16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Mohammad Fneich (Hezbollah) : "L’approche française est plus équilibrée"

dimanche 15 juillet 2007 - 06h:20

Sibylle Rizk - Le Figaro

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


Le ministre démissionnaire Mohammad Fneich représente le Hezbollah à la réunion interlibanaise qui s’ouvre aujourd’hui. Cette participation est un événement en soi pour le Parti de Dieu, qui acquiert ainsi une reconnaissance dépassant celle de ses alliés syrien et iranien. Mohammad Fneich a expliqué au Figaro comment le Hezbollah abordait la rencontre.


Comment avez-vous réagi aux déclarations de Nicolas Sarkozy invitant le Hezbollah à cesser ses actions terroristes ?

JPEG - 7.9 ko
Mohammad Fneich

Nous avons envisagé dans un premier temps de renoncer à nous rendre à Paris, car de tels propos nous portent préjudice. Mais un communiqué de clarification des autorités françaises a ensuite rectifié les choses.

Qu’attendez-vous de la réunion de La Celle-Saint-Cloud ?

Nous étions dès le départ favorables à l’initiative française. D’autant que la France a modifié son approche de la question libanaise, qui est désormais plus équilibrée, au moins dans la forme. Ce n’est un secret pour personne que la précédente équipe avait pris ouvertement parti pour un camp. La nouvelle administration tire les leçons de cette expérience politique, qui n’a fait qu’exacerber la crise. La France sait que si elle veut continuer de jouer un rôle au Liban elle n’a pas intérêt à ce que la situation y devienne incontrôlable. Ses objectifs diffèrent en cela de ceux des États-Unis, qui se servent du Liban pour satisfaire leurs intérêts régionaux. Désormais, l’objectif français semble être de vouloir rapprocher les Libanais. Cette initiative pourrait créer un climat positif en mesure d’ouvrir la voie à une éventuelle solution.

Quelles sont les chances de succès de la conférence ?

Le dialogue ne sera pas fructueux si toutes les parties ne prennent pas conscience du danger d’arriver à l’élection présidentielle libanaise (en septembre, NDLR) sans entente interne préalable destinée à résoudre la crise du pouvoir exécutif. Cela passe par l’acceptation du principe d’un partenariat véritable, faute de quoi le pays s’enfoncera dans l’inconnu. Le camp au pouvoir doit faire comprendre à ses amis américains que leurs intérêts nationaux diffèrent des calculs régionaux des États-Unis. La position du Hezbollah est claire, nous voulons la fin des pratiques hégémoniques du camp au pouvoir et revenir aux pratiques institutionnelles normales.

Le saut dans l’inconnu que vous craignez comprend-il des risques d’une guerre entre sunnites et chiites ?

Certainement pas. Pour le Hezbollah en tout cas, il s’agit d’une ligne rouge.

Percevez-vous une différence de politique entre l’Iran et la Syrie au Liban, la première ayant davantage intérêt à sa stabilité que la seconde ?

Il n’y a pas de différence sur le plan stratégique. Mais chacun a ses particularités. La Syrie est le voisin direct du Liban à qui elle est donc liée par des intérêts vitaux. Elle se perçoit aujourd’hui comme la cible principale de l’offensive américaine qui passe par le Liban. Or, il est évident que si Damas considère que le système politique libanais allié à ses adversaires constitue un danger pour sa sécurité et ses intérêts, elle ne va pas rester sans réagir. Il faut comprendre une réalité géopolitique essentielle : faute d’établir des relations amicales avec la Syrie, le Liban est voué à l’instabilité politique et économique.

Les armes dont dispose le Hezbollah n’autorisent-elles pas vos rivaux libanais à se sentir menacés ?

La résistance est le résultat de l’occupation. Nous avons pris les armes pour défendre notre terre. Elles n’ont jamais servi pour obtenir des victoires internes. Celui qui invente des peurs en ce sens a des motivations politiciennes. Elles ne sont pas réalistes.

Qui a commis selon vous l’attentat par lequel six Casques bleus espagnols ont été tués le 24 juin au Liban-Sud ? La Syrie manipule-t-elle des groupuscules islamistes sunnites ?

La déclaration d’Ayman Zawahiri (le numéro deux d’al-Qaida) fait office de revendication de mon point de vue. Al-Qaida considère la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) comme une puissance occupante et a été jusqu’à nous accuser de protéger la frontière israélienne en acceptant la présence des Casques bleus. Personne ne peut démêler le jeu des services de renseignements de toutes sortes, mais je ne crois pas possible d’imputer à la Syrie les agissements d’al-Qaida au Liban.

La guerre de l’été 2006 a été déclenchée à la suite de la capture par le Hezbollah de soldats israéliens. Où en est le dossier de l’échange de prisonniers ?

Il ne dépend pas uniquement du Hezbollah. Nous sommes entièrement disposés à réaliser une opération d’échange de prisonniers et l’ONU est en train de jouer les intermédiaires. Nous avons déclaré dès le premier instant que l’objectif de notre opération était de parvenir à un tel échange. Il s’agissait pour nous d’un moyen de pression sur Israël. Mais elle a servi de prétexte pour déclencher une offensive préméditée par Israël et les États-Unis. Il est apparu que la guerre était avant tout américaine. Condoleezza Rice l’a énoncé clairement en disant qu’elle symbolisait l’accouchement du nouveau Moyen-Orient.

Êtes-vous en train de réarmer, en prévision d’une nouvelle guerre ?

Le Liban est dans la tourmente depuis la création de l’entité sioniste. Notre expérience nous a appris que les crises régionales se répercutent d’une façon ou d’une autre au Liban. Par conséquent, nous n’allons pas céder à l’illusion béate que tous les dangers ont disparu. L’arsenal dont dispose le Hezbollah est largement suffisant.


A propos de la conférence interlibanaise :

- Sarkozy invite le Hezbollah à Paris
- La France inquiète d’un enlèvement de membres du Hezbollah sur son territoire ?

Sibylle Rizk - Le Figaro, le 14 juillet 2007


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.