16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Bush pourrait bien avoir donné à Abbas le baiser qui tue

samedi 1er septembre 2007 - 23h:05

Adam Morrow et Khaled Moussa al-Omrani - IPS

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


Le Caire - Inter Press Service - Depuis la prise de contrôle de Gaza il y a deux mois par le mouvement Hamas de la résistance palestinienne, Washington et ses alliés ont avec constance soutenu le mouvement rival du Fatah dirigé par le Président de l’Autorité Palestinienne (AP) Mahmoud Abbas. Mais la popularité du Fatah, vu maintenant par beaucoup comme un faire-valoir de Washington et de Tel Aviv, a nettement chuté.

JPEG - 10.6 ko
Mai 2005 - Abbas et Bush - Photo AFP

« Le soutien populaire à Abbas et au Fatah a dégringolé pour plusieurs raisons, » a déclaré à l’IPS Essam al-Arian, un des principaux responsables de la confrérie des Frères Musulmans. « La première c’est qu’Abbas semble prêt à faire à Israël toutes les concessions voulues sans rien obtenir en échange. »

En mi-juin, le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza à la place du gouvernement d’Abbas soutenu par les Etats-Unis, divisant avant tout le corps politique palestinien en deux entités géographiques distinctes. Depuis lors, l’administration Bush - suivie par la plupart des médias occidentaux — a présenté d’une seule façon le conflit comme étant entre le Hamas « extrémiste » dans la bande de Gaza et le Fatah « modéré » en Cisjordanie.

« Le conflit à Gaza et en Cisjordanie aujourd’hui est une lutte entre extrémistes et modérés, » a déclaré le Président George Bush juste après le renversement.

Israël s’est aussi précipité pour soutenir la cause d’Abbas et de son mouvement le Fatah en tant que contrepoids « modéré » au Hamas. Dans une tentative faite pour isoler le mouvement de résistance que Tel Aviv nomme une « organisation terroriste, » le premier ministre israélien Ehud Olmert a promis de soulager les conditions de vie en Cisjordanie tout en maintenant un embargo économique destructeur sur la bande de Gaza dominée par le Hamas.

« Abbas espère que les améliorations sur le plan économique en Cisjordanie, conjuguées avec les difficultés supportées dans Gaza, élargiront son soutien dans le public, » a déclaré à l’IPS Emad Gad, analyste au centre semi-officiel d’Al-Ahram pour les études politiques et stratégiques et expert dans les questions israéliennes.

Dans une autre manoeuvre pour renforcer la position d’Abbas vis-à-vis du Hamas, Olmert avait annoncé le mois dernier la libération des prisons israéliennes d’environ 250 prisonniers affiliés au Fatah.

En attendant, les alliés arabes « modérés » Washington dans la région — emmenés par l’Egypte, la Jordanie et les état du Golfe — ont suivi l’exemple des Etats-Unis en décidant de soutenir Abbas et son gouvernement d’urgence dirigé par Salam Fayyad.

Lors de sa visite à Washington le mois dernier afin de discuter avec les responsables de l’administration des Etats-Unis, le ministre égyptien des affaires étrangères, Ahmed Aboul-Gheit, faisait encore référence à Abbas comme seul représentant « légitime » des Palestiniens. Il a repris l’incantation officielle selon laquelle la prise de pouvoir par le Hamas dans Gaza avait été un « coup militaire » illégal.

Mais tandis que la plupart des capitales arabes ont déclaré leur soutien à Abbas et à son gouvernement, une grande partie du public arabe a été troublée par certains aspects de la trajectoire politique du président de l’AP après les évènements de Gaza.

D’abord, le soutien israékien évident à Abbas a eu pour effet de renforcer son image en tant qu’allié de fait de l’état juif contre le Hamas.

« Abbas semble maintenant s’activer entièrement selon l’agenda américain et israélien, » a déclaré à l’IPS Abdel-Halim Kandil, ancien rédacteur-en-chef de l’hebdomadaire d’opposition Al-Karama. « La prétendue AP est devenue guère plus qu’un gestionnaire de la sécurité pour l’occupation israélienne.

« Israël peut bientôt réoccuper la bande de Gaza dans le but d’écarter définitivement le Hamas du pouvoir, » a joute Kandil. « Dans ce cas-là Abbas sera alors perçu par beaucoup comme rien de moins qu’un soldat de l’armée israélienne. »

Tout en démentant dans les faits la présentation du Fatah comme « modéré », Abbas, suivant le souhait de Washington et Tel Aviv a loyalement refusé de discuter avec le Hamas depuis le renversement de situation dans Gaza. « Il n’y aura aucun dialogue avec les instigateurs du coup, » a déclaré Abbas.

