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Afghanistan, Irak : quand la mort vient du ciel

mardi 5 juin 2007 - 06h:36

Alain Gresh - Le Monde diplomatique

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2000 civils irakiens ont été tués durant le mois de mai, selon le gouvernement de Bagdad. Ces chiffres sont supérieurs de 30% à ceux du mois d’avril. Le nombre de civils tués en Afghanistan est aussi en augmentation. Un des aspects méconnus de ces guerres est le rôle de l’aviation dans les opérations. « Si l’OTAN poursuit sa politique de raids aériens durant toute l’année 2007, elle perdra la guerre contre les talibans », affirme Ahmed Rashid, un journaliste pakistanais, dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, traduit en français sur le site Bassirat.net, le 31 mai. Très favorable à un engagement militaire plus soutenu des Occidentaux dans ce pays, il écrit toutefois : « Par ses frappes aériennes, l’OTAN s’est aliéné le sud de l’Afghanistan et elle a totalement modifié la situation. Elle cherchait naturellement à protéger ses propres soldats, mais elle a désormais besoin de troupes supplémentaires au sol. Si l’OTAN poursuit sa politique de raids aériens durant toute l’année 2007, elle perdra la guerre contre les talibans. »

Selon un article publié par CBS News, le 1er juin, « U.S. General Defends Afghan Airstrikes », le président afghan Hamid Karzai, réagissant au nombre de civils tués dans des opérations aériennes et terrestes des Etats-Unis, a déclaré, le 2 mai, que son gouvernement « ne pouvait plus longtemps accepter » ces pertes. Le 8 mai, la chambre haute du parlement afghan a adopté une résolution appelant à un cessez-le-feu et à des négociations avec les talibans.

Selon Bennett, le chef de la section des droits humains de la mission d’assistance des Nations unies à l’Afghanistan, entre 320 et 380 civils auraient été tués durant les combats des quatre derniers mois.

Philippe, de Tours, signale aussi l’article de Antiwar.com, du 25 mai, « The Air War in Iraq Uncovered », de Nick Turse et Tom Engelhardt

Au cours des derniers mois, alors que les talibans renaissent en Afghanistan et que les troupes de l’OTAN manquent de moyens, « on a fait de plus en plus appel à la puissance aérienne et les pertes civiles ont augmenté. Et les Afghans ont été de plus en plus en opposition à cette politique ». Les auteurs indiquent également que, en Irak, l’armée américaine fait aussi de plus en plus appel à l’aviation, avec les pertes civiles qui s’ensuivent.

Cela me remet en mémoire le livre de Sven Lindqvist Maintenant, tu es mort. Histoire des bombes, publié par le Serpent à plumes, et dont Le Monde diplomatique a publié des bonnes feuilles sous le titre « La mort venait du ciel ». L’auteur rappelle l’une des premières utilisations de la guerre aérienne, en 1922, en... Irak.

« En février 1923, Lionel Charlton, officier d’état-major récemment arrivé à Bagdad, visite l’hôpital de Diwaniyya. S’attendant à des diarrhées et à des jambes cassées, il se trouve tout à coup devant le résultat d’une frappe aérienne britannique. Et la différence entre une matraque de police et une bombe vous saute aux yeux assez brutalement.

En tant qu’officier, s’il s’était agi d’une guerre ou d’une insurrection ouverte, il n’aurait fait aucune objection, écrit-il dans ses mémoires, mais ce "bombardement aveugle d’une population avec le risque de tuer des femmes et des enfants, tenait du massacre gratuit".

Bientôt, un nouveau cheikh lève l’étendard de la révolte et il doit être puni. Mais le frapper, lui précisément, d’une hauteur de 1000 mètres, n’est pas facile. (...) A-t-on le droit de faire payer les crimes d’un seul homme à une ville entière ? Et d’ailleurs, est-il vraiment un criminel ? (...) Bombarder une ville sur de telles bases est une forme de despotisme qui risque de faire encore plus détester les Britanniques. (...)

Comme on pouvait s’y attendre, une vingtaine de victimes, femmes et enfants, périssent quand on bombarde le cheikh insurgé. Charlton n’en peut plus. Il demande à être relevé de son poste pour cas de conscience. Le quartier général l’envoie en Angleterre, où il est mis à la retraite d’office en 1928. »


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Alain Gresh - Le Monde diplomatique, blog Nouvelles d’Orient, le 3 juin 2007
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