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D’abord, s’attaquer aux colonies et au mur israéliens

dimanche 5 août 2007 - 14h:55

Stephanie Koury - The Daily Star

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Bush a raison de dire que c’est le moment de faire un choix, mais ce choix appartient aux Etats-Unis et aux autres membres du Quartet.

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Demander aux Palestiniens de négocier sur les "réalités actuelles"
tout en laissant se poursuivre la colonisation est voué à l’échec.

Récemment, le Président US, George W. Bush, annonçait un plan pour fournir une aide directe au gouvernement du Président palestinien, Mahmoud Abbas, et pour réunir une conférence internationale afin d’obtenir une paix israélo-palestinienne et une solution à deux Etats. Son initiative suit de très près la nomination par le Quartet de l’ex-Premier ministre britannique, Tony Blair, comme délégué pour le Moyen-Orient et dont le mandat est de superviser la réforme palestinienne.

Si ces dernières initiatives semblent indiquer une démarche sérieuse de la part du Quartet, ses efforts seront une nouvelle fois réduits à néant s’il ne s’attaque pas immédiatement à la construction par Israël des colonies et du mur de séparation en Cisjordanie occupée, et s’il ne revient pas sur sa volonté d’isoler le Hamas. Jusqu’à aujourd’hui, le Quartet n’a guère été disposé à agir dans ce sens.

Depuis l’élection du Hamas en janvier 2006, le Quartet, mené par les USA, a poursuivi une politique d’isolement du Hamas et de renforcement du Fatah, sans y réussir et, parfois, avec des conséquences dévastatrices. D’abord, le Quartet a coupé l’aide financière et tout contact politique avec l’Autorité palestinienne (AP) dirigée par le Hamas. Il espérait ainsi faire pression sur le Hamas pour qu’il renonce à la violence, reconnaisse Israël et accepte les précédents accords. Cet arrêt des aides a sapé la construction de l’institution palestinienne, approfondi la crise humanitaire et aggravé l’instabilité politique.

Le Hamas a sans doute satisfait aux conditions du Quartet, bien qu’indirectement, en cessant les attentats suicide, en participant aux élections de l’AP, en acceptant d’examiner les accords existants et en marquant sa volonté de négocier avec Israël la fin de l’occupation. Cependant, le Quartet, en réponse, n’a aucunement modifié sa politique. Il a poursuivi le boycott du Hamas, même après qu’un gouvernement d’union nationale Hamas/Fatah ait été formé au début de l’année, et les USA ont secrètement cherché à renforcer le Fatah, financièrement et militairement. Cette approche a abouti le mois dernier à des affrontements violents et à la maîtrise de Gaza par le Hamas.

En lançant son initiative, Bush a présenté le Hamas comme le méchant et le Fatah comme le bon, décrit le conflit dans Gaza et en Cisjordanie comme un combat entre extrémistes et modérés, et appelé le peuple palestinien à choisir. Cela amène à se poser une question : qu’offrent réellement Bush et le Quartet en demandant aux Palestiniens de faire un choix ?

Il y a trois ans (le 9 juillet 2004), la Cour internationale de Justice rendait un avis déclarant illégales l’implantation des colonies et la construction du mur à l’intérieur de la Cisjordanie. Elle demandait à Israël d’en cesser la construction et d’indemniser les Palestiniens. Depuis, Israël a achevé 200 km supplémentaires de construction pénétrant profondément à l’intérieur de la Cisjordanie.
Les Palestiniens - ceux-là mêmes auxquels Bush demandent de faire un choix - se voient refuser l’accès à leurs champs, ils sont privés de leurs ressources économiques et confrontés souvent à des obstacles insurmontables pour accéder aux soins médicaux et envoyer leurs enfants à l’école, cela à cause du mur d’Israël, de ses colonies et de son régime de bouclages. Les Etats de la communauté internationale n’ont manifesté aucune intention de contraindre Israël à déplacer le mur à l’intérieur de son propre territoire et de cesser son expansion coloniale [comme la Cour internationale le leur demandait - ndt]. Cette carence est plus flagrante encore avec l’aveu du gouvernement israélien d’avoir planifié une expansion coloniale qui a déterminé le tracé du mur, et à la lumière de ses déclarations reconnaissant que le mur est prévu pour former ses futures frontières politiques.