Le Hamas, en revanche, a avec constance réclamé des négociations avec ses rivaux du Fatah. Dans un communiqué publié le mois dernier, le mouvement de résistance a réitéré son appel pour le dialogue, « en dépit du refus répété par le président de l’AP de tenir des entretiens. »

Mais le refus crispé d’Abbas de négocier a uniquement renforcé la perception du Hamas comme la partie la plus raisonnable dans le conflit.

« Il est remarquable qu’Abbas aille courir à des entretiens de prise avec les officiels israéliens, qui exigent de lui d’impossibles concessions, tout en rejetant simultanément le dialogue avec le Hamas, » a estimé Al-Arien.

Selon Kandil, l’intransigeance d’Abbas peut être directement attribuée au rapport étroit qui existe entre président de l’AP avec ses patrons à Washington. « Abbas ne peut pas tenir des pourparlers avec le Hamas parce que les Etats-Unis et Israël ne le lui permettront pas. »

Pour preuve, le 8 août, Steny Hoyer, chef de la majorité des deux chambres aux Etats-Unis a ouvertement averti Abbas à propos de contacts, publics ou secrets, avec la mouvement de résistance. Hoyer a été cité dans la presse israélienne comme disant : « Traiter avec le Hamas... serait quelque chose qui nous regarderions avec suspicion et opposition ».

L’image du Fatah a été également été ternie par les révélations qui ont été rendues publiques à la suite du changement dans Gaza concernant un plan infructueux pour chasser le Hamas du pouvoir. Selon des officiels du Hamas, le « plan de Datyton » — appelé d’après le nom du général américain Keith Dayton — avait été programmé pour être déclenché le 13 juillet.

L’opération devait être menée par l’homme fort du Fatah, Mohammad Dahlan, avec l’appui logistique de la CIA (Central Intelligence Agency), selon le Hamas.

« Ils projetaient effectuer un coup sanglant contre le Hamas, impliquant le meurtre de centaines de personnes, dont des chefs politiques du Hamas et des chefs religieux, » selon les déclarations du responsable du Hamas Yehia Moussa, lors d’une conférence de presse le 21 juin. « Mais nous sommes parvenus à contrecarrer leurs plans avant qu’ils ne puissent les mener à bien. »

Moussa est aller jusqu’à indiquer que Dayton avait fourni Dahlan et les agences de sécurité affiliées au Fatah en armes lourdes et en munitions dans le but de liquider définitivement la direction du Hamas dans Gaza.

« Le ainsi nommé plan Dayton visait à manipuler les Palestiniens pour qu’ils se fassent la guerre les uns contre les autres, » a encore dit l’Al-Arien.

Ibrahim Eissa, analyste politique et rédacteur-en-chef du quotidien indépendant Al-Dustour a dit croire que la prise de contrôle du Hamas sur le territoire le 14 juin avait eu caractère « préventif ».

« Le conflit n’est pas entre les laïcs et les islamistes, » a dit Eissa à l’IPS. « Il est entre les agents corrompus des Etats-Unis dans le Fatah et ceux qui prennent en compte les intérêts des Palestiniens. »

De façon notable, la secrétaire d’état américaine Condoleezza Rice a signé un accord avec Fayyad à Ramallah le 3 août engageant Washington à verser 80 millions de dollars pour le « développement » des agences palestiniennes de sécurité sous commandement du Fatah. Les instructeurs du bureau du département d’état américains de la sécurité diplomatique sont censés débuter la formation des unités de la garde présidentielle d’Abbas au début de l’année prochaine.

Le « riz n’est pas venu pour nous aider à établir un état palestinien, » a déclaré Sami Abuzahri, porte-parole du Hamas au quotidien pro-gouvernemental Al Ahram. « Elle est venue pour soutenir une faction palestinienne aux dépens des autres. »

Selon Kandil, l’apparente érosion du soutien populaire dont dispose le Fatah n’est pas vraiment un phénomène récent.

« Le déclin de la popularité d’Abbas et du Fatah dans l’opinion arabe — et palestinienne - n’est rien de neuf, » a-t-il dit. « Elle est tout à fait évidente depuis janvier de l’année passée, lorsque le Hamas a étonné tout le monde en gagnant une large majorité lors des élections parlementaires qui s’étaient déroulées de façon démocratiques. »

22 août 2007 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
[Traduction : APR - Info-Palestine.net]


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.