est convenu d’appeler le gang de Chakar Al Absi ou encore Fath Al islam.

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Cette femme a perdu trois membres de sa famille pendant les combats que l’armée libanaise a livrés aux militants de Fatah al-Islam dans le camp de Nahr al-Bared - Photo : Hugh Macleod/IRIN

Tout comme il est normal dans une large mesure que les uns veulent tirer un profit politique de la victoire de l’armée alors que les autres tendent à minimiser cette même victoire.Dans tous les cas, cet évènement mérite une lecture apaisée pour en tirer toute leçon utile pour l’avenir de ce pays blessé.

En premier lieu, on peut affirmer que l’armée libanaise a réalisé une victoire militaire incontestable malgré ses pertes humaines importantes et malgré le temps qu’il lui a fallu pour l’obtenir. Et la cause est entendue parce que les armées régulières même quand elles sont fortes et bien équipées éprouvent des difficultés à réduire rapidement les mouvements de guérilla et l’histoire nous en fournit multiples exemples et modèles.

Les Américains, les Français, les Britanniques, les Russes et les Israéliens ont éprouvé et éprouvent encore des difficultés à combattre ce type de mouvements et que dire quand on sait que l’armée libanaise n’est ni forte ni moderne et ne possède même pas le minimum nécessaire tant en armement qu’en équipement pour combattre ce type de mouvement.

Rappelons encore que cette armée a été confinée pendant les 3 protectorats syriens au rang d’auxiliaire de l’armée syrienne pour exécuter des tâches subalternes de maintien de l’ordre l’empêchant par là d’être une armée nationale responsable de la défense du pays face aux agressions israéliennes.

Et pour être juste, il faut dire que l’état de cette armée n’était meilleur ni avant ni après ces protectorats.En plus, l’armée libanaise s’est trouvée devant une situation plus complexe à cause des citadins piégés à Nahr Al Bârad et la bataille a duré à cause des risques qu’ils encouraient pour ne finalement s’achever qu’au moment où ils ont pu tous quitter le camp de réfugiés.

La question ici est d’ailleurs doublement délicate : il s’agit d’une part de civils innocents en majorité palestiniens et d’autre part du risque de voir déraper les relations libano-palestiniennes qui souffrent de tous les maux d’abord de l’existence des questions palestiniennes et libanaises et ensuite du contexte régional arabe.

La victoire libanaise dans sa dimension militaire signifie par contre que l’armée libanaise à condition d’être équipée correctement peut devenir une armée comme toutes les armées des pays indépendants pour prendre en charge ses responsabilités en matière de défense des frontières, de maintien de l’ordre et de la fibre nationale et que l’on arrête de nous faire peur à chaque crise sur les risques d’éclatement de cette armée.

Et à condition que l’on laisse cette armée travailler à l’écart des contingences politiques, elle montrera sa volonté à prendre ses responsabilsités sans discriminer ses membres sur le plan religieux et c’est en martyrs du Liban que sont tombés ses soldats musulmans, chrétiens, sunnites, chiites et druzes. Et tout comme l’armée, le peuple libanais a montré son unité pendant toute la durée des trois mois de la bataille de Nahr Al Bârad, tout comme il a fêté la victoire sur l’ensemble du territoire libanais.

Les populations de la zone de bataille ont elles-mêmes collaboré étroitement avec l’armée pendant et après la bataille en prenant des risques pour aider ceux qui fuyaient le camp de réfugiés. Et c’est là que l’on voit la différence entre la Résistance et le Terrorisme et comme l’a dit le grand Mao Tse Toung, le résistant vit parmi le peuple comme un poisson dans l’eau et pour Che Guevara, la différence entre la Résistance et un gang de voleurs est que la première trouve asile dans la population qui lui prodigue aide, refuge et collaboration.

Les Libanais dans leur grande majorité ont montré qu’ils rejetaient ces phénomènes terroristes. En conséquence, il n’est pas possible pour le Liban de devenir une terre du Djihad ou même une terre de Victoire selon le dictionnaire d’Al Qaida. Cela ne veut pas dire que le Liban est définitivement débarrassé de mouvements tels Fath Al Islam, loin s’en faut, et il faudra du temps pour que les Libanais nettoient leur pays de ces phénomènes mais la condition sine qua none est l’émergence d’une classe politique autre que celle qui est inféodée à l’étranger au détriment des intérêts nationaux.libanais.

L’armée libanaise a réussi à gérer sa bataille au dessus des dissensions politiques faisant preuve de beaucoup de sagesse, elle a évité de voir le conflit s’étendre aux autres camps de réfugiés palestiniens ou ailleurs et du même coup, sa victoire a été autant militaire que politique...Ce qui est sûr, c’est que si l’armée avait échoué et avait été vaincue, c’est l’existence même du Liban qui serait partie en fumée.

Et sans exagérer, on peut dire que la bataille de l’armée libanaise contre Fath Al Islam, a été une bataille d’indépendance et pour exister en dehors de ceux qui en sont la cause et à contrecourant des terroristes, de leurs instigateurs et de leurs soutiens, c’est-dire que cela fait partie d’une série de questions que la justice doit élucider sans tarder.

L’achèvement de la bataille de Nahr Al Bârad ouvre deux questions importantes : d’une part une question stratégique en ce qui concerne le rôle que doit jouer l’Armée dans la construction de l’Etat libanais sachant que le Liban est sous l’influence d’intérêts particuliers politiques qui veulent maintenir l’Etat en situation de faiblesse, une sorte de vache à lait. L’armée saura-t-elle affronter une telle problématique avec ses différentes contingences.

Et d’autre part, une question politique en ce sens que les influences régionales et internationales ont tissé leurs toiles sans tenir de la particularité de l’Etat libanais et des risques d’éclatement et de confrontations.

La réponse est connue ici car la question reste suspendue à des changements politiques, ce qui fait que cette seconde partie est importante notamment la reconstruction de Nahr Al Bârad et le maintien d’un consensus national, arabe et international favorable qui a rendu possible la victoire à Nahr Al Bârad et qui devrait éviter un conflit similaire sur les terres libanaises et à défaut de rendre de nouveau la victoire possible mais avec une réactivité plus grande et des délais plus courts cette fois.

24 septembre 2007 - Confluences Méditerranée - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduit de l’Arabe par D. HACHILIF


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