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La sinistre réalité dans Gaza

mercredi 19 décembre 2007 - 06h:08

Mohamed Omer - Rafah Today

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Mohamed Omer rend compte de la situation dans Gaza suite aux ruptures dans les approvisionnements, depuis les fournitures médicales considérées comme vitales jusqu’aux carburants, en passant par les vêtements d’hiver pour enfants.

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Blocus et hiver sur Gaza...

Le trafic automobile dans la bande de Gaza était réduit à un mince filet de voitures la semaine dernière, et cette semaine les centres médicaux ont diminué le nombre de traitements.

« La décision d’Israël est une condamnation à mort : nos réserves de carburant sont presque à zéro et elles peuvent très probablement s’épuiser d’ici la fin de la journée, » a déclaré Khaled Radi, porte-parole du ministère de la santé du gouvernement destitué du Hamas.

Radi faisait référence à la décision de la cour suprême israélienne, datée du 30 novembre, autorisant de nouvelles réductions dans les livraisons de carburant ; diminutions qui mutilent les habitants de Gaza dans tous les aspects de leur vie. Avant cette décision, Israël avait décidé dès octobre de commencer à réduire le carburant, Gaza devant peu après supporter des réductions sérieuses de plus de 50% du carburant dont a besoin le territoire, ces chiffres étant ensuite confirmés par Ochoa, une organisation des Nations Unies.

Au passage-frontalier de Nahal Oz par lequel tout le carburant entre dans Gaza, l’autorité palestinienne pour les carburants a signalé qu’Israël a fourni seulement près de 190000 litres de fuel par jour depuis la fin octobre, alors que ce sont 350000 litres qui sont nécessaires à l’enclave. Ce nombre est descendu le 29 novembre à 60000 malheureux litres, augmentant seulement de façon marginale trois jours plus tard le 2 décembre, avec une livraison de 90000 litres.

Les réductions encore plus fortes de cette semaine ont eu comme conséquence plusieurs jours de fermeture des stations-service dans Gaza, les propriétaires protestant ainsi contre le fait que seul le quart du carburant normalement livré ait été reçu.

L’association des propriétaires de station-service à Gaza fait le commentaire suivant : Les « sociétés distributrices de carburant ont considéré la quantité [livrée] comme négligeable et par conséquent, en protestation face au blocus israélien, elles ont refusé d’accepter cette offre misérable qui est loin de satisfaire les besoins essentiels des habitants de Gaza. »
Un chauffeur de taxi de Gaza a fait part de son inquiétude : « Amputer nos livraisons en carburant, c’est amputer nos vies. Nous l’employons pour tout, au lieu du bois ou du charbon. C’est tragique non seulement qu’Israël impose ce siège à Gaza, mais qu’il y ait aussi des Palestiniens soutenant cet embargo cruel, avec l’idée naïve de provoquer un retournement du peuple de Gaza contre le Hamas. »

Les coupures de carburant ont considérablement affecté le système des transports publics, imposant des retards de plusieurs heures à des étudiants des universités de Gaza à cause des attentes de moyens transport depuis Khan Younis et Rafah dans le sud.

Effets en chaîne

Les coupures de carburant empêchent à leur tour l’accès à l’eau : les pompes tournant avec des moteurs diesel sont incapables de fonctionner, et partant de là plus de 77 000 personnes sont sans eau potable selon l’agence de l’eau de Gaza. Oxfam International a averti que bientôt ce seront 225 000 Gazouites qui pourraient souffrir d’approvisionnements inadéquats en eau, générant des inquiétudes par rapport à la santé publique.

Les ambulances et les cliniques sont aussi en situation difficile ; Khaled Radi rapporte comment les pénuries en carburant ont déjà mis quelques ambulances à l’arrêt : « Ceci a affecté la mobilité des ambulances qui sont pourtant essentielles, particulièrement lors des attaques aériennes israéliennes comme celle de ce matin. »

Il a ajouté que les coupures en carburant risquaient de provoquer la fermeture les principaux hôpitaux qui fonctionnent grâce à des générateurs de secours pendant les fréquentes coupures d’électricité. Deux centres de santé de premiers soins ont déjà été obligés de suspendre les traitements pendant les coupures de courant. Les centres qui restent ouverts souffrent de pénuries dans les fournitures médicales, 91 des 416 médicaments jugés essentiels étant déjà épuisés, selon l’OMS [Organisation Mondiale de la Santé].

Même les produits de base sont rares. Les habitants sont à l’affût pour trouver un morceau de verre pour réparer une fenêtre cassée, ce qui devient impératif pour supporter le froid de décembre, en particulier à un moment où l’électricité et le gaz sont soit rares soit absents.

