L’Arabie saoudite a basculé cette nuit dans un état de choc politique et de surprise totale.

Le mois dernier, le Prince Saud Al -Faisal a refusé de prononcer un discours prévu à l’Assemblée générale de l’ONU.

Maintenant, le ministère saoudien des Affaires étrangères a annoncé que le pays ne prendra pas sa place en tant que membre non-permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. C’était la première fois que l’Arabie saoudite avait été élu à la rotation des membres tous les deux ans, que la plupart des pays utilisent pour mettre en évidence les questions présentant un intérêt particulier pour eux et pour tenter d’influencer les leaders mondiaux.

La raison invoquée pour ce refus est que les Saoudiens se sentent gênés par l’échec de la communauté internationale pour résoudre la question palestinienne, pour arrêter le conflit en Syrie, et pour faire du Moyen-Orient une zone exempte d’armes nucléaires.

Le régime saoudien est célèbre pour son absence de démonstrations publiques d’émotion, mais au cours des trois derniers jours, nous avons vu sur les visages de ses dirigeants des points et des points d’exclamation.

Alors qu’est-ce qui se passe ?

La guerre que fait l’Arabie saoudite aux Nations Unies a valeur d’une lettre furieuse destinée à la fois aux États-Unis et à la Russie. Les Saoudiens soutiennent l’opposition syrienne et sont furieux de l’accord sur les armes chimiques qui a sauvé le président Assad d’une frappe militaire américaine dévastatrice.

Encore plus exaspérant est le rapprochement totalement inattendu entre Washington et Téhéran. Ce dernier est l’ennemi régional de l’Arabie Saoudite et les dirigeants saoudiens imaginaient vraiment qu’ils auraient dû être consultés avant que les présidents Obama et Rouhani ne commencent à bavarder au téléphone .

Pour les Saoudiens cette convergence de nouvelles dévastatrices est un tremblement de terre diplomatique.

La justification de Riyad pour son rejet de la chance de briller sur la scène diplomatique internationale n’est pas convaincante. Ses porte-paroles ont accusé l’ONU de doubles standards, mais ce n’est rien de nouveau. La question palestinienne est restée en suspens pendant plus de soixante ans, et l’incapacité à garder la région exempte d’armes nucléaires remonte à des décennies aussi.

Le seul élément qui est nouveau, c’est la Syrie... et les Saoudiens sentent bien qu’ils ne vont pas obtenir ce qu’ils veulent à cet égard, c’est-à-dire une résolution du Conseil de sécurité invoquant le chapitre 7 de la charte qui entérinerait l’usage de la force contre Assad.

Ce refus saoudien aurait été fort et audacieux si cela avait été le cas il y 3 ans, avant que la guerre n’éclate en Syrie. Si Ryad avait vraiment cherché à dénoncer ces doubles standards, cela aurait été admirable et aurait valu beaucoup de respect à l’égard de ce régime dans les milieux arabes et islamiques.

Le fait que ce fut en réaction à l’impossibilité pour l’Amérique de larguer des bombes sur la Syrie, et à son rapprochement avec l’Iran, réduit considérablement cet impact.

La question est maintenant : le régime saoudien ira-t-il dans le sens de la vérité et de la paix ?

La Palestine est sous le choc tandis que les Israéliens continuent de construire plus de colonies et que le fossé entre le le Hamas et l’Autorité palestinienne à Ramallah (PA) semble se creuser chaque jour davantage. Que feront les Saoudiens à cet égard ?

Est-ce que l’Arabie saoudite appellera les Israéliens à abandonner leurs armes nucléaires et insistera pour un désarmement sur toute la région ?

Il sera intéressant d’observer si oui ou non cette attitude morale si élevée sera un phénomène durable ou si ce n’est en fait que le résultat d’un accès de dépit parce que les États-Unis n’ont pas fait ce que Riyad souhaitait à l’égard de la Syrie et de l’Iran.

Des évaluations non confirmées suggèrent que l’Arabie Saoudite a dépensé 5 milliards de dollars en armes et en soutien à l’opposition syrienne, tout comme elle a soutenu et armé les moudjahidins en Afghanistan, d’où la plupart des groupes islamistes extrémistes ont émergé par la suite. Les Saoudiens ont exhorté les groupes islamistes combattants en Syrie à fusionner dans l’Armée islamique et ils voudraient voir son chef, Ahmad al- Jarba, diriger la Coalition nationale syrienne et remplacer le président Assad.

Nous ne pouvons donc croire un seul instant que le rejet par l’Arabie saoudite d’un rôle aux Nations-Unies amènera celle-ci à défendre farouchement la mosquée al-Aqsa ou à faire campagne contre la construction de colonies par Israël.

Si c’était le cas, cependant, cela permettrait d’unifier et de renforcer les Arabes et les musulmans et une grande partie des pays dits émergents.

* Abdel Bari Atwan est palestinien et rédacteur en chef du quotidien al-Quds al-Arabi, grand quotidien en langue arabe édité à Londres. Abdel Bari Atwan est considéré comme l’un des analystes les plus pertinents de toute la presse arabe.

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21 octobre 2013 - Abdel Bari Atwan - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.bariatwan.com/english/?p=1985
Traduction : Info-Palestine.eu - al-Mukhtar