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Mahmoud Sarsak : Israël s’est senti menacé...

samedi 21 juillet 2012 - 08h:54

Shuaib Abu Jahal - Al-Akhbar

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Le footballeur palestinien Israël a été emprisonné et torturé pendant trois ans, sans procès ni même accusation. Il est enfin libre après une grève de la faim qui a duré 92 jours. Il raconte ici à Al-Akhbar l’histoire de son arrestation, de son emprisonnement puis de sa libération. Il nous transmet aussi les messages que lui ont confiés ses codétenus qu’il a laissés derrière lui.

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Le joueur de football Mahmoud Sarsak, qui a suivi une grève de la faim de près de trois mois dans une prison israélienne, est accueilli par ceux qui l’ont soutenu alors qu’il arrive après sa sortie de prison, dans une ambulance à l’hôpital Al-Shifa à Gaza, le 10 juillet 2012 - Photo : AFP/Mahmoud Hams

Shuaib Abou Djahel (SAJ) : Comment avez-vous été arrêté ?

Mahmoud Sarsak (MS) : Je n’ai pas été arrêté. J’ai été kidnappé à Beit Hanoun-Erez en juillet 2009. J’étais en route pour aller signer un contrat avec le Centre de jeunes de Balata, à Naplouse en Cisjordanie. J’ai donc été enlevé puis interrogé pendant 35 jours.

J’ai subi un interrogatoire militaire violent et la torture. Pour finir, ils m’ont collé une étiquette de « combattant illégal ».

SAJ : Quels ont été les accusations portées contre vous ?

MS : Il en y avait beaucoup, mais ce n’était que purs mensonges et fabrications.

Je crois que la seule raison pour laquelle j’ai été détenu, c’est que je suis un joueur de football palestinien et que j’ai voyagé à l’étranger pour représenter mon pays, ce qui fait que mon drapeau est déployé dans des événements internationaux.

Quand je me suis mis en grève de la faim, les mensonges israéliens ont été mis en pleine lumière. Joseph Blatter a insisté sur ma libération et menacé de retirer à Israël son statut de membre de la FIFA. Ceci a eu un effet sur Israël et le plaçait face au monde.

J’ai parlé au président de l’Union palestinienne de football, Jibril Rajoub, et celui-ci m’a révélé que Joseph Blatter (responsable de la FIFA), avait suivi mon cas pendant trois ans.

Les Israéliens ont dit à Blatter que j’étais une menace sérieuse pour leur sécurité et que j’étais accusé d’avoir tué cinq soldats israéliens. Ceci est un mensonge. Je suis un joueur de football, pas un combattant. Quand je me suis mis en grève de la faim, les mensonges israéliens ont été révélés. Blatter a exigé ma libération et a menacé de virer Israël de la FIFA.

SAJ : Quelle était votre vie en prison ?

MS : À l’intérieur de la prison, les forces d’occupation ont volé ma vie. Il se sont appropriés ce qui aurait été le sommet de ma carrière sportive.

J’ai été torturé pendant les interrogatoires. Beaucoup ne peuvent pas supporter cela et meurent pendant ces séances, mais j’ai survécu.

SAJ : Comment avez-vous passé ces trois années en prison ?

MS : Ma journée commençait dès après la prière du matin. J’ai lisais le Coran puis je faisais du sport pendant une heure. Je courais et sautais à la corde, par exemple.

Après le petit déjeuner, nous commencions nos séances de lecture. J’ai utilisé mes jours en prison pour m’inscrire à une formation professionnelle en sciences appliquées. J’ai obtenu mon diplôme avec une note moyenne de 96 sur cent.

J’ai passé la plupart de mon temps en prison dans le Néguev, mais après j’ai été déplacé entre neuf prisons différentes, y compris Nafha, Ramon, et Ramla. Dans cette dernière prison, j’ai passé tout mon temps en isolement.

SAJ : Comment avez-vous communiqué avec votre famille ?

MS : Malheureusement, la communication avec les membres de la famille était strictement interdite. Le seul moyen de communiquer était par une lettre envoyée tous les sept mois.

SAJ : Et les procès ?

MS : J’ai comparu devant un tribunal tous les six mois, mais ils étaient tous en trompe-l’ ?il. On me disait la même chose à chaque fois : « Vous êtes une menace pour la sécurité de l’État d’Israël. »

Je n’ai pas été autorisé à me défendre et je n’ai pas eu mon propre avocat. Tout cela parce que j’avais été étiqueté comme de « combattant illégal ».

