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Déjeuner entre amis

mercredi 24 octobre 2007 - 06h:10

Monique Mas - RFI

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Lundi 22 octobre, Nicolas Sarkozy s’est entretenu à l’Elysée avec le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert sur le dossier nucléaire iranien.

Lundi 22 octobre, Nicolas Sarkozy s’est entretenu à l’Elysée avec le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert sur le dossier nucléaire iranien. « J’ai la réputation d’être un ami d’Israël et c’est vrai. Je ne transigerai jamais sur la sécurité d’Israël », avait lancé le président français, Nicolas Sarkozy, le 17 août dernier en prononçant son premier discours de politique étrangère de chef d’Etat devant le parterre des ambassadeurs en poste à Paris. Dans la même intervention, Nicolas Sarkozy avait également brandi le risque d’un « Hamasland » dans la bande de Gaza et évoqué une « alternative catastrophique : la bombe iranienne ou le bombardement de l’Iran ». Conjugués avec l’américanisme affiché du président français, ces propos sont réjouissants pour le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert. Invité lundi à Paris à la table de Nicolas Sarkozy (après Moscou et avant Londres), Ehoud Olmert compte sur la France au Conseil de sécurité et dans l’Union européenne.

A Paris, le Premier ministre israélien était venu en quelque sorte « prêcher un converti ». « Israël entend s’associer aux efforts internationaux pour empêcher l’Iran de se doter de l’arme atomique. Or, Paris et Londres sont très clairs à ce sujet, et je ne doute pas que mes discussions avec Nicolas Sarkozy et Gordon Brown seront fructueuses », s’était-il d’ailleurs félicité par avance. Rompant avec la « politique arabe » de la France de ses prédécesseurs, et en particulier celle de Jacques Chirac, le président français n’a en effet pas ménagé ses efforts depuis son avènement à la magistrature suprême.

Ministre de l’Intérieur en 2003, Nicolas Sarkozy fut l’un des rares à ne pas appuyer sans réserves la condamnation française de la guerre américaine en Irak adressée à l’Onu de manière enflammée par le Premier ministre de l’époque, Dominique de Villepin. Accueilli en Israël comme un chef d’Etat potentiel lors d’une visite en décembre 2004, en tant que président de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) qui l’a effectivement conduit au pouvoir en 2007, Nicolas Sarkozy s’est voulu le héraut en Europe du renforcement des sanctions contre l’Iran, y compris indépendamment de l’Onu, pour contraindre Téhéran à suspendre son programme d’enrichissement d’uranium.

Israël voit l’Iran comme sa « principale menace stratégique »

« Un Iran doté de l’arme nucléaire est pour moi inacceptable », avait souligné le président français en août dernier. Pour Israël, cette perspective est une « menace stratégique » majeure, de nature à contrebalancer sa stature de seule puissance nucléaire au Moyen-Orient, même si Ehoud Olmert se suffit de répéter en leitmotiv que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad n’a pas hésité à appeler ses adversaires à « rayer » l’Etat hébreu des cartes du monde. Reste à prouver qu’il en a les moyens et que les sanctions peuvent le dissuader d’en user.

Selon les médias israéliens, Ehoud Olmert circule avec des preuves de la progression iranienne sur la voie du nucléaire militaire. Avant le président français, il est allé voir Vladimir Poutine, la semaine dernière. Mais le président russe persiste à jouer les incrédules. Il attend des « preuves objectives », avait-il déjà répondu à Nicolas Sarkozy venu l’entreprendre en vain sur le même terrain le 11 octobre dernier. Si cela peut le tranquilliser, a-t-il dit sans rire à Ehoud Olmert venu à Moscou le 18 octobre, il est tout disposé à partager avec Israël ses « informations » recueillies à Téhéran où il a cautionné les aspirations iraniennes au « nucléaire civil », au grand dam d’Israël et des Etats-Unis.

Le ton a monté ces dernières semaines du côté d’Israël et des Etats-Unis, le chef de l’Etat hébreu, Shimon Peres, comparant son homologue iranien, Mahmoud Ahmadinedjad, à Hitler et... Staline, Dick Cheney, le vice-président américain assurant que son pays ne peut « pas rester les bras croisés », George Bush évoquant même un risque de « troisième Guerre mondiale ». Menaces de guerre suggérées aussi côté français avec les propos du ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, en juillet dernier.

