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Sud-Liban : les sous-munitions israéliennes continuent de tuer

samedi 13 octobre 2007 - 06h:15

Mouna Naïm - Le Monde

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"Vivre avec ces engins toute la vie et éventuellement en mourir, ou s’atteler au nettoyage"




Le jeudi 11 octobre, les équipes de démineurs de toutes les organisations spécialisées opérant dans le sud du Liban sous l’égide des Nations unies ont cessé leur travail de terrain. L’un de leurs collègues, un citoyen anglais âgé de 36 ans, a été tué dans la région de Bint Jbeil par l’explosion d’un des engins de mort contenus dans les bombes à sous-munitions tirées par l’armée israélienne dans les trois derniers jours de la guerre de l’été 2006 qui l’a opposée au Hezbollah libanais.

L’arrêt de travail, par respect pour la victime, est devenu une tradition des 76 équipes de déminage - celles de l’armée libanaise exclues - en activité dans le sud du Liban, explique Dalya Farran, chargée des relations avec la presse au centre de coordination de l’ONU pour le déminage de la région. Depuis le début de leur mission, ces équipes ont perdu 13 hommes, tandis que 32 autres ont été blessés. Vingt-cinq civils ont par ailleurs été tués et 185 autres blessés par l’explosion de ces engins.

En un peu plus d’un an, les démineurs ont désamorcé ou fait exploser plus de 130 000 sous-munitions. Un chiffre énorme, mais qui apparaît dérisoire au regard du près d’un million de sous-munitions non explosées disséminées sur une superficie estimée à plus de 38 millions de mètres carrés. Le problème, explique Melle Farran, c’est qu’Israël n’a donné, à ce jour, aucune réponse aux demandes répétées de l’ONU lui réclamant des informations sur les sites visés par les bombes à sous-munitions.

Autant dire que les démineurs travaillent presque en aveugle, découvrant pratiquement à tâtons les sites "contaminés". Prioritaire, le nettoyage des habitations est désormais terminé, mais les champs sont toujours infestés par ces engins. Il y en aurait même des couches superposées dans certaines zones bombardées à plusieurs reprises.




Jeunes femmes

"Juste après la guerre, on en trouvait partout : dans les arbres, sur les réverbères, sur les toits des maisons, dans les champs", raconte Jean-Claude Amand, superviseur technique de l’équipe de démineurs de l’association Fondation sud (FSD) dans le village de Siddiqine. L’urgence a été assurée par les associations qui étaient chargées de neutraliser les champs de mines laissés par l’armée israélienne lors de son retrait du Liban sud en l’an 2000. FSD et Handicap International ont pris la relève. Elles sont toutes deux financées, comme les britannique MAC et danoise DCA, par le programme humanitaire européen Echo. C’est à leurs équipes qu’est revenue la "difficile et ingrate" tâche de défrichage et de nettoyage des lieux. M. Amand, de nationalité vietnamienne, a trouvé ici certaines des sous-munitions dont l’armée américaine avait arrosé le Vietnam.

Les démineurs sont dans leur écrasante majorité des Libanais qui ont reçu une formation sur place par des expatriés. Comme le dit le jeune Akl Mahmoud, de FSD, ils ont estimé qu’ils avaient le choix entre "vivre avec ces engins toute la vie et éventuellement en mourir, ou s’atteler au nettoyage". Akl a abandonné son emploi à Beyrouth pour s’engager, comme l’ont fait avant lui ses deux frères, enrôlés dans d’autres ONG. Les salaires que les démineurs perçoivent ne sont pas sans attrait : un minimum de 750 dollars dans un pays, et surtout une région, où le chômage est presque la règle et où les salaires sont dérisoires.

Plus surprenant est le nombre de jeunes femmes démineurs. Elles sont pourtant en majorité originaires de ce sud très conservateur. Le voile des musulmanes n’est visiblement pas, pour elles, un handicap. Chez MAC, l’ONG britannique basée dans la région de Tyr, elles sont âgées de 20 à 36 ans et tout aussi résolues que leurs collègues masculins dont elles ont gagné le respect, malgré les réticences formulées dans un premier temps par l’armée et par l’ONU. Quelques-unes n’excluent pas de s’expatrier si on le leur propose, à l’image de l’une de leurs chefs, Leopard Zhubi, de nationalité kosovare, employée, comme son époux, par MAC.


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Tyr, Siddiqine envoyée spéciale - Le Monde, édition du 13 octobre 2007


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