SAJ : Pourquoi vous êtes-vous mis en grève de la faim ? Et quelles sont les conditions de vie pour les Palestiniens dans les prisons israéliennes ?

MS : Partir en grève de la faim était la seule façon pour un prisonnier d’arriver à ses fins. Cela avait été démontré peu de temps avant, puisque certains prisonniers ont gagné leur combat contre les autorités d’occupation.

Je savais que je pouvais atteindre mon objectif. En fin de compte, j’ai gagné et je suis sorti de prison.

En ce qui concerne les conditions à l’intérieur des prisons, elles sont très difficiles. Elles sont même catastrophiques et la situation pourrait entraîner une explosion à tout moment.

SAJ : Comment les autorités pénitentiaires faisaient-elles pression sur vous ?

MS : J’ai été mis sous une très forte pression. Ils exigeaient que je prenne des engagements précis pour être libéré, comme de ne pas menacer la sécurité d’Israël. Mais je ne leur ai donné aucune assurance. Je suis un homme libre. Ils ont rien à me reprocher.

SAJ : Comment la décision de vous libérer a-t-elle été prise ?

MS : Après d’âpres négociations.

Lorsque la décision a été annoncée, la souffrance de ma famille - pas seulement la mienne - a pris fin. Ils étaient dans une situation très difficile et ils ont été très soulagés quand je suis sorti.

Mais je m’attendais à une libération collective, pour résoudre les cas des prisonniers qui s’étaient mis en grève de la faim avec moi, comme Hassan al-Safadi, Akram al-Rikhawi, et Samer al-Barq, mais ce n’était hélas pas le cas.

SAJ : Quel message les prisonniers vous ont-ils demandé de transmettre ?

MS : Le premier message est pour les médias et il est sur la nécessité de se concentrer davantage sur les prisonniers, en particulier ceux en grève de la faim.

J’ai aussi un message pour les organisations rivales palestiniennes, pour leur demander de s’unir, de sorte que le peuple palestinien puisse à nouveau faire qu’un. Le second est le cas de 16 prisonniers qui sont malades et certains mourant à la clinique de la prison de Ramla, le « crime de la prison de Ramla. »

J’ai aussi un message aux factions rivales palestiniennes, leur demandant de s’unir, de sorte que le peuple palestinien puisse à nouveau ne faire qu’un, et ainsi que les deux sections de notre pays puissent se réunir sous le drapeau palestinien et non pas vivre sous les drapeaux de partis politiques.

SAJ : Comment décririez-vous votre joie d’être libéré ?

MS : Je me sentais une immense joie. Une joie que je n’ai jamais ressentie avant. Nous avons distribué des bonbons et dansé comme si nous venions tout juste de remporter la Coupe d’Europe ou du Monde.

L’accord de me libérer était une immense victoire. Nous avons vu le geôlier démoralisé et misérable et nous étions heureux.

Je suis heureux d’être parmi ma famille, ma mère et mon père. Cependant, c’est une joie qui n’est pas totale. J’ai laissé des personnes derrière moi, en train de mourir en prison.

SAJ : Vous êtes un sportif. Que dites-vous à propos de la position prise par le monde du sport pour soutenir votre cause ?

MS : Je suis très heureux du support montré dans le monde pour mon cas, en particulier celui venu des sportifs, car c’est le sport qui m’a sauvé des griffes de l’occupation.

Il y a eu des attitudes inestimables, en particulier celle de tous les commentateurs sportifs qui ont parlé de moi pendant les matchs, comme al-Shawwali, al-Darraji, Khleif, et les chaînes égyptiennes de sport.

SAJ : Quel est le rêve de Mahmoud Sarsak ?

MS : Mon rêve est que tous les prisonniers soient libérés et pour moi de devenir un joueur dans l’un des pays de premier plan, afin que je puisse transmettre au monde la cause palestinienne et la cause des prisonniers.

SAJ : Allez-vous revenir au football ?

MS : Certainement. Je serai de retour sur le terrain dès que mon état de santé le permettra.

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16 juillet 2012 - al-Akhbar - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduction : Info-Palestine.net - al-Mukhtar


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