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A propos d’un échec annoncé

samedi 27 octobre 2007 - 06h:24

Sergio Yahni - AIC

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Questions : Israël et les Etats-Unis agiront-ils seuls contre la Syrie et l’Iran ? Qu’arrivera-t-il au gouvernement Abou Mazen-Fayyad ?

Le processus de paix israélo-palestinien se trouvait déjà dans l’impasse en 1995, quelques mois avant que le Premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, ne soit assassiné.

Réagissant à la rupture du consensus national israélien et aux troubles sociaux grandissant provoqués par le processus de paix, le Parti travailliste et le Likoud sont ensuite parvenus à un accord, qu’on a appelé l’accord Beilin-Eitan, sur l’avenir de la Cisjordanie et de la bande de Gaza [1997]. Selon cet accord, Israël acceptait la création d’un Etat palestinien quasi-souverain dans les Territoires occupés palestiniens. L’accord Beilin-Eitan a été la première référence politique à la volonté d’Israël d’annexer les blocs de colonies de Cisjordanie. (*)

Sans rien régler à l’agitation sociale ni à la crise parlementaire qu’elle avait provoquée, l’accord Beilin-Eitan a réalisé un nouveau consensus national.

Tous les principaux partis soutiennent encore ce consensus, y compris le Meretz libéral et le parti de droite Israel Beitenou. Les divergences entre ces partis portent sur : 1) dans quelle proportion Israël devra-t-il se retirer de la Cisjordanie ? ; et 2) le Fatah majoritaire est-il capable de gouverner l’Etat palestinien à créer ?

Les réponses à ces questions définissent les prises de position politiques défendues par les différents dirigeants politiques.

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Ehud Barak, président du Parti travailliste et ministre de la Défense.

Par exemple, Ehoud Barak, président du Parti travailliste et ministre de la Défense, pense qu’Abou Mazen n’est pas capable de prendre le contrôle de l’Etat palestinien, mais qu’après un retrait israélien, le Hamas prendra de fait celui de la Cisjordanie, comme il l’a fait à Gaza. Par conséquent, Barak s’oppose à tout retrait israélien de Cisjordanie avant que de nouveaux dispositifs pouvant stopper les roquettes Qassam ne soient acquis.

Tous les principaux partis israéliens soutiennent le développement de ces dispositifs et les considèrent comme complémentaires au mur de séparation, mais seuls Barak et le Likoud conditionnent un retrait au développement de tels dispositifs. Selon Ha’aretz (19 octobre), il faudra au moins deux ans pour acquérir des missiles anti-Qassam.

La question de savoir quelle sera la part de territoire qui devra être annexée par Israël est également centrale pour l’appareil politique israélien. Les partis juifs orthodoxes Shas et Israel Beitenou ne sont pas prêts à faire des concessions sur le territoire municipal de Jérusalem. Les deux partis ont déclaré qu’ils quitteraient le gouvernement si la question de Jérusalem était intégrée dans une déclaration finale au sommet d’Annapolis. De plus, Israel Beitenou exige que le territoire à l’intérieur de la Ligne verte [Israël] et à l’est de Qalqilya et de Tulkarem - peuplé par de nombreux citoyens palestiniens d’Israël - soit inclus dans un Etat palestinien à titre d’échange de territoire.

Les Palestiniens se rappellent les courriers échangés en 1993 entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin, où Arafat reconnaissait l’Etat d’Israël dans les frontières d’avant 1967, renonçant à 78 % des exigences territoriales historiques palestiniennes. En conséquence, il n’y a plus de place aujourd’hui pour des concessions supplémentaires à Jérusalem, ou ailleurs dans les territoires occupés palestiniens.

Abou Mazen et le gouvernement de Salam Fayyad deviendront une minorité marginale dans le cas où ils accepteraient même la plus généreuse des propositions israéliennes. Ils perdront le soutien du Fatah et peut-être même la fidélité des forces armées, dont la Garde présidentielle, entraînées par des conseillers américains.

Avec ce panorama politique, il est douteux que ce qui sépare les négociateurs palestiniens et israéliens se résorbe bientôt et que ce soit possible au sommet d’Annapolis. Pendant ce temps, la situation économique, sociale et politique des Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza continue de se dégrader rapidement.

Et pourtant, sans la résorption de ces divergences, il sera impossible pour les Etats-Unis de promouvoir une coalition des régimes pro-américains dans la région, que les dictatures appellent par euphémisme « les modérés », en opposition à la coalition Iran-Syrie-Hezbollah-Hamas.

La question est de savoir si Israël et les Etats-Unis agiront seuls contre la Syrie et l’Iran, écartant les alliés arabes des USA après avoir failli à réunir un sommet israélo-palestinien cet automne. La seule alternative sera que les Etats-Unis se tiennent tranquilles pour le temps restant à l’administration Bush.

Une autre question est : qu’arrivera-t-il au gouvernement Abou Mazen-Fayyad ? De nombreux signes montrent que le Fatah connaîtra une scission importante dans laquelle la base et la jeune génération du parti s’en prendront, peut-être militairement, à l’Autorité palestinienne. Il est possible que le peuple palestinien se retrouve dans une période de combats, une fois de plus. Mais cette fois, ce sera à l’intérieur du Fatah.

* Voir notamment : « DU PLAN DE PARTAGE DE 1947 AU PLAN« ALLON PLUS », septembre 1997, de Jan de Jong, Le Monde diplomatique :

... Sur le plan politique aussi, 1997 marque une percée. En janvier, le chef de la fraction parlementaire du Likoud, M. Michaël Eitan, et l’ex-ministre Yossi Beillin, un des principaux dirigeants du Parti travailliste, concluaient un "accord national concernant les négociations sur le réglement final avec les Palestiniens". Ce document s’inscrivait dans la logique du texte contresigné, en mars 1996, par M. Yossi Beilin avec le négociateur palestinien Abou Mazen (Mahmoud Abbas), avec cette concession palestinienne cruciale : Israël pourrait incorporer les implantations où vivent 70 % des colons juifs, laissant 94 % de la Cisjordanie sous une autorité palestinienne dotée des apparences d’un Etat. Jérusalem-Est demeurerait sous souveraineté israélienne, mais les Palestiniens pourraient proclamer leur capitale, Al Qods, à Abou Dis, une banlieue située à l’est de Jérusalem.

L’acceptation par les Palestiniens de la thèse selon laquelle les colonies ne seraient pas incompatibles avec un compromis territorial a représenté un jalon sur la voie d’une réduction drastique de leurs aspirations territoriales dans l’accord Beilin-Eitan. Elle a poussé le gouvernement de droite israélien à revendiquer plus de 50 % de la Cisjordanie et à y exiger le maintien de toutes les colonies. [...]

Du même auteur :

- "Le processus de paix israélo-palestinien peut-il être relancé ?",
12 septembre 2007.

23 octobre 2007 - Alternative Information Center - Traduction : JPP


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