D’ailleurs, ces Palestiniens - auxquels Bush demande de faire un choix - n’ont nul besoin de se référer au rapport de la Banque mondiale de 2007 pour savoir que l’accès à 50% de la Cisjordanie leur est interdit du fait des mesures unilatérales israéliennes ; nul besoin non plus de lire que les principales routes de Cisjordanie leur sont interdites ou qu’ils n’y ont qu’un accès très limité afin que les colons israéliens puissent se déplacer plus facilement entre leurs colonies et le territoire de l’Etat d’Israël ; pas davantage que les colonies agricoles israéliennes dans la vallée du Jourdain prospèrent pendant que l’économie palestinienne s’atrophie. Ce sont ces questions qui ont discrédité le Fatah qui s’était investi dans le processus de négociations, et qui ont aidé à propulser le Hamas jusqu’à sa victoire électorale de 2006. Ces éléments ont largement été ignorés par les médias occidentaux lesquels, à la place, se sont focalisés sur la corruption du Fatah.

Bush a exigé les efforts d’Abbas pour une réforme institutionnelle et appelé la communauté internationale à le soutenir, dans une étape visant à poser la base d’un Etat palestinien et à aller à des négociations sérieuses avec Israël. Ceci n’est pas, cependant, le type de soutien qu’aurait désiré Abbas ou un quelconque gouvernement d’union nationale palestinien. Ce dont Abbas a besoin, c’est de l’arrêt par Israël de sa colonisation et de la construction de son mur à l’intérieur de la Cisjordanie, et de voir s’inverser les faits sur le terrain.

Permettre la poursuite des constructions dans l’avant négociations tout en assurant qu’Israël et les Palestiniens doivent négocier les frontières définitives en tenant compte des « réalités actuelles » est une méthode vouée à l’échec. La « réalité actuelle » de l’existence des colonies israéliennes rend tout Etat palestinien non viable. D’ailleurs, fermer les yeux sur l’expansion des colonies permet à cette réalité de se développer sur le terrain et renforce illégalement la position d’Israël à la table de négociations, tout en portant simultanément atteinte à la capacité des Palestiniens de former un Etat viable. Pourquoi ces « réalités actuelles » ne seraient-elles pas la situation désespérée des Palestiniens chassés de leurs maisons et de leur terre en Cisjordanie à cause des actes illégaux et unilatéraux des Israéliens ?

Si Bush et le Quartet veulent vraiment s’engager dans une solution viable à deux Etats, ils doivent contraindre Israël à retirer ses colonies et son mur de la Cisjordanie occupée. Ils doivent aussi mettre fin à leur isolement du Hamas et favoriser une réconciliation nationale. Une société palestinienne divisée en factions, tout comme un Etat palestinien morcelé et sans ressources, ne sert ni les intérêts des Palestiniens ni ceux des Israéliens. Bush a raison de dire que c’est le moment de faire un choix, mais ce choix appartient aux Etats-Unis et aux autres membres du Quartet.

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La colonie Ma’ale Adumin, à l’est de Jérusalem,
au coeur de la Cisjordanie.

Stephanie Koury, ancienne conseillère juridique de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et membre de la délégation palestinienne pour le dossier sur le mur de séparation d’Israël devant la Cour internationale de Justice, est chercheur universitaire avec Sir Joseph Hotung à l’Université de Londres et se concentre sur les parties tiers aux conflits. Elle écrit pour le Daily Star.

Sur la colonisation de la Cisjordanie occupée :

- Le Mur - Trois ans après la décision de la CIJ, l’accès à leurs terres est toujours refusé aux Palestiniens - The Electronic Intifada - juillet 2007.

- Les check-points : Les check-points israéliens dans les Territoires occupés - Miftah - août 2007.

- Les enclaves : "La vie en cage : les enclaves palestiniennes" - Palestinian Agricultural Relief Committees.

27 juillet 2007 - The Daily Star- traduction : JPP


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