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Mettre fin au sionisme : une question féministe

dimanche 27 juillet 2014 - 07h:30

Nada Elia

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Alors que l’offensive contre la population assiégée de Gaza est dans sa troisième semaine, nous entendons toujours parler du « nombre disproportionné » de femmes et d’enfants qui en sont les victimes. Cette expression pose la question : ce serait quoi, un nombre "proportionné" de femmes et d’enfants dans un génocide ?

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Israël dénie aux femmes leur droit fondamental de liberté de mouvement (Issam Rimawi / APA images)

Comme l’écrit Maya Mikdashi sur le site Jadaliyya dans son éditorial intitulé « Les hommes palestiniens peuvent-ils être victimes ? », si une majorité significative des tués étaient des hommes adultes, les crimes d’Israël en seraient-ils minorés ?

Une analyse différente de la violence liée au genre est nécessaire : il faut qu’elle reconnaisse qu’aucune « proportion » n’est acceptable, parce que toutes ces morts sont déplorables, et pour fournir les outils d’une compréhension différenciée des manifestations de violence.

Appels au viol

Le réseau féministe INCITE ! a toujours compris que la violence d’État est à la fois liée au racisme et au genre.

Le sionisme en est un magnifique exemple. C’est une idéologie raciste fondée sur les privilèges d’un groupe ethno-religieux dominant tous les autres.

Quand un état voit une population – sa population autochtone spoliée, privée de ses droits et occupée – comme une « menace démographique », cette vision est à la fois raciste et ciblant un genre.

Le contrôle raciste d’une population est spécifiquement relié à la violence contre les femmes. Aussi n’est-il guère surprenant que Mordechai Kedar, un haut gradé du renseignement militaire israélien devenu universitaire suggère en fait cette semaine que « violer les femmes et les mères de combattants palestiniens » serait un moyen de dissuasion à l’encontre des militants du Hamas.

Dans le même style, la députée Ayelet Shaked n’a pas essayé de présenter le meurtre d’enfants palestiniens et de leurs mères comme malheureux, disproportionné ou « dommage collatéral – elle les a prônés en déclarant que les femmes palestiniennes devaient être tuées aussi, car elles donnent naissance à de « petits serpents ».

Ce commentaire reflète une infrastructure israélienne destinée à soutenir des taux élevés de fausses-couches en bloquant les ressources fondamentales comme l’eau et les fournitures médicales, en obligeant des femmes enceintes à faire la queue aux postes de contrôle quand elles sont en route pour la maternité, et de façon générale, en créant des conditions inhumaines et invivables aux Palestiniens.

La présente attaque meurtrière contre les Palestiniens de la bande de Gaza a non seulement volé la vie de centaines d’entre eux mais a aussi accru le nombre de fausses-couches, d’accouchements prématurés et d’enfants morts-nés.

Des femmes éthiopiennes-israéliennes, la plupart d’entre elles juives, ont également été soumises à des injections contraceptives imposées sans leur consentement.
Mettre fin au sionisme est une question de justice pour le féminisme et la procréation .

Libérer les femmes ?

Bien sur, la violence de genre en tant qu’outil de colonialisme de peuplement n’est pas une stratégie nouvelle. Colonialisme de peuplement, patriarcat et hypocrisie officielle vont main dans la main.

La France du XIXème siècle prétendait libérer les femmes algériennes tout en mettant le feu à des villages entiers. Le colonisateur blanc proverbial voulait nous faire croire qu’il agissait par altruisme impulsif pour sauver les femmes brunes des hommes bruns, même si le pouvoir colonial qu’il servait paupérisait des régions entières.

Les femmes algériennes ne se sont certainement pas mieux portées grâce au colonialisme français, en fait leurs conditions se sont plutôt dégradées.

L’administration G W Bush s’est félicitée d’avoir censément libéré les femmes afghanes des talibans. Mais nous voyons à travers l’Histoire, et pas seulement en Afghanistan, Iran, Irak, Algérie ou Palestine que les guerres n’ont jamais libéré les femmes ni les gens de couleur non conformes à la loi du genre.

Une nouvelle marque d’hypocrisie

Aujourd’hui Israël a développé un nouveau symptôme de son hypocrisie, puisqu’il se prétend plus civilisé que le peuple palestinien au titre de pays plus accueillant pour les homosexuels. C’est du « pinkwashing » *, une tentative israélienne de détourner l’attention de ses violations des droits de l’homme en soulignant des droits aux homosexuels censément meilleurs.

Mais cette revendication, une fois de plus est raciste.

Tout citoyen juif d’Israël peut et doit servir dans les forces israéliennes d’occupation, mais ce sont les forces meurtrières engagées dans le génocide du peuple palestinien.

Que certains de ses soldats tueurs soient homosexuels, l’armée en est-elle plus morale pour autant ? Arrêtons de chercher à savoir quel est le plus grand pourvoyeur de violence.

Qui dénie aux femmes, enfants, et LGTB palestiniens confondus leurs droits les plus fondamentaux : liberté de mouvement, sécurité, abri, nourriture, maison, … la vie ?

Il faut bien reconnaître que la partie coupable est cet Israël « civilisé » et non pas l’hétéropatriarcale Palestine.

La guerre – le militarisme – est une activité hyper-masculine qui glorifie et récompense toute violence, y compris la violence anti-genre, et un soldat entraîné à la violence ne peut pas mettre cette violence de côté quand il ou elle rentre à la maison.

Toute la société israélienne est entraînée à a violence. La violence, ce n’est pas une paire de bottes militaires qu’on peut abandonner à la porte ; la violence devient une seconde nature (sauf si elle était innée, auquel cas elle va s’aggraver) et la communauté entière qui s’engage dans la guerre est une communauté plus violente – et pas seulement sur le front de guerre.

Une lutte conjointe

C’est ce à quoi nous assistons aujourd’hui, comme nous l’avons déjà observé chaque fois qu’Israël passe à l’escalade guerrière contre le peuple palestinien. Pour les Palestiniens, il n’y a ni « front » ni « zones de guerre ». Toute la Palestine historique est le front chaque fois que des foules israéliennes descendent dans la rue se livrer à des actes de violence.

Cette prise de conscience a toujours été au cœur de l’analyse d’INCITE. Nous avons compris que dans des situations de colonialisme de peuplement les femmes autochtones et les personnes non conformes à la loi du genre font les frais de la connexion entre racisme et sexisme.

Nous sommes engagés dans une lutte conjointe, de l’Inde au monde arabe jusqu’à l’Asie du sud-ouest, à l’Afrique et aux Amériques, pour la dignité et la pleine souveraineté des peuples autochtones.

C’est pourquoi INCITE ! Adhère depuis 2010 à l’action BDS contre Israël et reste engagé dans le combat citoyen contre la violence d’état qui cible le peuple palestinien tout entier et dans la campagne académique pour le boycott académique et culturel (US Campaign for the Academic & Cultural Boycott of Israel).


Nada Elia est une Palestinienne de la diaspora née à Bagdad et formée à Beyrouth, journaliste et reporter de guerre, actuellement enseignante dans plusieurs universités aux Etats-Unis. Elle a publié de nombreuses contributions sur la résistance citoyenne, la dynamique du genre et la solidarité transnationale.

24 juillet 2014 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/conte...
Traduction : Info-Palestine.eu - AMM


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