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Visite de George Bush : l’Iran éclipse le dossier palestinien

mercredi 9 janvier 2008 - 06h:15

Mouna Naïm & Corine Lesnes - Le Monde

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George Bush

Le président George Bush devait quitter Washington, mardi 8 janvier, pour une tournée de neuf jours au Moyen-Orient, la première en sept ans de présidence, alors que ses efforts pour relancer le processus de paix israélo-palestinien tardent à se concrétiser depuis la réunion d’Annapolis (Maryland), fin novembre 2007. Intervenant alors que la classe politique américaine a les yeux rivés sur la course des primaires pour l’élection présidentielle de novembre qui doit désigner son successeur, la visite, qui commence en Israël et dans les territoires palestiniens, n’est pas considérée avec grand optimisme à Washington.

Cherchant à compenser l’absence d’intérêt des médias pour une tournée qui devrait pourtant être historique, dans une région à risques, M. Bush a consacré son message hebdomadaire, le 5 janvier, à expliquer son voyage aux Américains. Il a indiqué qu’il s’efforcerait de convaincre le premier ministre israélien, Ehoud Olmert, et le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, de "poursuivre dans la voie des négociations de paix". "La tâche est ardue, a-t-il ajouté, mais je suis optimiste." Dans les autres pays - Egypte, Koweït, Bahreïn, Emirats arabes unis et Arabie saoudite -, où il doit poursuivre sa tournée, le président américain a indiqué qu’il chercherait à convaincre les dirigeants de "soutenir les négociations israélo-palestiniennes" et qu’il "discuterait de l’importance de contrer les ambitions agressives de l’Iran".

A deux jours de l’arrivée de M. Bush, les tensions persistantes entre la République islamique et les Etats-Unis ont failli virer à la confrontation, dimanche 6 janvier, lorsque des bateaux iraniens se sont livrés à des manoeuvres, qualifiées de "provocatrices" par Washington, à l’encontre de navires de guerre de la marine américaine dans les eaux internationales du détroit d’Ormuz. S’approchant à 500 mètres de la flotte américaine, qui maintient une présence permanente dans cette région stratégique du Golfe, une vedette iranienne a envoyé, selon Washington, un message de menace : "Je vais vous attaquer, je vais vous faire exploser dans quelques minutes." Il n’y a pas eu de tir, mais la Maison Blanche a mis en garde l’Iran contre tous "agissements provocateurs qui pourraient conduire à un incident dangereux à l’avenir". "C’est une région très volatile et le risque d’un incident et d’une escalade est réel. Je ne comprends pas ce qu’ils avaient en tête", a déclaré, lundi, le secrétaire américain à la défense, Robert Gates

De son côté, Téhéran a minimisé l’incident. "Trois navires de guerre américains sont entrés dans les eaux régionales. Comme à l’habitude, ils ont été (...) identifiés" et leur commandement "questionné", avant de poursuivre "leur route sans encombre", a ainsi affirmé à l’agence de presse iranienne Fars une source au sein des Gardiens de la révolution, le corps d’élite du régime iranien. La montée en puissance de l’Iran, redoutée par les pays du Golfe, devrait figurer au coeur des discussions entre le président des Etats-Unis et ses alliés arabes.

Ces derniers ne se privent pas, déjà, d’afficher leur différence avec l’administration américaine en ce qui concerne la méthode et les meilleurs moyens de défendre leurs intérêts face à la République islamique. Peu désireux de mettre ce pays en quarantaine, encore moins d’approuver un éventuel recours à la force contre lui, ces gouvernements tentent de le contenir par les voies diplomatiques.

La dernière manifestation de cette ouverture frileuse envers l’Iran date de décembre 2007. Les six pays membres du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Koweït, Bahreïn, Qatar, Emirats arabes unis et Oman) ont invité, à sa propre demande, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, à leur dernier sommet, en décembre, à Doha. Le dirigeant iranien y avait tenu un long discours, proposant à ses hôtes une coopération régionale plurielle, incluant les questions de sécurité. Ils ont promis de prendre le temps de la réflexion, manière sans doute d’évacuer la question,

Ces pays demeurent sur leurs gardes. Le spectre d’un Iran doté de l’arme nucléaire est certes un souci prioritaire, mais les affirmations contradictoires de la Maison Blanche, de la CIA et de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur ce dossier ne sont pas non plus très rassurantes.

L’affaire des armes de destruction massive irakiennes est d’autant plus vive dans les mémoires que, depuis la chute du régime de Saddam Hussein, l’Irak est à feu et à sang, et le théâtre le plus récent du conflit d’intérêts entre les deux rives du Golfe. Dans la continuité de cette rivalité a surgi une autre source d’inquiétude : la présumée résurgence des ingérences iraniennes dans les affaires intérieures de certains de ces pays, via les minorités chiites qui s’y trouvent. Ce dont Téhéran se défend.

Début 2007 déjà, le monarque saoudien, Abdallah Ben Abdel Aziz, avait pris l’initiative de prendre langue avec le pouvoir iranien à propos du Liban. Tirant les leçons des guerres intercommunautaires en Irak, il avait réussi, par le biais de ce dialogue, à éviter que la crise politique au Liban dégénère en une guerre de tranchées lourde de risques pour l’ensemble de la région entre familles religieuses musulmanes, c’est-à-dire entre chiites et sunnites. L’Egypte a elle aussi engagé un dialogue avec Téhéran, pour sonder les possibilités d’apurer un contentieux dont l’origine remonte aux premiers temps de l’instauration de la République islamique.


Repères

Proche-Orient. George Bush doit effectuer, du 8 au 15 janvier, un déplacement qui va lui donner l’occasion de visiter Israël, les Territoires palestiniens, le Koweït, Bahreïn, les Emirats arabes unis, l’Arabie saoudite et l’Egypte.

Déplacements. Depuis son élection à la présidence des Etats-Unis, en 2000, M. Bush s’est rendu en Egypte (à Charm El-Cheikh) et en Jordanie (à Akaba et à Amman) pour participer à des réunions diplomatiques. Il est aussi allé en Irak sur les bases américaines installées après le renversement de Saddam Hussein.

Israël. M. Bush a attendu la dernière année de son second mandat pour effectuer une visite en Israël, allié traditionnel des Etats-Unis, alors que son prédécesseur, Bill Clinton, s’était rendu sur place à trois reprises.

Mouna Naïm & Corine Lesnes - Le Monde, le 8 janvier 2008


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