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« La promesse d’une paix dans un an est impossible à tenir »

vendredi 30 novembre 2007 - 07h:10

Gérald Steinberg - Le Temps

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Gérald Steinberg, chercheur au Centre d’études stratégiques Begin-Sadate, à Tel-Aviv, revient sur le processus d’Annapolis.

Le Temps : Au lendemain de la rencontre « de la paix » entre Ehoud Olmert et Mahmoud Abbas, peut-on déjà affirmer qu’il y avait un « avant » et qu’il y aura un « après » Annapolis ?

Gérald Steinberg : A priori, il est difficile de nier l’impact international de l’événement de mardi. Cependant je recommande la plus grande prudence quant aux suites qu’il pourrait avoir car rien ne va changer dans l’immédiat. Certes des équipes de négociateurs ont été formées et l’on doit s’attendre à quelques gestes symboliques ici ou là. Mais, fondamentalement, la situation sur le terrain restera la même pendant longtemps encore. La seule différence entre l’« avant » et l’« après », c’est que les deux parties proclament désormais devant le monde qu’elles vont se parler et qu’elles envisagent de discuter des dossiers sensibles au c ?ur du conflit. Cependant, cela ne signifie pas que ceux-ci sont résolus. La paix n’est pas faite, loin de là.

Croyez-vous à la paix dans un an telle que la promettent MM. Olmert et Abbas ?

Je ne veux pas être désobligeant à l’égard de ces deux leaders, mais cette promesse est tout simplement impossible à tenir en l’état actuel des choses. N’oubliez pas que ce conflit dure depuis soixante ans. Pour le résoudre en quelques mois, il faudrait un retournement psychologique radical des opinions israélienne et palestinienne. Il faudrait également que les deux parties renoncent aux plus ardues de leurs revendications de fond. Est-ce envisageable ? Pas pour le moment, en tout cas.

Pour vous, que représente la conférence d’Annapolis ?

Elle marque le début du commencement de la reprise d’un processus. Pour l’heure, nous n’en sommes qu’au moment des déclarations incantatoires où tout semble possible. Mais dans quelques mois, lorsque les négociateurs en viendront aux affaires concrètes nécessitant des concessions douloureuses, la situation deviendra de plus en plus complexe. Je ne suis pas devin, mais je crois qu’ils iront de blocage en blocage et de crise en crise.

S’exprimant devant son gouvernement avant de s’envoler pour les Etats-Unis, Ehoud Olmert n’a d’ailleurs pas caché qu’il s’attend à ce que ce processus se développe par à coups et à ce qu’il traverse des moments de tension intense. Ce phénomène, nous avions déjà pu le souligner à la suite de la conclusion des accords de paix d’Oslo (ndlr : en 1993). En tout cas, pour les chercheurs qui suivent l’évolution du dossier israélo-palestinien, la paix dans un an semble un concept osé et pour tout dire irréalisable.

En Israël comme dans les Territoires, bon nombre d’observateurs estiment que l’échec du processus d’Annapolis pourrait déclencher une nouvelle Intifada motivée par la frustration des Palestiniens. Etes-vous de cet avis ?

Je ne m’attends pas à une explosion demain matin, ni même dans les mois à venir. Tant que les négociations se dérouleront, nous continuerons sans doute à déplorer les violences quotidiennes qui font malheureusement partie du paysage de la région, mais cela n’ira pas plus loin. A contrario, si le processus d’Annapolis se terminait mal ou stagnait de manière définitive, comme ce fut le cas avec celui d’Oslo, on peut s’attendre au pire.

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Gérald Steinberg

A supposer qu’une nouvelle Intifada éclate, elle sera de toute façon différente des précédentes puisqu’il n’y a plus de colonies juives dans la bande de Gaza et que la population palestinienne y est confinée. En Cisjordanie aussi les choses seront différentes, ne fût-ce que parce Mahmoud Abbas n’est pas Yasser Arafat.


Entretien réalisé par Serge Dumont

Gérald Steinberg & Serge Dumont, Le Temps, le 29 novembre 2007


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