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Retour à la case départ

samedi 23 février 2013 - 07h:29

Saleh al-Naami

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Les efforts déployés par les Palestiniens semblaient bien partis pour parvenir à une réconciliation nationale, mais apparemment, ils se sont effondrés tout comme les précédents accords remis sur la table des négociations, écrit Saleh Al-Naami.

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Décembre 1987 ; première Intifada, ou "Révolte des pierres" - Photo : AFP

Nahla Ouda est une mère de famille âgée de 42 ans. Ce jour-là, elle était un peu agacée par sa voisine Tahani qui, dès potron-minet, vient frapper à sa porte. Bien que les deux femmes se rendent visite assez souvent, Nahla était persuadée que des circonstances exceptionnelles étaient derrière la visite de sa voisine. En effet, Tahani était venue voir Nahla pour la persuader de convaincre ses enfants, Haitham (20 ans) et Eman (21 ans) d’aller s’inscrire sur les listes électorales en vue des prochaines élections.

Sachant que Tahani était une militante du Fatah, Nahla avait compris que sa voisine n’insistait pas pour que les enfants soient en mesure d’exercer leurs droits politiques, mais il s’agissait plutôt de son souhait de voir les deux jeunes voter pour son mouvement le jour où des élections seraient programmées.

En voyant de plus près, on constate que l’attitude de Tahani visant à sensibiliser les gens à profiter de leurs avantages et droits est similaire chez tous les autres militants des différents groupes palestiniens qui, dans les coulisses, mènent une bataille secrète entre les factions, notamment entre le Fatah et le Hamas.

Chaque groupe tient à ce que le plus grand nombre de leurs partisans soient enregistrés sur les listes électorales afin d’assurer des gains et des avantages plus importants que les autres. Chaque faction agit de la sorte sans faire de bruit pour ne pas permettre aux opposants de découvrir les électeurs qu’elle tente d’influencer.

C’est quand même ironique de constater que ces factions palestiniennes se préparent aux élections comme si elles étaient persuadées qu’elles auront lieu ; une idée qui n’a rien à voir avec la réalité, à la lumière des résultats modestes de la réunion de la direction temporaire de l’Organisation de Libération de la Palestine, tenue le 2 février au Caire.

La présence sur la scène palestinienne d’un large fossé entre les parties rivales saute aux yeux. Des sources bien informées ont rapporté à Al-Ahram Weekly que cette réunion avait finalisé un accord sur seulement quelques points de ce qui était inscrit à l’ordre du jour. Selon les mêmes sources, il y aurait juste eu un protocole de réunion au terme duquel, les parties auraient signé un accord sur ce qui a été convenu lors de l’Accord du Caire et la Déclaration de Doha.

Fait étonnant, cependant, c’est que toutes les questions qui ont été précédemment convenues ont été remises sur la table des négociations. La même source explique que la réunion était censée discuter et signer rapidement les détails définitifs, mais au lieu de cela, les débats se sont portés sur presque tous les sujets abordés et convenus auparavant. Ceci n’a qu’une seule explication : la réconciliation est renvoyée à la case départ.

Par ailleurs, et toujours d’après cette source, il y a cinq questions litigieuses qui empêchent une prise de décision sur les dates des élections. Les points de désaccord concernent, entre autres, le système électoral, le Fatah et d’autres factions voulant adopter un système électoral proportionnel à 100% dans les présidentielles, les législatives et les élections du Conseil National, tandis que le Hamas insiste pour que 25% des représentants soient élus par les circonscriptions électorales.

Un autre point de désaccord entre le Hamas et le Fatah touche la désignation automatique des membres du parlement comme membres du prochain Conseil National et ce, sans élections. Le Fatah voudrait que les candidats qui obtiennent des sièges au parlement en Cisjordanie et à Gaza deviennent automatiquement des membres du Conseil National, tandis que le Hamas s’accroche à sa position, à savoir l’organisation d’élections séparées pour choisir les membres du Conseil National en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.

Les sources ont ajouté que les deux mouvements n’arrivent pas à se mettre d’accord sur les compétences de la Commission Centrale Électorale Palestinienne dans sa composition actuelle, pour la supervision des élections du Conseil National. Les factions ne partagent pas la même vision concernant la division des circonscriptions électorales pour la Diaspora Palestinienne. Certaines d’entre elles pensent que la Diaspora doit avoir un représentant, alors que d’autres pensent qu’il devrait y avoir plusieurs circonscriptions. Il y a également désaccord sur la marge de victoire aux élections.

Par ailleurs, notre source d’information est convaincue que d’autres disputes éclateront au grand jour dès que les partis rivaux commenceront à discuter sur les questions de sécurité qui sont encore plus compliquées, et qui ont été reportées à une date ultérieure. Le Fatah et le Hamas ont échangé des accusations sur le rôle des intervenants étrangers dans l’échec qui a marqué la dernière réunion du Caire.

Le Hamas accuse l’ex-président palestinien Mahmoud Abbas de ne pas vouloir la réconciliation dans le but de ne pas rendre furieux les États-Unis et Israël, notamment depuis que le Président Barak Obama a programmé une visite dans la région pour le printemps, au cours de laquelle il s’entretiendra avec Abbas et le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu.

