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Après le tsunami de Gaza

samedi 2 février 2008 - 05h:49

George S. Hishmeh - Gulf News

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Une manifestation de la puissance d’un peuple et une gifle en pleine face d’Israël qui croit que sa force militaire peut suffire à faire plier son adversaire.

Il était très réconfortant de voir ces hommes, ces femmes, ces enfants palestiniens grimper par centaines de milliers sur la palissade en tôle ondulée qui sépare leur bande de Gaza assiégée par Israël de l’Egypte, et de les regarder sur Al Jazeera courir librement vers les boutiques pour se ravitailler en produits dont ils ont tant besoin, retrouver des parents et des amis qu’ils n’avaient pas vus depuis des années et se détendre dans la joie.

Personne ne pourra aisément effacer de sa mémoire ces scènes de vaches, chameaux et bicyclettes transportés sur des engins de l’autre côté de la frontière.

Ce fut, à défaut d’autre chose, une manifestation de la puissance d’un peuple et une gifle en pleine face d’Israël qui, comme bien d’autres nations dans le monde, croit que sa force militaire peut suffire à faire plier son adversaire.

C’est aussi par un hasard mémorable que le Dr George Habash, fondateur admiré du Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP) qui a longtemps combattu contre la dépossession des Palestiniens et pour l’unité arabe, décédait en Jordanie à ce moment même où des Palestiniens célébraient leur liberté retrouvée.

Cette scène nous rappelle la chute du Mur de Berlin, mais à une énorme différence près. En Allemagne, le monde entier, et plus particulièrement le monde occidental, soutenait les Allemands de l’Est, alors que dans le cas des Gazaouis, bien peu ont levé le petit doigt pour condamner la façon honteuse et illégale dont Israël traite les Palestiniens à bout de ressources ; un million et demi de Palestiniens subissent l’occupation militaire israélienne depuis plus de 40 années !

Si elle n’avait été dénoncée par différents groupes humanitaires, tels Amnesty International et Human Rights Watch, ainsi que par des agences des Nations unies, et même par quelques rares organisations israéliennes pour la paix, la situation misérable de Gaza aurait pu échapper à l’attention internationale.

Exemple typique pour preuve : l’incapacité des 15 membres du Conseil de sécurité des Nations unies à publier une déclaration unanime pour critiquer le blocus, un échec imputé au refus des Etats-Unis de se rallier aux 14 autres membres.

« La centrale électrique est tributaire du carburant importé dont la fourniture est entravée par le blocus d’Israël », écrit un porte-parole d’Amnesty International dans une lettre publiée dans The Washington Post, réagissant à son édito méprisable du 24 janvier. « Les pénuries ont entraîné une distribution insuffisante d’eau potable ainsi qu’un traitement déficient des eaux usées, nuisant ainsi à la santé et au bien-être de la population. »

Zahir Janmohmed, d’Amnesty International-USA, ajoutait : « Les agences des Nations unies ont dénoncé à maintes reprises le blocus qui empêchait le passage de l’aide humanitaire dont dépendent plus de 80% des gens de Gaza. » « Et s’ajoutant à la crise : les autorités israéliennes ont souvent refusé à ceux qui avaient un besoin urgent d’un traitement médical épuisé à Gaza de quitter le territoire ».

Blocus

Israël justifie son blocus comme une conséquence des tirs de roquettes par les groupes armés palestiniens de Gaza, mais le représentant d’Amnesty International souligne que « la coupure des approvisionnements essentiels pour Gaza, en représailles d’actions de quelques-uns est aussi une violation du droit international et doit être condamnée avec la même vigueur ».

Maintenant qu’ils ont goûté à la liberté, les Gazaouis accepteront-ils de retourner aux conditions cruelles de jadis ? Bien sûr que non. Mais que peuvent faire les deux principales puissances du secteur - Egypte et Israël - et les deux principaux partis palestiniens - Fatah et Hamas ?

Un demi pas est en train de se faire actuellement avec un accord entre l’Egypte, Israël et l’Union européenne pour autoriser l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas à tenir le poste frontière avec l’Egypte. Il est peu probable que la chose soit acceptée par le Hamas qui doit triompher après avoir aidé à ouvrir les vannes vers l’Egypte, une action sans aucun doute appréciée par les Gazaouis.

Les pays arabes devraient multiplier leurs efforts pour qu’une solution acceptable dans le contexte des combats fratricides entre Palestiniens soit trouvée.

L’étape immédiate devrait comporter un accord pour la surveillance des postes frontière avec l’Egypte, un accord autre que celui existant précédemment avec des inspecteurs de l’UE qui supervisent les agents palestiniens et qui sont en liaison vidéo avec les officiers israéliens assis devant leur écran.

Même si cela se pouvait, il n’y a aucune garantie que le côté israélien soit en mesure de fonctionner puisque la coalition au pouvoir risque de voler en éclats dans le cas où le rapport de la commission Winograd discrédite le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, pour sa piètre guerre contre le Liban en 2006. Si tel était le cas, le ministre de la Défense, Ehud Barak, qui a concocté le blocus de Gaza, pourrait voir dans les conclusions du rapport Winograd une opportunité pour retirer son parti, le Labour, du gouvernement, et espérer remplacer Olmert comme Premier ministre.

Pas étonnant qu’Uri Avnery, activiste pacifiste israélien, juge Barak comme étant « actuellement peut-être le plus dangereux personnage d’Israël... dangereux pour l’existence même d’Israël dans le long terme. » (*)

Pas étonnant que le tsunami de Gaza ait tout mis sens dessus dessous !


George Hishmeh est journaliste à Washington. Il est membre fondateur du « Jerusalem Fund ».
Il écrit pour le Jordan Times, le Gulf News et The Daily Star. Il est président de l’Association des journalistes arabes de Washington. Son mel : ghismeh@gulfnews.com.

*) Sur Barak, voir également :

- "En Israël ou à La Haye, Ehud Barak doit être jugé !" - Michel Warschawski, AIC, 28 janvier 2008.

- "Attention à Barak" - Ran HaCohen, The Electronic Intifada, 28 décembre 2007.

31 janvier 2008 - Gulf News - publié également sur le blog : Annie’s Letters - illustration : Nino Jose Heredia/Gulf News - traduction : JPP


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