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Chaos en Palestine : La responsabilité israélo-américaine

samedi 30 juin 2007 - 06h:08

Pascal Boniface - Réalités Online

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Le coup de force du Hamas qui a pris le pouvoir sur l’ensemble de la Bande de Gaza a plongé les observateurs de la scène palestinienne dans un abyme de stupéfaction.

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Pascal Boniface

Comment a-t-on pu en arriver là ? Pourquoi l’accord de La Mecque, qui mettait en place un gouvernement d’Union nationale, conclu sous les auspices du roi d’Arabie saoudite (le même qui a proposé un plan global de paix à Israël en échange de la création d’un Etat palestinien), n’a-t-il pas tenu ? N’est-ce pas la fin de la perspective de la création d’un Etat palestinien ? Comment expliquer que l’on puisse en être arrivé à un tel degré de haine entre Palestiniens au moment même où la situation de la population s’est dégradée comme jamais, à la limite d’être désespérée ?

Les Palestiniens sauront-ils refaire leur unité ou vont-ils pour leur plus grand malheur s’enfoncer dans des affrontements intenses et sanglants dans une spirale conduisant au chaos le plus absolu ? La ligne jaune semble avoir été franchie entre le Hamas et le Fatah, chacun accusant l’autre de faire le jeu d’Israël. Ce qui est certain, c’est que la cause et la population palestiniennes, sont les premières victimes de la situation. Et cela au moment même où le rapporteur de l’ONU dans un document met en cause l’attitude des Etats-Unis qui, par leur volonté de ne pas traiter avec le gouvernement du Hamas, ont contribué à saper les institutions palestiniennes et affaiblir les modérés qu’ils affirment vouloir aider. Et au moment où, dans son rapport annuel qui vient d’être publié, Amnesty International estime que « dans les Territoires palestiniens occupés les autorités israéliennes ont pris une série de mesures qui ont pour effet d’asphyxier l’économie locale », et que « Privée de justice, sans espoir que l’occupation se termine, la population palestinienne, majoritairement jeune, se radicalise ».

Le Fatah a de lourdes responsabilités. Mahmoud Abbas, impuissant, est resté accroché à l’idée d’une intervention américaine en sa faveur ou d’un début de négociation réelle avec les Israéliens qui n’est jamais venue. Se voulant modéré, il a été jugé impuissant par une large partie des Palestiniens. Le luxe dans lequel vivent certains responsables du Fatah a également attisé la colère de la population. Mais le Hamas n’a pas suffisamment pris en compte la bataille de l’opinion internationale. Si les tirs de roquette à partir de Gaza n’ont eu aucun effet militaire, ils ont eu en revanche un effet politique désastreux sur l’opinion internationale.

Les Américains et Européens disent soutenir Mahmoud Abbas et appellent à l’aider. Mais n’est-ce pas trop tard ? N’aurait-il pas mieux valu le faire avant ? Car qu’a obtenu Mahmoud Abbas de sa volonté de conciliation ? Rien. Absolument rien sur le plan politique, sauf la participation à quelques réunions stériles avec certes des déclarations verbales favorables mais sans effets concrets sur le terrain. Le président palestinien a toujours voulu négocier mais il n’a jamais obtenu d’Israël l’ouverture de négociations. Il a donc perdu de sa crédibilité auprès des Palestiniens.

La décision des Occidentaux de couper l’aide donnée au gouvernement à partir du moment où le Hamas y participait est venue ajouter au désordre ambiant. Tout d’abord, cette aide n’est en fait qu’une très modeste et insuffisante compensation à l’impossibilité pour les Palestiniens de développer leur économie du fait de l’occupation. Si les Palestiniens étaient libres de produire, de se déplacer et d’exporter, ils n’auraient pas besoin d’aide. De plus, la suspension de cette aide n’a pas été vraiment corrigée par l’octroi de dons aux ONG. C’est en effet l’ensemble du tissu institutionnel palestinien qui a été affaibli. On en voit l’effet aujourd’hui. Les avertissements de toute nature sur les dangers d’isoler un peu plus les Palestiniens avaient pourtant été lancés. Israël n’a rien voulu entendre et la communauté internationale a laissé faire.

Israël ne devrait pas se réjouir de ce qui se passe. Certes, un calcul à court terme peut faire penser à certains que les affrontements inter-palestiniens sont favorables à l’Etat hébreu. L’affaiblissement mutuel des Palestiniens vient en effet faire baisser la pression (déjà faible) sur Israël. Comment faire la paix avec les Palestiniens s’ils ne sont pas capables de la faire entre eux ?, entend-on déjà. Le problème, c’est que la paix n’avait pas été vraiment recherchée lorsqu’il y avait une entente de Palestiniens. Le retrait unilatéral de Gaza montre également ses limites : celles de toute politique unilatérale. En tant que puissante occupante, elle est responsable de ce qui se passe.

En tous les cas, aujourd’hui, faute d’avoir négocié avec Abbas, Israël voit le Hamas contrôler tout Gaza. Perspective peu réjouissante, pas plus que le scénario parfois évoqué du chaos. Mais Israël n’a pas intérêt à voir le chaos s’installer à Gaza car par définition le chaos est incontrôlable et ne s’arrête pas aux frontières.

Du même auteur :

- La cause palestinienne et la menace jihadiste
- Les Musulmans américains : l’inattendue intégration

Pascal Boniface - Réalités Online, le 21 juin 2007


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