Selon le chef de l’AIEA, l’Iran n’est pas une menace pour demain

Si la France paraît tout prêt d’avoir convaincu l’Union européenne de prendre des mesures supplémentaires contre Téhéran, elle est aussi membre permanent du Conseil de sécurité où une décision sur l’Iran doit être prise d’ici fin novembre sur la foi des rapports attendus du chef de la diplomatie européenne, Javier Solana, et du chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Mohammed el-Baradei. Or, alors qu’Ehoud Olmert était à Paris, pour démontrer la réalité et l’imminence d’une menace atomique iranienne, le prix Nobel de la Paix et patron de l’AIEA, Mohamed El Baradei, déniait tout fondement à ses assertions.

Pour sa part, Mohamed El Baradei s’insurge contre l’idée émise notamment par Nicolas Sarkozy que la question se pose « de savoir s’il faut bombarder l’Iran ou le laisser avoir la bombe ». Dans les colonnes du quotidien français Le Monde , le chef de l’AIEA s’inscrit en faux contre la menace de « l’usage de la force » réclamé par Israël et ses alliés. Rien ne permet de prouver que l’Iran a l’intention de se doter de la bombe nucléaire, assure-t-il en indiquant que si tel était le cas, « il lui faudrait encore entre trois et huit ans pour y parvenir ».

D’après Mohamed El Baradei, l’Iran « ne sera pas une menace dès demain » et pour l’en dissuader, « tous les moyens de la diplomatie n’ont pas été épuisés ». Concernant la menace de nucléarisation militaire qui émanerait aussi de Syrie, selon Israël, le chef de l’AIEA est tout aussi catégorique. Malgré les recherches et les demandes lancées tous azimuts, « nous avons reçu zéro information » sur ce sujet, dit-il en mettant en garde les partisans éventuels d’une nouvelle « guerre préventive ».

Nicolas Sarkozy au diapason israélo-américain

Le président français est au diapason israélo-américain concernant la Syrie et son rôle au Liban où le Hezbollah islamiste a tenu tête à l’armée israélienne en 2006. Cette année-là, au cours d’une visite de campagne électorale aux Etats-Unis, en septembre 2006, Nicolas Sarkozy avait rencontré le président Bush et les organisations juives américaines. Il avait tenu à leur dire combien il se « sent proche d’Israël ». « Israël est la victime, avait-il lancé, et doit tout faire pour éviter de passer pour l’agresseur ». Certains avaient en effet dénoncé une réaction israélienne « disproportionnée » au Liban.

Vendredi dernier, au sommet européen de Lisbonne, le président français avait invité Israéliens et Palestiniens à faire la paix. « C’est maintenant qu’il faut parler, c’est maintenant qu’il faut mettre tous ses atouts sur la table, c’est maintenant qu’il faut prendre le risque d’une paix durable », a-t-il répété. Il l’avait déjà dit au président de l’Autorité palestinienne et chef du Fatah, Mahmoud Abbas en septembre dernier, pendant l’Assemblée générale des Nations unies.

Il ne faut pas trop attendre d’Annapolis, selon Olmert

« Tous les dirigeants des pays arabes, à commencer par Mahmoud Abbas, connaissent mes sentiments d’amitié et de respect envers leurs peuples », avait assuré Nicolas Sarkozy en août dernier devant les diplomates étrangers. On sait qu’il partage l’opinion israélienne concernant le Hamas islamiste. C’est donc en effet d’après lui le moment propice pour Mahmoud Abbas de saisir sa chance. Mais en août, Nicolas Sarkozy avait aussi expliqué que « la paix se négociera d’abord entre Israéliens et Palestiniens ». Ehoud Olmert est venu lui dire qu’en la matière, il ne faut pas trop rêver à une « percée historique » à Annapolis, dans la réunion internationale initiée par Washington.

Lundi soir, Ehoud Olmert avait rendez-vous avec la communauté juive de France, la plus importante d’Europe, avec ses 500 à 700 000 âmes. En juillet 2004, l’ancien Premier ministre, Ariel Sharon, avait fait scandale en France et aussi beaucoup blessé en appelant les juifs de France à émigrer en Israël. « C’est absolument nécessaire pour les juifs de France, ils doivent bouger immédiatement car en France, il se répand un antisémitisme déchaîné ». Aujourd’hui encore, Israël multiplie les incitations à l’immigration pour contrebalancer la poussée démographique arabe. Mais en 2004, Ariel Sharon entendait en même temps disqualifier la France accusée de mener une politique pro-arabe. Aujourd’hui, avec Nicolas Sarkozy, cette accusation est tombée.

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Monique Mas - RFI, le 22 octobre 2007


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