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Vies sous occupation : sans domicile fixe

jeudi 4 octobre 2012 - 12h:15

PCHR Gaza

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Le drame de la famille Abu Daher a commencé durant l’Opération Plomb Durci. Les forces israéliennes avaient, entre le 8 et le 10 janvier 2009, rasé et détruit la maison et les terres agricoles de la famille, situées à Qarara dans la partie Sud de la Bande de Gaza. Quatre ans après, ou presque, cette famille composée de neuf membres n’est toujours pas stable et vit sous une tente en métal et en nylon à l’Est de Qarara. Les Abu Daher sont actuellement incapables de démarrer n’importe quel projet lucratif et générateur de revenus afin de subvenir à leurs besoins.

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Afaf Abu Daher sous sa tente à Qarara

PCHR Gaza est allé à la rencontre de Afaf Abu Daher. Pour cette femme de 37 ans, les évènements ayant entouré leur déplacement sont difficiles à revivre : « Notre maison se trouvait à environ 300 mètres de la barrière frontalière. Nous vivions constamment sous les bombardements, les tirs et les missiles, ce qui empêche les enfants d’aller la plus part du temps à l’école. Et ce n’est pas tout, les forces de l’occupation israélienne menaient des incursions et arrêtaient les personnes. Puis, un beau jour, nous avons entendu une voix s’élevant d’un haut-parleur et qui nous sommait de quitter les lieux dans l’immédiat car la zone était ciblée. Nous n’avions pas d’autre endroit pour fuir, mais nous n’avions pas le choix ; alors nous sommes sortis et sommes partis nous réfugier avec d’autres familles dans une école de l’UNRWA de Qarara. Deux jours après l’annonce, notre maison a complètement été détruite et réduite à néant. Durant cette opération, 120 maisons ont été rasées et les habitants ayant refusé de quitter y ont trouvé la mort, comme ce fut le cas du cousin de mon époux qui, contrairement à ceux qui ont choisi de fuir, était resté sur place et a été tué. »

La famille est restée environ un mois dans l’école de l’UNRWA avant de louer une maison modeste à Qarara. Ils y sont restés un mois encore, puis ont décidé de planter une tente sur leur terre : « Au départ, nous pensions que nous pourrions retourner dans notre terre et trouver quelqu’un pour nous aider à reconstruire notre maison, mais ce n’était pas le cas. D’autre part, la location était chère et nous ne pouvions pas continuer dans ce sens ; c’est pourquoi, nous avons décidé de nous installer ici. »

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La tente des Abu Daher reliée à la chèvrerie de leurs voisins

Mais au fil des années, et en l’absence d’un véritable toit pour abriter les Abu Daher, la vie est devenue de plus en plus désagréable et dure à supporter : « Nous sommes tous fatigués de cette situation. Mes enfants et moi dormons dans une même pièce, sur des matelas à même le sol. Il y a un trou sur le mur, donc nous dormons dans la partie qui est proche des moutons du voisin. Et c’est là aussi où je cuisine. Lorsqu’il a plu, la dernière fois, le sol était inondé et nous ne pouvions pas dormir, malgré nos tentatives de changer le nylon du toit. Mes enfants n’osent jamais inviter leurs amis à la maison, ils préfèrent les voir dehors, c’est normal, ils ont honte de leur montrer la maison. »

Avant qu’ils ne soient des sans-abri, et avant qu’ils ne soient destinés à mener une vie de misère, les Abu Daher avaient leurs propres projets. Afaf se souvient : « Nous avions 7 dounams de terre où se trouvait notre maison et nos terrains agricoles. Nous possédions également environ 700 oliviers et nous élevions même les moutons, les poules et les vaches. Nous avions un revenu stable pour vivre grâce au lait et au fromage que nous produisions et vendions au marché. A l’heure actuelle, nous sommes tous au chômage ; c’est à peine si nous survivons. Nous avons seulement deux enfants scolarisés, les autres sont à la maison pour aider leur père avec des petits boulots et avec la collecte des gravats de bâtiments. C’est triste, mais nous ne pouvons hélas pas nous permettre de les envoyer à l’école car nous vivons avec l’aide des Nations Unies et avec ce que nous pouvons obtenir par ci et par là. Mon époux n’est pas en mesure de travailler parce qu’il est malade. Encore heureux que nous puissions survivre avec les 800 shekels que le gouvernement donne à mon mari comme paiement de son travail pendant un ou deux mois par an. »

La perte de son chez-soi a eu des répercussions néfastes sur l’état émotionnel de la famille Abu Daher : « Mes enfants sont traumatisés par la guerre. Ils font des cauchemars le soir. Un de mes enfants a assisté à une scène où trois enfants étaient morts, et un quatrième qui avait la tête tranchée. Il est encore sous le choc et se met à crier une fois la nuit tombée. Il est devenu somnambule. Pour ma part, j’ai mes propres craintes et cauchemars, mais je dois garder mon calme et parler avec mes enfants et leur expliquer ce qui s’est passé. Aussi, le centre de santé de Gaza nous envoie de temps en temps des gens qui viennent dans le but de nous fournir des conseils. »

S’agissant de l’avenir, Afaf souhaite seulement une meilleure situation pour ses enfants : « Nous avions une maison et menions une vie normale. Tout d’un coup, nous nous sommes retrouvés dépourvus de tout. Je cherche à améliorer la vie de mes enfants et à subvenir à leurs besoins. Je veux tout simplement qu’ils vivent, et non pas qu’ils luttent pour survivre. Je veux travailler, mettre de l’argent de côté et surtout, pouvoir vivre en paix. Je ne sais pas à quoi m’attendre pour l’avenir, surtout avec la situation déplorable actuelle. Nous sommes des réfugiés de Bersheva et l’UNRWA est censé nous loger, mais les années passent et nous n’avons pas obtenu un toit. Nous ne savons pas quand la situation se débloquera pour qu’on puisse enfin avoir une maison. Pour l’instant, nous n’avons d’autre choix que d’attendre, comme toujours. »

Les agissements d’Israël envers la population gazaouie en dirigeant des attaques contre des biens à caractère civil sont considérés comme des crimes de guerre, à en croire l’Article 8(2) (b) (ii) du Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale. De plus, l’Article 53 de la Quatrième Convention de Genève interdit « La destruction des biens appartenant à des personnes privées, à l’Etat ou à des collectivités publiques, sauf dans le cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires. »

La mise en place continue de la « zone tampon » tout au long des frontières terrestres de la Bande de Gaza entraine la violation de plusieurs dispositions relatives aux droits de l’homme, y compris le droit à un logement adéquat tel que codifié dans l’Article 11(1) du Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels.

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05 septembre 2012 - PCHR Gaza - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/portal/en/i...
Traduction : Info-Palestine.net - Niha


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