Eyad Yousef, un professeur palestinien âgé de 31 ans, attend que le ciment, indisponible depuis les derniers mois, puisse entrer dans Gaza. Dans le même temps, les prix des matériaux de construction ont grimpé en flèche, et même plus que triplé dans les plus mauvais cas. Yousef souhaite disposer de n’importe quelle sorte de matériau de construction, mais il sait qu’il ne trouvera rien, car il a regardé dans tout le secteur déjà nettoyé. « J’ai un plancher à finir dans ma maison, mais je ne peux toujours pas le faire car aucune sorte de matériau de construction n’est disponible dans Gaza, » nous dit-il. « J’emploie des morceaux de nylon pour couvrir les fenêtres de ma maison, mais je ne peux pas continuer longtemps comme cela, » ajoute-t-il, disant ensuite qu’ il espérait que la communauté internationale fasse pression sur Israël pour que les frontières soient ouvertes et que les produits essentiels soient autorisés à entrer dans Gaza.

Condamnation à mort

Yousef, au moins, est plus chanceux que les derniers décédés : depuis le mois dernier au moins 31 patients sont morts dans Gaza, un résultat du blocus israélien aux frontières et de l’interdiction d’accéder aux hôpitaux israéliens, égyptiens et jordaniens, aussi bien qu’aux hôpitaux de Cisjordanie.

Depuis que le Hamas a pris le contrôle de Gaza en juin, ce blocus israélien a rendu pratiquement impossible aux Palestiniens de sortir de Gaza. La situation s’est alors détériorée avec la fermeture du poste-frontière de Karni, le seul passage commercial vers Gaza, uniquement ouvert pour les besoins alimentaires les plus basiques. Avec les attaques terrestres et aériennes de l’armée israélienne, la situation pour les Palestiniens a encore empiré après qu’Israël ait déclaré Gaza « entité hostile » en octobre passé, Israël voulant ainsi justifier sur la scène internationale sa politique de bouclage des frontières.

Dans ce territoire très peuplé, privé de produits médicaux et faisant maintenant face aux fermetures des établissements de soin, les habitants de Gaza se sont vus prononcés la peine de mort avec le contrôle exercé par Israël sur les frontières. Yahya Al Jamal, âgé de 53 ans est un cas parmi des centaines d’autres : il a un cancer et a un grave besoin de soins médicaux dans des hôpitaux bien équipés. Depuis maintenant plus de deux mois, son entrée en Israël pour accéder à un traitement lui est refusée. Son père torturé par l’angoisse a expliqué que son fils mourra dans les prochains jours s’il n’obtienait pas les médicaments qu’il lui faut ; c’est un des résultats du refus par Israël que les malades dans un état critique puissent être soignés.

Insulte s’ajoutant aux tourments déjà infligés, le ciment - déjà rare pour le bâtiment - n’est plus disponible même pour préparer les tombes des nombreuses personnes récemment décédées.

Stocks épuisés

Les organisations d’aide comme le programme mondial pour l’alimentation (PAM) rapportent que les importations de nourriture vers la bande de Gaza couvrent à peine 41% de la demande.

Alors que l’hiver s’avance, les habitants tentent désespérément de survivre. Sur le marché de Rafah ce samedi, Umm Mohamed Zourub fouille du regards les étalages : « J’avais cherché de nouveaux vêtements d’hiver pour mes enfants mais je n’en ai pas trouvés parce ces articles ne parviennent pas à Gaza à caude du bouclage des frontières, » déplore cette mère âgée de 43 ans.

En effet, le froid est arrivé tôt sur une population isolée et affamée au niveau international. Après la chaleur intense des mois d’été, où l’eau était rare et la climatisation imaginaire, les Gazaouites ressentent maintenant le froid piquant dans les mêmes maisons non préparées pour les températures extrêmes, et ils comprennent avec amertume que à nouveau, ils ont été abandonnés face à l’emprisonnement, aux attaques israéliennes terrestres et aériennes, et qu’ils sont devenus invisibles au niveau international.

« Le monde n’est pas dangereux en raison de ceux qui font le mal, mais en raison de ceux qui se contentent de regarder et ne font rien. »
Albert Einstein.

Du même auteur :

- Rafah aujourd’hui - 26 juin, 1er juillet
- Rafah aujourd’hui - 10 avril 2007

10 décembre 2007 - Vous pouvez consulter cet article à :
http://rafah.virtualactivism.net/ne...
Traduction : Claude zurbach


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