Des sources du Hamas révèlent que durant les réunions du Caire, Abbas avait indiqué que la finalisation de la réconciliation dépendrait de l’accord de toutes les factions sur une « solution à deux États » ; une notion qui est sans doute fermement rejetée par le Hamas et les autres factions.

Il est évident que si la réconciliation est soumise à la condition sine qua non d’un consensus complet de toutes les factions sur le programme politique, cette réconciliation ne sera jamais atteinte.

« Pré-conditionner la réconciliation à la variable d’éventuelles négociations avec l’occupation, attendues à la suite du voyage d’Obama dans la région le mois prochain, c’est comme faire un mauvais pari sur des fantasmes qui ne prendront jamais corps », a affirmé Taher Al-Nounou, le porte-parole du gouvernement de Gaza . Sur sa page Facebook, Al-Nunu a ajouté : « Croire que la carte politique créée par les révolutions du printemps arabe va changer, c’est de l’adolescence politique, de l’immaturité. »

Sur l’autre bord, Saeb Ereikat, membre du Comité exécutif de l’OLP et du Comité central du Fatah, a fermement démenti un lien entre la prochaine visite d’Obama à l’Autorité palestinienne (AP de Ramallah) et les retards dans les efforts de réconciliation nationale. Ereikat a déclaré à la Voix de la Palestine, ce dimanche matin, que « La réconciliation nationale ne sera pas reportée après que Obama et le secrétaire d’État John Kerry aient visité la région. Les États-Unis ne veulent pas de réconciliation, ce qui est leur propre opinion, mais la position du président Abbas est que la réconciliation est une obligation de premier plan et notre premier objectif dans l’action. »

Et d’ajouter : « Après que la Palestine ait été reconnue par les Nations Unies, nous disons que les chose sont aujourd’hui différentes, et la pensée palestinienne devrait se baser sur de nouveaux horizons. Que Washington et Israël imposent des conditions et un droit de veto sur la réconciliation est irrespectueux à notre égard et nous ne devrons jamais y céder. » Il a en outre expliqué que Abbas « voulait former un gouvernement compétent, sous sa direction, dès que la date des élections sera fixée, et que élections auraient lieu dans les 90 jours qui suivraient cette annonce. »

Ereikat a encore défendu l’appel du Fatah pour les élections en question, et a rejeté la demande du Hamas pour que les élections soient précédées d’un climat politique approprié et l’affirmation que, parmi les points d’achoppement sur ​​le chemin de la réconciliation, il y a les prisonniers politiques et la question des libertés politiques. Selon le Hamas - et alors que lui-même a fait sortir tous les membres du Fatah de ses prisons - le gouvernement de Ramallah continue d’arrêter et de soumettre à des interrogatoires des centaines de membres du Hamas en Cisjordanie.

Khalil Al-Hayya, un des membres du bureau politique du Hamas, a déclaré que la question des libertés en Cisjordanie occupée retardait la réconciliation, soulignant que la formation d’un nouveau gouvernement comme la décision de fixer une date pour des élections, dépendront des progrès concernant la réconciliation.

« Un accord sur les libertés est essentiel afin de créer un climat propice à un accord sur une date pour les élections, » a expliqué Al-Hayya, ajoutant que l’accord sur la formation d’un gouvernement de consensus et sur la durée de son mandat dépendra de l’accord entre les factions sur les conditions et les exigences pour la tenue d’élections pour le Conseil national, le parlement et la présidence.

Mais alors que le Fatah et le Hamas se font porter mutuellement la responsabilité de l’échec de la réunion du Caire, des personnalités indépendantes qui ont assisté à la réunion tiennent les deux groupes pour fautifs. Khalil Assaf, une des grandes figures du Forum indépendant en Cisjordanie, a rendu les deux groupes responsables de l’échec patent de la réunion du Caire, mettant en cause l’absence d’intentions sincères de part et d’autre.

« Il est évident que les intérêts partisans et individuels ont pris le pas sur les intérêts nationaux », a déclaré Assaf. « Je blâme les deux partis (le Fatah et le Hamas) de cet échec, quoique à des degrés divers. Il était clair que le Fatah attendait que le Hamas fasse un faux pas et puisse être mis en cause, et vice versa. Malheureusement, ceux qui en paient le prix sont les Palestiniens, et ceux qui bénéficient de cette situation sont les occupants, leurs programmes et leurs colonies. Aussi, je pense maintenant que le peuple palestinien devrait prendre des mesures et descendre dans la rue. »

Et de poursuivre : « Malheureusement, ce qui s’est passé à la dernière réunion, c’était comme si un étudiant passait un examen sur un sujet qui lui est est vaguement familier mais qu’il n’a pas étudié à fond. »

Il y avait pourtant un optimisme sans précédent la semaine dernière sur les possibilités de parvenir à une réconciliation, si l’on se fie aux rumeurs sur une pression arabe et islamique sur le Fatah et le Hamas pour qu’ils aillent de l’avant. En fin de compte, il semble que le manque de confiance et les interventions extérieures ont fait chavirer le bateau palestinien de l’union nationale avant qu’il ait pu atteindre la côte.

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13 février 2013 - al-Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/News/142...
Traduction : Info-Palestine.eu - Nour et CZ


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