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Siège de Gaza : témoignage (3) - Syndicat des Pêcheurs, Rafah

jeudi 7 février 2008 - 06h:56

PCHR Gaza

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« Je suis pêcheur depuis 36 ans ; j’ai commencé à 15 ans. Mon village d’origine, Il Jura, était connu pour ses pêcheurs. Quand mon père a émigré à Gaza, il est arrivé ici par bateau ».

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Jamal Mohammed Bassalla sur un de ses bateaux de pêche à Rafah

Jamal Mohammed Bassalla est le porte-parole du Syndicat des Pêcheurs de Rafah au sud de la Bande de Gaza. Le syndicat représente 450 pêcheurs locaux et son quartier général est situé sur la plage juste à l’extérieur de Rafah. Mais ce matin Jamal et son équipage restent assis en buvant du thé à l’abri d’une bâche sur la plage autour d’un petit feu de bois flottant. Les conditions en mer sont périlleuses et ils attendent que temps s’améliore.

« Cela prend deux à trois heures pour préparer les bateaux mais nous nous tenons prêts tous les jours » dit Jamal. « Nous vérifions les filets, le diesel des bateaux, les batteries, nos réserves de nourriture, le GPS et tout dont nous avons besoin pour travailler. Quand le temps s’améliore nous sommes prêts presque immédiatement. » En été, Jamal a un équipage de 18 hommes et ils restent en mer parfois jusqu’à 24 heures chaque fois. Mais en hiver, l’équipage ne comprend que six ou sept hommes. Les équipages travaillent ensemble depuis des années et ils se comprennent intimement.

Il y a près de 3.500 pêcheurs professionnels qui travaillent le long des 40 kilomètres de littoral de la Bande de Gaza. Ils font vivre environ 40.000 personnes dont des mécaniciens, des marchands de poissons et des milliers de familles de pêcheurs locaux. Mais l’industrie de la pêche de Gaza a été décimée surtout ces cinq dernières années suite aux restrictions de plus en plus pénalisantes concernant la distance en mer à laquelle les pêcheurs peuvent naviguer sans qu’on leur tire dessus ou sans être harcelés. Les Accords Intérimaires concernant la Bande de Gaza et la Cisjordanie qui ont été signés entre Israël et l’OLP en 1994/95 ne se conformaient pas aux standards internationaux sur les droits humains étant donné qu’ils restreignaient les déplacements des civils palestiniens y compris les droits des pêcheurs de Gaza de pêcher le long de leur propre littoral. Mais les Accords Intérimaires avaient bien stipulé que les pêcheurs palestiniens pouvaient pêcher jusqu’à 20 milles nautiques à partir du littoral de Gaza.

Mais Jamal et ses collègues disent qu’aujourd’hui ils ne peuvent pas pêcher au-delà de
2.5 kilomètres au large de la côte sans risquer qu’on leur tire dessus. « Si nous naviguons plus loin, les Israéliens risquent de nous tirer dessus, de détruire nos filets et nos bateaux et de nous obliger à revenir à terre » raconte-t-il. « Nous subissons ces restrictions depuis 2003 et récemment ils ont aussi commencé à utiliser des roquettes et des hélicoptères contre nous ». Les pêcheurs du Syndicat de Rafah disent que les vedettes armées israéliennes patrouillent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ; les pêcheurs ne peuvent donc pas se risquer à naviguer plus au large.

Israël prétend que les restrictions sur la pêche font partie d’une stratégie globale de sécurité dont le but est de lutter contre la contrebande d’armes et d’attaques suicide des Palestiniens. Mais Khalil Shahin, le directeur de l’Unité pour les Droits Economiques et Sociaux du PCHR fait remarquer qu’Israël n’a jamais respecté des Accords Intérimaires. « Israël n’a jamais permis aux pêcheurs de Gaza de naviguer jusqu’à 20 milles nautiques de la côte » dit-il « Le plus au large qu’ils aient pu naviguer pour pêcher est de 12 milles nautiques, et cela était au milieu des années 90 à l’époque où les pêcheurs de Gaza remontaient environ 3.000 tonnes de poissons par an. Mais la productivité s’est effondrée depuis 2002 suite aux restrictions croissantes. Aujourd’hui les pêcheurs remontent moins de 500 tonnes de poissons par an. C’est la conséquence inévitable de la violation continuelle par Israël des Accords Intérimaires. »

En plus d’avoir leurs bateaux, filets et autres équipements endommagés ou détruits, plus de 70 pêcheurs de Gaza ont été arrêtés l’année dernière par les Israéliens. Jamal Bassalla et ses collègues sont en colère et frustrés : ils ne peuvent plus gagner leur vie correctement par la pêche sans mettre leur vie en danger. Un autre membre du Syndicat, Abdullah, dit qu’il prend des risques. « J’emmène mon bateau à 4 ou 5 kilomètres du littoral ; quel autre choix ai-je ? Parfois on y arrive, d’autres fois, au moment où nous tirons nos filets de l’eau, les Israéliens commencent à nous tirer dessus et nous forcent à revenir à terre. Alors nous sommes obligés d’abandonner toute notre prise. »

Les pécheurs de Rafah disent que ces restrictions ont également affecté le type de poissons qu’ils attrapent, les obligeant à dépendre de plus en plus sur les poissons vivant dans des eaux peu profondes comme les sardines. Beaucoup de pêcheurs ont dû recourir à des filets plus à mailles plus petites, attrapant des poissons plus petits et plus jeunes pour augmenter leurs prises. Jamal prétend que le blocus israélien ne leur laisse pas d’autre choix, mais les pêcheurs sont critiqués pour avoir gravement sur-pêché les stocks de poissons locaux restants. Ironiquement, le nombre de pêcheurs à Gaza a augmenté depuis les années 90 car certains des milliers d’hommes qui travaillaient en Israël n’ont pas eu d’autre choix pour survivre que de devenir des pêcheurs professionnels.

La mer est la plus importante ressource naturelle de Gaza et pour tous les hommes du Syndicat, la solution à leur crise est très simple : ils se battront pour leurs droits tels qu’ils sont spécifiés dans les Accords Intérimaires. « Nous avons besoin d’une mer ouverte » dit Jamal. « Je suis un pêcheur éduqué, j’ai un diplôme de géographie de l’université de Birzeit mais je suis revenu à la pêche parce que j’adore la mer ». Jamal a deux frères et six fils. Ils sont tous pêcheurs. « Nous avons nos bateaux, nous avons nos filets » raconte-t-il. « Nous sommes prêts à travailler ».

Lisez les autres témoignages :

- Informations PCHR Gaza
- Rapports PCHR Gaza

4 février 2008 - PCHR Gaza - Vous pouvez consulter cet article à (format PDF) :
http://www.pchrgaza.org/Interventio...
Traduction : Ana Cléja


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